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Expulsion des réfugiés tunisiens du 36 rue Botzaris

Parmi les 400 immigrés tunisiens arrivés à Paris que SlateAfrique avait rencontrés à la Porte de la Villette, certains avaient fini par se réfugier dans l’ancien siège du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) au 36 rue de Botzaris, dans le 19e arrondissement.

Tandis qu'un premier groupe de CRS tentait, le 16 juin, d'expulser des réfugiés tunisiens du bâtiment, ce mercredi 22 juin, une nouvelle vague de CRS a encerclé l’adresse mais aussi le parc des Buttes Chaumont, en vue d’expulser le restant des squatteurs (dont certains sont mineurs) qui ont investi depuis plus d’un mois l’immeuble symbolique du régime déchu de Ben Ali.

Selon le journaliste, ancien président et porte-parole du parti pirate français Paul da Silva —l'un des internautes les plus actifs sur les événements autour de l'ancien quartier général du RCD—, qui est également à l'origine du blog #Botzaris36, la poignée de Tunisiens auraient été emmenés par les forces de l’ordre et seraient actuellement placés en garde à vue et on refuserait de les laisser entrer en contact avec leur avocate.

Pour dénoncer les mesures prises contre ces réfugiés, le site de microblogging Twitter est devenu naturellement la tribune via laquelle plusieurs internautes, blogueurs et journalistes ont interpellé l’opinion sur ce qui est progressivement devenu l'affaire «Botzaris36».

D'après le quotidien français Libération, en l'espace de quelques heures, le hashtag #Botzaris36, sur lequel circulent en temps réel les informations sur le sujet, est devenu le deuxième hashtag le plus consulté sur Twitter après celui de la fête de la musique.

Alors que les unes des quotidiens ont fait l’impasse sur la question, la mairie du 19e a décidé de prendre des mesures et de vider tous les étages de l'ancien siège du RCD. Après une longue période de silence, le maire, Roger Madec, a publié le 21 juin sur son blog un communiqué sur la question du 36 rue Botzaris dans lequel il préconise «une solution de long terme pour ces migrants qui ne trouvent nul appui auprès de leur ambassade», en reconnaissant qu’une «étude des situations individuelles s’imposent».

Outre la question humanitaire et l'absence de mesures prises pour accueillir décemment ces réfugiés politiques, l’enjeu du 36 rue Botzaris réside également dans les archives du RCD, l’ancien parti de Ben Ali, à ce jour démantelé. Sous couvert de la question de ces immigrés, les autorités tunisiennes semblent vouloir récupérer au plus vite certains papiers avant que la justice française ne s’en empare. Un tiers de ces documents d’archives avaient été déplacés dans la nuit du 15 au 16 juin.

Autre fait troublant, le ministre (provisoire) tunisien de l’Intérieur, Habib Essid, était justement en déplacement à Paris ce 15 juin 2011, la veille de l’expulsion des réfugiés. Une coïncidence d'autant plus suprenante que le déplacement du ministre n'avait rien d'officiel et qu'il n'apparaissait dans aucun agenda.

Enfin, l'Ambassade tunisienne en France a fait savoir que l'évacuation des réfugiés faisait suite à des actes de «vandalisme» et de «dégradation», notant que l'immeuble bénéficiait de l'immunité diplomatique depuis le 15 juin, et que les autorités tunisiennes collaboraient avec la France concernant la question humanitaire pour multiplier «les contacts avec le tissu associatif et les acteurs de la Société civile pour trouver des solutions durables et dignes.»  

Lu sur #Botzaris36, Libération