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Les supporters de Joseph Kabila célèbrent la victoire, le 9 décembre .REUTERS/Stringert
Les supporters de Joseph Kabila célèbrent la victoire, le 9 décembre .REUTERS/Stringert

En RDC, c'est la fraude qui a gagné

La réélection de Joseph Kabila n'a surpris personne. En revanche, ce dernier n'a pas été choisi par le peuple congolais. Son maintien au pouvoir, il le doit à la fraude massive.

Mise à jour du 15 décembre: Rejettant les résultats officiels, le parti de l'opposant Etienne Tshisekedi, l'UDPS, a appelé hier le "peuple à protéger sa victoire" à travers des "manifestations pacifiques" en RDC, où plusieurs opposants ont été blessés lors de la dispersion d'une marche par des soldats de la Garde républicaine.

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Mise à jour du 14 décembre: La mission d'observation de l'Union européenne a publié, hier, un rapport très critique sur l'élection présidentielle de la RDC. L’UE déplore le manque de transparence et les irrégularités dans la collecte, la compilation et la publication des résultats.

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Les résultats de l’élection présidentielle en République démocratique Congo (RDC) sont désormais connus. La Commission électorale qui entretenait jusque-là un secret de Polichinelle a fini par sortir de son mutisme coupable.

Et, comme on pouvait s’y attendre, c’est le président sortant, Joseph Kabila, qui a été proclamé vainqueur avec près de 49% des suffrages exprimés, surclassant au superlatif son principal rival Etienne Tshisekedi qui totalise 33% des voix. Ainsi donc Kabila-fils rempile pour un nouveau mandat après dix ans d’exercice du pouvoir d’Etat.

RDC, Côte d'Ivoire, même combat

Et, au même moment, son adversaire Etienne Tshisekedi, s’est autoproclamé président, sitôt après la proclamation officielle des résultats. Comme ce fut le cas en Côte d’Ivoire avec toutes les péripéties que l’on a connues, la RDC débouche sur un régime dyarchique où deux individus, qui se vouent une haine morbide, se proclament présidents dans un même Etat.

Le second tour de la présidentielle du 28 novembre 2010, en Côte d’Ivoire, et le scrutin couplé du 28 novembre 2011 en RDC auront apporté aux peuples des deux pays misères et souffrances. Déjà, on dénombre plus de cinq morts sur le carreau lors des violences qui ont suivi la proclamation des résultats en République démocratique du Congo, et cela, sans compter les nombreuses vies fauchées depuis le début du processus électoral.

«Tristes tropiques», écrivait si ingénieusement l’anthropologue français Claude Lévis-Strauss. Le peuple congolais qui en avait assez des turpitudes de ses hommes politiques, voit ainsi ses souffrances prolongées à l’infini, lui qui croyait pourtant vaincre le signe indien à travers ces élections longtemps attendues.

Un scrutin gangrené par la fraude

En tout cas, en observant de très près le processus électoral en République démocratique du Congo, on se rend compte que seule la fraude a triomphé, le peuple, lui, étant sorti perdant. Et cela, le centre Carter, une ONG américaine l’a clairement relevé à travers un rapport cinglant qui tombe comme un couperet pour le pouvoir de Kinshasa.

En effet, ce centre qui n’a jamais fait mystère de son opinion, a déclaré que les récentes élections en RDC ont été entachées de graves irrégularités. A sa suite, l’évêque de Kinshasa, le cardinal Laurent Monsengwo, a également jeté un pavé dans la mare en soutenant que les résultats qui ont proclamé Kabila vainqueur, n’étaient conformes ni à la vérité ni à la justice. De quoi hérisser le poil de Kabila dont le porte-parole est aussitôt monté sur ses grands chevaux pour nous entonner le traditionnel refrain de l’ingérence.

Comment peut-on se réjouir d’être élu à l’issue d’un scrutin jugé chaotique? C’est difficile, à moins d’être né après la honte, comme on dit. Certes, on peut, comme le disent certains, remonter les bretelles à l’opposition congolaise pour ne s’être pas unie pour désigner un candidat unique.

Mais, il faut tout de même reconnaître que l’unité de l’opposition ne pouvait visiblement rien dans une compétition où le vainqueur était connu d’avance, et les règles du jeu faussées. La fraude, on le sait, est devenue l’arme efficace qu’utilisent bien des chefs d’Etat sortants, candidats à leur propre succession, pour faire obstacle à leur opposition, quand celle-ci décide de s’unir. Et ce scénario honteux, on y est habitué, sur le continent.

Boundi Ouoba (Le Pays)

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Boundi Ouoba

Journaliste burkinabé.

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