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Elephants au Kenya le 11 février 2011. Reuters/Noor Khamis
Elephants au Kenya le 11 février 2011. Reuters/Noor Khamis

La légion africaine de François Hollande

Et si la virginité était un atout? François Hollande n’a ni passé africain ni tropisme tiers-mondiste. Il se présente en homme neuf, partisan de la rupture avec la Françafrique.

Mise à jour du 17 mai: Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, le Premier ministre de François Hollande est composé de 34 membres dont 17 femmes. Christiane Taubira a été nommée Garde des Sceaux. Kader Arif devient ministre délégué chargé des Anciens combattants.

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Si François Hollande est élu, plus question de recevoir les dictateurs en grande pompe à Paris, ni même de se taire lorsque les potentats locaux bafouent les principes démocratiques. Au sein de son équipe de campagne, il a confié les questions ayant trait à l’Afrique à plusieurs responsables en fonction des thématiques abordées.

La tête d’affiche

Kader Arif sera-t-il le ministre de la Coopération? Lui-même s’y verrait sans doute très bien. Il dirige le pôle « coopération » au sein de l’équipe mise en place par François Hollande pour élaborer son programme politique. Mais Kader Arif est bien davantage qu’une des têtes pensantes du staff politique du candidat socialiste. Né en Algérie en 1959, ce député européen, élu local toulousain doit une partie de sa carrière à François Hollande qui a soutenu sa candidature aux élections européennes de 2004. Depuis quelques mois, il effectue de nombreuses missions sur le continent, et en particulier en Algérie, pour le compte de François Hollande.

Son discours est calqué sur celui de son mentor: il prône une rupture avec la Françafrique traditionnelle, une révision en profondeur des politiques commerciales et migratoires et une refonte de l’aide au développement. Il est devenu incontournable sur les questions africaines. Avantage: c’est un homme neuf, à la fois politique, technicien et fidèle du candidat.

Les outsiders

Christiane Taubira, l’électron libre qui vibre à gauche,  rédige depuis peu des notes « Afrique » notamment sur la région des Grands lacs, pour le compte de François Hollande. Ancien soutien d’Arnaud Montebourg lors des primaires socialistes, elle fait désormais partie des noms cités à gauche (surtout par ses proches) pour occuper le ministère de la Coopération. Moins politique, moins médiatique, Jean-Michel Severino participe lui aussi activement à l’élaboration de la « pensée africaine » du candidat socialiste. Ancien directeur général de l’Agence française de développement jusqu’en 2010, il s’occupe des pays émergents au sein de l’équipe de campagne. Né à Abidjan, cet inspecteur des finances, fils d’immigrés italiens, fut aussi le vice-président Asie de la Banque mondiale. Il possède une expérience et une autorité qui en font l’un des plus écoutés au PS sur les questions Nord-Sud.

Les VIP

Sans faire partie du premier cercle hollandien, certaines personnalités ont été approchées en raison de leur image. Ainsi de l’ancien secrétaire d’État à l’Intégration de François Mitterrand, Koffi Yamgnane. Il a été imposé par François Hollande qui souhaitait « colorer » quelque peu son « staff Afrique ». Autre personnage très médiatisé, l’avocat William Bourdon président de l’association Sherpa travaille sur les questions de droits de l’Homme. Parmi ceux qui se verraient bien sur la photo, il y a aussi l’académicien et ancien ambassadeur de France au Sénégal, Jean-Christophe Ruffin. Son flirt avec Nicolas Sarkozy ayant fait long feu, il s’est rapproché des socialistes et fait valoir une expérience diplomatique. Petit bémol, il a soutenu Martine Aubry lors des primaires socialistes.

Les barons

Si François Hollande entend faire circuler du sang neuf dans sa politique africaine, jusqu’à présent il a toujours recours aux vieux briscards du PS pour les missions délicates. Ainsi, c’est Martine Aubry qui est allée discuter avec le roi du Maroc en mars dernier pour le compte du candidat, l’assurant au passage de la convergence de vue entre les socialistes français et le roi Mohammed VI au sujet de la question du Sahara occidental. Jean-Louis Bianco est lui allé saluer le président ivoirien Alassane Ouattara en avril dernier. Tandis que c’est Lionel Jospin qui s’est montré à l’investiture du président sénégalais libéral Macky Sall.

Enfin, celui qui ne cache pas son souhait de devenir ministre des Affaires Etrangères, Laurent Fabius a mené de délicates missions de prise de contact à Libreville en février, puis à Lomé et Cotonou. Des personnalités que les Chefs d’Etat africains connaissent bien et qui ont un profil rassurant quant à cette fameuse rupture promise par le candidat Hollande. Ces responsables pèseront sur les prises de position quelles que soient leurs futures fonctions.

Les Apparatchiks

Si François Hollande devient président, Martine Aubry a de fortes chances d’occuper un poste ministériel et le PS se trouvera sans doute un nouveau Premier secrétaire. Par le passé, le Premier secrétaire a souvent mené des missions en Afrique et dans le monde, où il représente le parti. Aussi les dirigeants africains ne négligent jamais le chef de file du parti au pouvoir. Sur les rangs pour succéder à Martine Aubry figurent Jean-Christophe Cambadélis secrétaire national à l’Europe et à l’international et Harlem Désir, premier secrétaire délégué du PS. Le premier a provoqué la méfiance de François Hollande en raison de son soutien à Laurent Gbagbo. Le second est imbattable sur les questions d’identité et d’immigration pour avoir dirigé SOS Racisme.

Les techniciens  

Si beaucoup de personnalités rédigent des notes «Afrique» pour François Hollande, une équipe de techniciens élabore sa future politique. Au cœur de ce dispositif figure notamment Thomas Mélonio qui s’occupe des politiques de développement au sein du pôle « international ». Il est aussi le « monsieur Afrique » du Parti socialiste, nommé à ce poste par François Hollande afin de succéder au sulfureux Guy Labertit, grand ami du désormais infréquentable Laurent Gbagbo.

Docteur en sciences économiques, diplômé d’HEC, il travaille au sein de l’Agence française de développement, l’AFD. Thomas Mélonio, c’est un peu la modernité pétrie de bonnes intentions. Il souhaite une rupture fondamentale avec « le paternalisme d’hier, le cynisme d’aujourd’hui, et la tentation toujours vivace du retrait », comme il l’écrivait en 2009 dans la Revue socialiste.

Parmi les têtes pensantes, d’autres techniciens comme Pierre Schapira, adjoint au maire de paris, ou encore Louis-Mohamed Sèye, grand promoteur de la diversité au sein du PS, planchent respectivement sur les questions de coopération décentralisée et de co-développement pour le candidat.

Les exclus

Ils ont souvent laissé de mauvais souvenirs en Afrique. Ils représentent un passé parfois sulfureux et nuisent à l’image de rupture que veut donner le candidat. Ce sont les bannis de l’équipe Afrique de François Hollande. Tous ont flirté avec celui que François Hollande a rejeté dès 2004, Laurent Gbagbo. Guy Labertit, le fidèle ami du « boulanger » d’Abidjan, a dû quitter les fonctions qu’il occupait au sein du PS à la tête de la cellule Afrique.

Jean-Marie Le Guen, et Jack Lang qui s’étaient rendus à Abidjan en pleine campagne électorale en 2010 ont fait les frais d’une trop grande proximité avec le président ivoirien. Quant à Henri Emmanuelli qui se présentait comme le « frère jumeau » de Laurent Gbagbo, il y a perdu au passage la considération de sa famille poitique. Le député François Loncle qui tirait à boulets rouges sur la presse française durant la crise ivoirienne a connu le même sort.

Alex Ndiaye

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Alex Ndiaye

Alex Ndiaye. Journaliste sénégalais, il est spécialiste de l'Afrique.

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