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L'Ouganda, nouveau maître du jeu au Soudan du Sud
L'intervention de l'Ouganda pour mettre un terme au conflit est purement calculée, mais ça n'est qu'une bonne chose.
Le soutien militaire de l’Ouganda au Soudan du Sud ne fait plus l’ombre d’un doute. Si l’armée sud-soudanaise affirme fièrement avoir repris le contrôle de la ville de Bor jusque-là entre les mains des hommes de Riek Machar, c’est bien grâce au soutien de l’aviation ougandaise. Et ce n’est pas chose étonnante, car le président ougandais, Yoweri Museveni, n’a jamais caché son soutien au président Salva Kiir. N’avait-il pas d’ailleurs déclaré que si Riek Machar refusait d’aller aux pourparlers, il l’y amènerait de force? Il reste donc logique avec lui-même en intervenant militairement aux côtés de Salva Kiir. Cela dit, le dénouement de la crise au Soudan du Sud viendra-t-il de l’Ouganda?
Accélération des négociations
En tout cas, on connaît l’engagement total de ce pays aux côtés du président Salva Kiir. L’Ouganda est en train de devenir, si ce n’est déjà le cas, le nouveau maître du jeu au Soudan du Sud. En plus de l’aviation, il a envoyé sur le sol sud-soudanais, environ 1.600 soldats.
Reste à savoir si ce soutien massif va contribuer à dénouer plus rapidement la crise ou compliquer davantage la situation. La paix au Sud Soudan s’obtiendra-t-elle par le canon? Il est évident que certains, notamment le camp de Riek Machar, voient d’un mauvais œil cette offensive ougandaise contre leurs positions et pourraient ainsi prétexter cela pour se retirer des pourparlers. Mais cette puissance de feu ougandaise pourrait donner un coup d’accélérateur aux négociations qui piétinent à Addis Abeba en Ethiopie.
Dans une situation comme celle-ci, un rapport de force nettement en faveur d’un camp est déterminant dans la résolution de la crise. Si les négociations continuent de s’enliser, c’est bien parce que sur le terrain, les forces sont en équilibre.
En vérité, tant que les deux camps continueront à se disputer le contrôle des villes stratégiques, il sera difficile de leur faire entendre raison. Mais si un camp l’emporte sur l’autre, le dernier sera obligé de faire des concessions, de se soumettre aux exigences du vainqueur.
Stagnation de la situation
L’exemple de la RDC avec les rebelles du M23 est illustratif à cet égard. Il aura fallu que l’armée congolaise, appuyée par la brigade d’intervention de l’ONU, défasse militairement ce mouvement pour qu’il dépose les armes. C’est dire combien le soutien de l’armée ougandaise peut être déterminant.
Certes, le dialogue demeure une voie incontournable car, comme on le dit, «toute guerre finit autour d’une table». Mais à l’étape actuelle où on assiste à une stagnation de la situation, il serait bon qu’un camp prenne le dessus sur l’autre. Car l’histoire récente des crises en Afrique nous enseigne que c’est par la force qu’on a pu décanter les situations les plus difficiles, surtout lorsqu’on avait en face des positions inconciliables.
C’est vrai que l’ancien maquisard Yoweri Museveni ne soutient pas le Soudan du Sud pour des considérations démocratiques ni pour les beaux yeux de Salva Kiir. Car, on le sait, son pays s’approvisionne en produits pétroliers à partir de cette jeune nation. Donc, il s’agit plus pour l’Ouganda de défendre ses intérêts que de faire de l’humanitaire où de défendre la légalité. En attendant, si son intervention peut contribuer à mettre fin à la souffrance des populations, c’est tant mieux.
Dabadi Zoumbara
Cet article a d’abord été publié dans Le Pays