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Tunisie - La révolution a-t-elle trahi les femmes?
Depuis l’élection de l’Assemblée constituante du 23 octobre 2011 en Tunisie qui a plébiscité le parti islamiste Ennahda à 41,47%, certaines Tunisiennes sont inquiètes pour leurs droits et leur place dans la société.
Voilà un an que le jeune marchand ambulant Mohamed Bouazizi de la ville tunisienne de Sidi Bouzid s’est immolé par le feu et a déclenché le soulèvement populaire qui a conduit à la chute du président Ben Ali le 11 février 2011. Depuis, la Tunisie s’est dotée de nouveaux dirigeants: un président, Moncef Marzouki du Congrès pour la République (CPR); un Premier ministre, Hammadi Jebali, le numéro deux d’Ennahda; et le président de l’Assemblée, Mustapha Ben Jafaar du parti de gauche Ettakatol.
Mais certains, et en particulier les femmes, sont «inquiets de se voir confisquer la révolution», explique le quotidien français le Parisien. Dans un reportage réalisé à Tunis et publié le 18 décembre, le journal interroge notamment des femmes qui manifestent depuis des semaines devant le palais du Bardo où siège l’Assemblée. L’une d’entre elles, Monia ben Jemia, membre de l’Association tunisienne des femmes démocrates comprend le repli sur la religion:
«la pression sociale, surtout dans les classes les moins favorisées, est énorme pour que les femmes reviennent au voile. Après cinquante ans de dictature et une très grave crise économique, il est inévitable que les gens se réfugient dans la religion», explique cette femme de 54 ans.
Ce repli se fait ressentir en marge, avec par exemple, des manifestations de musulmans salafistes dans une université pour l’autorisation pour les filles de porter le voile intégral en cours (le niqab), et l'obtention de salles de cours non mixtes et de salles de prière.
Monia ben Jemia craint la modification du Code du statut personnel des femmes de 1956, qui assure juridiquement la «quasi-égalité» avec les hommes. Une autre, Olfa Lajili, présidente du Mouvement du 24 octobre, contre les fraudes électorales, pensent qu’Ennahda est «un parti islamiste pur et dur qui porte juste le costume de la démocratie».
Pourtant, l’élue islamiste (non voilée) Souad Abderahim, qui avait critiqué les mères célibataires car elles ne respectaient pas la structure familiale traditionnelle, affirme qu’elle est «la garantie vivante qu’Ennahda ne voilera jamais les femmes de force». Elle a également mis l’accent sur le fait que le parti allait «strictement veiller à protéger le Code du statut personnel».
En tout cas, de nombreuses femmes veillent et sont prêtes à défendre leurs acquis, à l'image d'Imen: «Porter un voile, c'est un choix personnel. Et si mon mari veut m'y forcer, je recommence la révolution», clame la jeune femme.
Lu sur Le Parisien
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