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Togo: le pouvoir ne parle que le langage de la répression
Le pouvoir appelle l’opposition à un dialogue qui a peu de chances d'aboutir. Il pourrait être tenté de revenir aux vieilles méthodes.
Ainsi donc, les opposants au régime togolais peuvent manifester sur la voie publique sans être réprimés par les forces de défense et de sécurité.
La répression des manifestations publiques était devenue la règle dans ce pays, si bien que l’on ne peut passer sous silence la manifestation pacifique du «Collectif sauvons le Togo», le 25 août 2012 dans les rues de Lomé.
La surprise face à cette «manif» sans course-poursuite et sans gaz lacrymogène est telle que l’on en vient à oublier deux faits.
Le premier est qu’elle n’était pas autorisée par le pouvoir selon, en tout cas, les organisateurs qui disent n’avoir pas demandé l’autorisation.
Le deuxième est que deux marches du même collectif ont été dispersées les 21 et 22 août 2012.
La répression est contreproductive
Il a bien pu se passer quelque chose pour que les forces de défense et de sécurité passent d’une attitude répressive à une autre passive.
D’emblée, il faut se dire que les autorités ont dû se rendre compte que la répression est contre-productive. Elle ne dissuade pas ceux qui veulent marcher qui, bien au contraire, sont comme galvanisés par le gaz lacrymogène et les coups de matraque.
Quel que soit le pays dans lequel on se trouve, la répression fait toujours une mauvaise publicité du régime en place.
La fameuse chanson «force doit rester à la loi» que l’on entend à tout bout de champ ne fait que jeter de l’huile sur le feu la plupart du temps.
En début de la semaine 20 au 26 août 2012, le Togo s’est brusquement retrouvé, de la plus mauvaise des manières, sous les feux de l’actualité africaine avec la dispersion de la manifestation du collectif.
Les médias qui ont traité du sujet ont beaucoup plus stigmatisé le pouvoir que les manifestants qui tentent d’user d’un droit constitutionnel.
Ce changement d’attitude était nécéssaire
En changeant d’attitude, le pouvoir semble donc avoir retenu que rien ne sert d’interdire à des citoyens de marcher pour manifester leur mécontentement dès lors qu’ils donnent la garantie qu’il n’y aura pas de débordement, de casses et de vandalisme.
On peut aussi se dire que le pouvoir a lâché du lest pour donner une chance au dialogue politique auquel le tout nouveau Premier ministre, Arthème Séléagodji Ahoomey-Zunu, a convié, le 24 août 2012, les organisations de la société civile (OSC), les partis politiques signataires de l’accord politique global de 2006, la coalition Arc-en-ciel et le «Collectif Sauvons le Togo.»
Une rencontre dont l’objectif, selon ses initiateurs, est d’échanger, de recueillir des avis et propositions pour définir le dialogue politique et qui a été boycottée par ceux qui battent le pavé depuis belle lurette pour exiger, entre autres revendications, le changement du code électoral avant les élections législatives prévues en octobre prochain.
Le dialogue de sourds va-t-il mener à l'épreuve de force?
Pour sûr, on va vers un dialogue de sourds, un dialogue non inclusif dont les décisions n’engageront pas tout le monde.
L’adhésion du plus grand nombre, de ceux qui comptent, passe donc par un retour autour de la table de ceux qui disent ne plus avoir foi au dialogue avec un pouvoir qui a passé le temps à les rouler dans la farine.
Non content de boycotter le dialogue, le regroupement de neuf OSC et de sept partis et mouvements politiques de l’opposition a durci le ton en demandant la démission du chef de l’Etat, Faure Gnassingbé, et en appelant à la désobéissance civile.
Il est fort à craindre que, si les contradicteurs du régime en place ne mettent pas de l’eau dans leur vin concernant ces revendications, le pouvoir bande à nouveau les muscles.
Et la non-répression de la «manif» du 25 août dernier n’aura été qu’un répit, une trêve des confiseurs. D’ailleurs, il faudra attendre d’autres manifestations pacifiques pour crier victoire.
Autrement dit, se convaincre que les forces de défense et de sécurité ont véritablement changé leur fusil d’épaule.
Séni Dabo (Le Pays)
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