mis à jour le

La télé algérienne court-circuite al-Jazeera
La télévision officielle algérienne diffuse illégalement un match dont les droits de retransmission appartenaient à la chaîne qatarie al-Jazeera.
La télévision nationale algérienne vole du contenu et ne s'en cache pas. Le 12 octobre dernier, la chaîne officielle ENTV a diffusé le match Burkina Faso-Algérie, sans acheter les droits de retransmission. En représailles, la chaîne qatarie al-Jazeera, qui détenait les droits de retransmission, a promis des poursuites judiciaires contre la chaîne algérienne.
Le plus surprenant dans cette affaire, c'est la facilité avec laquelle la direction de l'ENTV a justifié son acte:
«La décision que nous avons prise est légitime, a expliqué Tewfik Khelladi, directeur général de la télévision algérienne. Le détenteur des droits [Al-Jazira] a refusé de se soumettre à une obligation universelle en la matière, à savoir la cession à un prix commercialement juste des droits de diffusion terrestre.»
Pas si surprenant, note le quotidien el-Watan: il rappelle que cette pratique est presque devenue banale dans une chaîne dont le fonctionnement relève du mystère pour beaucoup d'Algériens. Comme le souligne le quotidien, la chaîne officielle est à l'image d'un pouvoir régi par le secret d'Etat, qu'il s'agissent du budget, des contrats publicitaires ou de la masse salariale...
Le journaliste d'El watan va plus loin en déclarant l'avis de décès d'une chaîne qui se veut la porte-parole du régime, tout en niant les débats qui animent et déchirent la société algérienne:
«L’ENTV est pratiquement un média mort, puisqu’il n’a presque plus d’influence sur l’opinion nationale. Une opinion mieux informée par les chaînes étrangères de ce qui passe en Algérie et dans le monde.»
Pour Isabelle Mandraud, correspondante du quotidien Le Monde en Algérie, le piratage de la chaîne officielle s'explique aussi par une série de différents entre la monarchie pétrolière et l'Algérie. Récemment, al-Jazira aurait réclamé l'ouverture d'un bureau à Alger, refusée jusqu'ici avec constance par Alger.
«La "télé-révolution" décrit par le professeur Naoufel Brahimi El Mili, n'est pas la bienvenue dans un pays qui a dépensé sans compter pour acheter la paix sociale et se préserver des soulèvements arabes», poursuit la correspondante du Monde.