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Sénégal - Une rappeuse contre l'excision

Rappeuse, Sister Fa a décidé de mettre sa musique au service de la lutte contre l’excision en Afrique. Comme le souligne l’hebdomadaire sud-africain Mail & Guardian, c’est son beau-père autrichien qui l’a encouragée à s’engager dans ce combat.

Sister Fa vit à Berlin, mais est née au Sénégal. Elle connaît bien le problème: elle-même a été excisée étant petite. A Dakar, la capitale, elle fait campagne sous la bannière «L’éducation contre l’excision». Elle veut ouvrir les yeux aux femmes, aux hommes, mais aussi aux ONG étrangères. Sister Fa explique:

«Il y a des gens qui confondent les choses, les Occidentaux particulièrement. Ils pensent que c’est un acte barbare. Que c’est une mutilation. Que c’est horrible pour une mère de mutiler son propre enfant. Mais ce n’est pas le cas! Cette vision des choses est à l’origine de l’échec des tentatives d’éradication de cette pratique dans mon pays.»

L’excision est considérée comme un rite de passage vers l’âge adulte en Afrique. Là-bas, elle n’est pas synonyme de «mutilation», un terme qui sous-entendrait que l’on blesse volontairement. Cette pratique fait partie intégrante des cultures locales, et c’est pourquoi l’objectif est de changer les mentalités. C’est un travail de longue haleine. Pour Sister Fa, la musique est un vecteur efficace.

Au Mail & Guardian, Nafissatou Diop explique que les ONG n’ont compris que récemment qu’il fallait changer de stratégie. Elle est chargée de coordonner le programme des Nations unies contre l’excision en Afrique. Porté par le Fonds des Nations unies pour la Population et l’Unicef (fond de l’ONU pour l’Enfance), il a été lancé en 2008 et est présent dans douze pays du continent noir.

Grâce au programme, en l'espace de trois ans 6.000 communautés à travers six pays africains auraient abandonné cette pratique. Mais l’excision reste courante dans 28 pays du continent, et deux millions de femmes y seraient exposées.

«Nous sommes en train de réaliser qu’il est nécessaire d’agir à long terme, d’ouvrir un dialogue, sans jugement, d’expliquer les choses dans leur contexte et d’amener les gens à abandonner volontairement les mutilations génitales féminines (MGF). Quand ce type de changement se fait par et au sein de la communauté, ce n’est pas perçu comme une "intrusion étrangère".» confie Nafissatou Diop.

Elle estime également que le message passe mieux quand c’est une Africaine qui s’adresse aux Africaines, comme le fait Sister Fa. Avant elle, le chanteur ivoirien Tiken Jah Fakoly avait lui aussi sensibilisé les jeunes en chanson avec son tube «Non à l’excision».

Lu sur le Mail & Guardian