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Paul Barril, l'homme qui a toujours nié le génocide des Tutsis au Rwanda
L'ex-numéro du GIGN en France serait-il aveuglé par une forme «anti-tutsime»?
Les circonstances de l’interpellation, ce lundi 30 juin à Antibes, dans le sud de la France, de Paul Barril sont encore floues. Alors que certains y voient une avancée dans les deux instructions ouvertes contre lui concernant son implication présumée dans le génocide des Tutsis au Rwanda, d’autres font savoir que son arrestation serait plutôt liée à des ennuis de santé.
Âgé de 68 ans, on le dit souffrant de la maladie de Parkinson. «Suite à un ennui de santé, les pompiers ont été appelés. Ils ont constaté sur place la présence d'armes, ce qui a déclenché une espèce de tsunami policier», a aussitôt fait savoir son avocate Sophie Jonquet, dans des propos rapportés par France Info, avant d’ajouter que «Paul Barril a été évacué à l’hôpital à la suite de ennui de santé».
Tout ceci explique les réserves de l’ONG Survie qui a déposé une plainte il y a un an, avec la Fédération internationale des droits de l’Homme et la Ligue française des droits de l’Homme, contre Paul Barril pour complicité de génocide au Rwanda.
«Si son arrestation n’est pas liée à cette affaire, il sera vraisemblablement relaxé. En revanche, s’il est établi que cela s’est fait dans le cadre de l’enquête, nous serions satisfaits de constater que la justice avance», indique François Cetollier, le responsable du dossier à Survie.
Dans tous les cas l’emballement médiatique qui a suivi l’intervention du GIPN au domicile de Paul Barril s’explique par deux choses.
D’abord, cet homme n’est pas un simple quidam. Ex-numéro deux du GIGN, le Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale, ancien membre de la cellule antiterroriste de l’Elysée sous François Mitterrand, il avait ensuite conseillé de nombreux chefs d’Etat en Afrique et au Rwanda, notamment. C’est dans ce cadre qu’il négocie un accord de fourniture d’armes et de munition et de formation et d’encadrement avec le gouvernement intérimaire de l’époque, alors que le Rwanda était en plein génocide.
Ensuite, lorsqu’on évoque le nom de Paul Barril, il y a toujours comme «une odeur de poudre», pour reprendre l’expression du CPCR, le Collectif des parties civiles pour le Rwanda.
Le cofondateur du GIGN est connu pour sa proximité avec la famille du président rwandais Juvénal Habyarimana, dont l’assassinat en 1994 a conduit au génocide de la minorité tutsie du pays. Paul Barril, soupçonné d’être impliqué dans cette horreur, a toujours nié la réalité même d’un génocide. Il parle plutôt de «massacre» dont les instigateurs seraient plutôt les Tutsis, lesquels selon lui avaient déjà tué en 1993 près de 100.000 Hutus au Burundi voisin.
«Un crime de masse passé aux oubliettes de l'histoire. Les Hutus du Rwanda, terrorisés, pensaient que le même sort les attendait s'ils ne réagissaient pas. Ils ont tué avant qu'on ne les tue», explique-t-il, en avril, dans une interview au Point. C’est ce point de vue qui est consigné dans son livre Paul Barril brise le silence dont la sortie est prévue dans les prochains jours.
Mais qu’est-ce qui explique le négationnisme de Paul Barril au sujet du génocide des Tutsis au Rwanda?
«Son discours depuis 20 ans consiste à banaliser ce qu’il s’est passé au Rwanda, explique François Cetollier de Survie. Son objectif est de manipuler l’opinion pour tenter de masquer la réalité des faits. Il semble aveuglé par une forme d’anti-tutsime et il se considère comme une sorte de corsaire de la République.»
Raoul Mbog