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Guinée-Bissau - Pourquoi le président défunt est regretté
L'annonce de la mort du président de Guinée-Bissau, Malam Bacai Sahna, le 9 janvier à Paris des suites d'une maladie dont il taisait le nom, a bouleversé les Bissau-Guinéens malgré la connaissance de l'état de santé de leur président.
«C’est à fois la consternation et l’inquiétude dès l’annonce officielle de la nouvelle, indique RFI. En début d’après-midi, des radios locales ont aussitôt interrompu leurs programmes pour diffuser des musiques révolutionnaires entrecoupées de communiqués annonçant le décès du président Malam Bacaï Sanha.»
Alors qu'un communiqué officiel a annoncé qu'un deuil national de sept jours avait été mis en place le 9 janvier à minuit, déjà dans l'après-midi, une foule de militants de son parti et de proches en pleurs se réunissait devant sa résidence privée, précise RFI.
Tristesse, recueillement mais aussi inquiétude sont les mots qui qualifient l'état des Bissau-Guinéens. Car le décès du président bissau-guinéen suscite de multiples questionnements quant à l'avenir du pays. A commencer par le Sénégal, pays voisin, allié de la Guinée-Bissau sous l'ère du président défunt. Le portail sénégalais Senego explique en effet que la mort du président Sanha «constitue un danger pour son pays qui peine à trouver une stabilité institutionnelle depuis plusieurs années, confronté également au narcotrafic dont il est devenu une plaque tournante en Afrique de l’Ouest».
Avant de préciser:
«Aujourd’hui, même si elle n’occupe pas les devants de l’actualité comme ces cinq dernières années, la Guinée-Bissau n’en demeure pas moins un sujet de préoccupation tellement ses équilibres sont fragiles. L’histoire de la Guinée Bissau a été marquée par des pages noires; des troubles qui ont fortement menacé sa stabilité, ainsi que celle de ses voisins, le Sénégal notamment, avec la rébellion du Mfdc (Mouvement des forces démocratiques de Casamance).»
Car si le Sénégal est inquiet, c'est surtout pour sa propre sécurité. Malam Bacaï Sahna avait participé au processus de stabilisation de la Casamance en envoyant des troupes pour éviter que la Guinée-Bissau ne devienne la base arrière des rebelles de la région, comme ça avait pu être le cas au cours des années 1990.
Senego indique à ce sujet: «la rébellion casamançaise a été une ressource économique pour des acteurs privés, notamment militaires (trafics d’armes), en même temps qu’une ressource politique pour l’Etat bissau-guinéen qui pouvait utiliser la rébellion comme levier, dans son bras de fer avec le Sénégal, à propos d’un litige territorial portant sur la délimitation de la zone économique exclusive.»
Or, Malam Bacaï Sahna avait souhaité un rapprochement avec Dakar pour mettre fin aux liens existant entre la rébellion casamançaise et la Guinée-Bissau. Une aubaine pour Abdoulaye Wade, président du Sénégal, qui a fait de la Casamance l'un de ses thèmes majeurs de campagne pour l'élection présidentielle du 26 février prochain.
Le président bissau-guinéen est décédé moins de deux semaines après qu'une tentative de coup d'Etat a été déjoué; «le dernier d’une série de putschs réussis ou avortés qui illustrent l’instabilité et les violences qui marquent la Guinée-Bissau depuis son indépendance du Portugal en 1974», indique Senego.
Un coup dur pour Wade à quelques semaines de l'élection présidentielle au Sénégal.
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