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Apple, la marque des révolutionnaires
La technologie d'Apple a aussi joué un rôle essentiel dans les soulèvements des pays arabes.
Etrange coïncidence que celle que j’ai vécue: alors que Steve Jobs s’éteignait à Palo Alto, mon bon vieux MacBook Air, de la première génération conçue en 2008, rendait l’âme à Rabat. J’y ai vu un signe ésotérique. Et quelle fut ma déception d’apprendre son décès sur un PC aussi rustique que bruyant.
Steve Job, le prophète
Comme pour tous les afficionados d’Apple, cette expérience personnelle prouve que le génial Steve Jobs a su créer entre les utilisateurs de ses produits et leur univers presque magique un lien qui confine à l’adoration, au mystique. Ce n’est pas pour rien que l’on dit que l’humanité a été jalonnée par trois pommes existentielles: celle qu’a croquée Eve, celle qui tomba sur le crâne de Newton et celle qu’inventa Steve Jobs.
Si Steve Jobs a été le prophète d’une génération, tant ses inventions ont révolutionné la vie de millions de gens à travers le monde au point qu’il soit comparé à Thomas Edison, il est aussi, vu du monde arabe en ébullition, l’une des icônes du changement. Bien sûr, son portrait n’a pas côtoyé ceux du Che ou des martyrs révolutionnaires dans les rues du Caire ou de Tunis, mais sa présence était certainement plus réelle.
On a beaucoup disserté ces derniers mois sur l’influence des nouveaux médias dans les révolutions arabes. Cette puissance de communication qui a rendu instantanément obsolète toute forme classique de propagande officielle. Les régimes ébranlés par l’extraordinaire vitesse de propagation de l’information via Facebook et Twitter ont tout fait pour les étouffer. Sans grand succès comme on l’a vu. Mais ce sont, il ne faut pas l’oublier, les chaînes satellitaires qui ont grossi les messages des manifestants reprenant à une échelle encore plus large les images filmées par des téléphones portables, dont le fameux iPhone d’Apple.
Des outils pour filmer la révolution
Les réseaux sociaux ont certes joué un rôle capital, mais certainement pas aussi déterminant que les contenus vidéos qu’ils ont véhiculés. Prenons le cas marocain que j’ai vécu en direct avec l’éclosion du Mouvement du 20 février. Le succès de la mobilisation n’a été rendu possible que par la créativité des concepteurs d’un clip au graphisme aussi percutant que moderne où l’on voit quatorze Marocains de tous âges dénoncer les injustices sociales et exprimer leur soif de démocratie. Un clip réalisé par des adolescents qui a balayé en quelques minutes des décennies de propagande télévisuelle déployée à coups de milliards par la télévision d’Etat et ses médias classiques. Un clip réalisé grâce à un Mac aux possibilités infinies et à la facilité d’utilisation déconcertante.
C’est cette alchimie entre la créativité artistique d’une jeunesse engagée et un outil formidable qui a eu cet incroyable impact sur tant de gens.
«Ne laissez pas la voix des autres couvrir votre voix intérieure» a dit Steve Jobs dans un discours mémorable aux lauréats de l’Université de Stanford. «Gardez les crocs, restez insouciants» avait-il ajouté.
C’est exactement ce qu’a fait la jeunesse du monde arabe qui se rappelle aujourd’hui au bon souvenir de ce visionnaire hors normes.
C’est aussi pour cela que j’ai tenu à écrire ce billet sur mon Mac ressuscité, quitte à le livrer avec un peu de retard.
Ali Amar
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