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La France va-t-elle devenir une terre de gauche?
Le chroniqueur ivoirien Macaire Dagry se demande si la France peut cesser d'être une terre de droite.
Depuis plus d’une décennie, la France qui a toujours été considérée comme une terre de Droite, est en train de basculer progressivement vers la Gauche, qui détient la plupart des conseils régionaux, des conseils généraux et des municipalités.
A la surprise générale, même le Sénat qui a toujours été détenu par la Droite, faisant dire à Lionel Jospin, alors premier ministre, que « cette institution était une anomalie dans la République », a vu sa majorité changer au profit de la Gauche. Ce qui fait dire à beaucoup d’observateurs politiques que la victoire de la gauche à l’élection présidentielle du 6 mai prochain est quasiment programmée depuis ses nombreuses victoires à toutes ces élections intermédiaires.
Arrivé en deuxième position derrière François Hollande, Nicolas Sarkozy que toutes les études de sondages donnent perdant au second tour depuis plus de six mois maintenant, se trouve sérieusement en difficulté avec un contexte politique différent de 2007.
A cette période, le candidat Sarkozy malgré un bilan mitigé au niveau de la sécurité, puisqu’il était ministre de l’intérieur et candidat jusqu’à un mois de l’élection présidentielle, était opposé à la socialiste Ségolène Royale qui ne faisait pas l’unanimité au sein de son propre parti.
Stratégie machiavélique
En dépit de sa nette victoire aux primaires socialistes, face à Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn, deux poids lourds de la vie politique française, les partisans de ces derniers et une grande partie des ténors socialistes ont tout fait pour favoriser sa défaite au profit de Sarkozy, pourtant de droite.
Cette stratégie machiavélique n’est pas nouvelle en politique. En 1981, pour la première fois de l’histoire de la cinquième République, un candidat de Gauche était élu président de la République. Après avoir été le premier ministre de Valéry Giscard d’Estaing, Jacques Chirac, éliminé au premier tour de l’élection présidentielle et de Droite comme Giscard (Centre-droit), a donné des consignes de vote en faveur du candidat de Gauche, François Mitterrand.
La logique de cette stratégie est simple. Après un mandat d’exercice du pouvoir, très souvent difficile à cause des contraintes et exigences nationales et internationales, il est beaucoup plus aisé d’affronter un candidat du camp adverse, qu’affronter celui de sa propre famille politique dont on a soutenu et défendu les politiques.
Même si dans la réalité, Sarkozy peut encore gagner, malgré une prestation décevante dans son face-face avec Hollande, le candidat-président de la République est confronté à de nombreuses contraintes qui limitent considérablement ses marges de manœuvre pouvant lui permettre de battre Hollande.
Avec lucidité, il envisage subtilement, la possibilité d’une alternance démocratique en France. C'est-à-dire la possibilité de perdre cette élection. Il sait que cette fois-ci, l’ensemble des socialistes et de la Gauche soutiennent et défendent ardemment François Hollande.
Il sait aussi que pour gagner, il est obligé comme en 2007 d’appeler ouvertement les électeurs du Front National à voter massivement pour lui, ainsi qu’une partie des centristes du MODEM. Or, le MODEM et surtout le Front National ont tout intérêt à ce que Sarkozy perde cette élection, afin de voir l’UMP imploser et espérer ainsi se positionner pour les prochaines législatives en juin.
Sarkozy sait également qu’il peut fortement mécontenter l’ensemble des républicains qui sont ouvertement hostiles à l’idéologie racistes et xénophobe du Front National. Il sait aussi que malgré le vote d’une grande partie de l’électorat du Front National en sa faveur en 2007, il n’a pas tenu ses promesses sur l’immigration et la préférence nationale, thèmes de prédilection de ce parti.
En déclarant que « Marine Le Pen est compatible avec la République », Sarkozy a-t-il franchi les limites entre réalisme et « compromission » comme se demandent plusieurs médias occidentaux ?
Du côté socialiste, le modeste score de Mélenchon qui avait été surestimé pour affaiblir Hollande et le succès de Marine Le Pen au premier tour, mettent également Hollande dans une position inconfortable.
Cela l’oblige de fait, lui aussi à séduire les électeurs du MODEM et du Front National. Il sait aussi que ces derniers sont plus sensibles aux thèses de l’UMP qu’à celles des socialistes. Hollande sait également qu’il doit rassurer le monde de la finance, les investisseurs, le monde show-biz et du sport et les cadres supérieurs qu’il effraie avec son désir de les taxer davantage, s’il veut gagner cette élection.
Il sait aussi que tout est encore possible malgré sa très belle prestation le 2 mai face à un Nicolas Sarkozy surpris et déstabilisé par un François Hollande qu’on croyait mou et sans personnalité.
Macaire Dagry
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