mis à jour le 11/04/2011 à 11:41

Le casse-tête d'Alassane Ouattara

Le mandat déjà ébréché d’Alassane Ouattara s’annonce comme un chapelet de problèmes inextricables. Petit abécédaire pour un ancien Premier ministre qui apprend le b.a.-ba du métier présidentiel. Casse-tête de A à Z… Par Damien Glez

A comme «ADO»: Ouattara devra imposer sa personnalité, lui qui semble, quatre longs mois après les suffrages, «placé» au pouvoir par les diplomates et les militaires. A comme Affirmer son Autorité…

B comme «bété» ou «baoulé»: comment noyer les braises de rancunes politiciennes que l’on tenta de convertir en rancœurs ethniques?

C comme «café-cacao»: il faudra rassurer les clients découragés qui se sont détournés de la filière ivoirienne pour lorgner, notamment, vers le Ghana; transformer le C de corruption en C de confiance. La relance de la locomotive économique ouest-africaine sera d’abord à ce prix.

D comme «Duékoué»: ADO aura-t-il son «charnier de Yopougon»? Car D est aussi l’initiale de dozo...

E comme «équité»: ne jamais apporter de l’eau au moulin de ceux qui prédisent une réorientation revancharde des vexations nord-sud.

F comme «FPI»: faut-il cautériser la plaie ivoirienne en dissolvant le Front populaire ivoirien comme fut dissous le RCD de Ben Ali? Il faudra d’abord définir le sort réservé à son fondateur. G comme…

G comme «Gbagbo»: que faire du «boulanger»? Il est allé trop loin pour siéger confortablement dans un conseil d’anciens chefs d’Etat. Mais attention à ne pas en faire un martyr.

H comme «humanitaire»: si la tragédie sanitaire semble avoir été évitée de justesse, la crise sociale pointe son nez.

I comme «institution»: quel Conseil constitutionnel après une telle tragi-comédie électorale?

J comme «justice»: savant dosage à inventer entre pardon et répression. Il s’agit de justice internationale qui échappe en grande partie à Alassane Ouattara, mais aussi de gestion de dossiers poussiéreux au niveau national. K comme…

K comme «Kieffer»: la disparition, en 2004, du journaliste franco-canadien Guy-André Kieffer –affaire dans laquelle furent cités des noms proches de l’ancienne première dame– est-elle aujourd’hui une affaire classée?

L comme «Luanda»: il faudra renouer avec le «frère» angolais de Laurent Gbagbo…

M comme «militaires». FANCI, MPCI, FRCI… beaucoup de sigles en «CI» à fusionner en une armée indivisible et réellement républicaine. Défi incontournable pour bannir définitivement les bruits de bottes qui résonnèrent, pour la première fois, en 1999.

N comme «nouchi» (phrasé de la rue ivoirienne): le brillant représentant de l’élite polyglotte trouvera-t-il les mots pour parler à la Côte d’Ivoire «d’en bas»?

O comme Onuci: comment ADO pourra-t-il s’émanciper de la communauté internationale sans oublier ce qu’il lui doit?

P comme «primature pour PDCI»: avant le second tour de la présidentielle, le parti d’Henri Konan Bédié s’était vu promettre le poste de Premier ministre. Dans un souci de réconciliation, ADO doit partager largement le pouvoir, mais sans frustrer ses alliés électoraux du Rassemblement Houphouétiste pour la démocratie et la paix (RHDP).

Q comme «quincaillerie»: comment désarmer un pays où les armes légères circulent massivement depuis dix ans?

R comme «RTI» ou Radiotélévision ivoirienne. Alors que «blaguer tuer» est devenu plus qu’une image linguistique, il faudra panser les plaies de la «guerre des bouches», en réorganisant notamment les médias publics. Gare à la chasse aux sorcières.

S comme «Soro Guillaume»: quand le Premier ministre tout-terrain et «tout-président» prendra-t-il son indépendance pour cultiver ses propres ambitions présidentielles?

T comme «technocrate»: s’il n’a pas voulu apparaître comme un chef de guerre, le gestionnaire Ouattara devra faire ses classes pour prendre des allures d’homme d’Etat à part entière; avec ce que cela comporte de culture politicienne.

U comme «université»: des années de pollution mentale doivent être purgées par l’éducation. Mais attention, en Côte d’Ivoire plus qu’ailleurs, c’est sur les campus que fleurissent les contestations. Ils accueillirent le professeur Gbagbo et enfantèrent Guillaume Soro et Blé Goudé…

V comme «voisinage»: en avant pour une nécessaire –et a priori tranquille– opération de normalisation avec le Liberia, la Guinée, le Mali, le Ghana et… le Burkina Faso. W comme...

W comme «Woghodogo» (orthographe originelle de Ouagadougou), la ville qu’on déclara base arrière du clan Ouattara, mais aussi la ville où furent signés des accords de paix rapidement bafoués. ADO gérera-t-il son «deuxième bureau» dans la discrétion?

X comme «xénophobie»: sa plus célèbre victime pourra-t-elle en finir avec cette «bête immonde» instrumentalisée depuis une quinzaine d’années?

Y comme «Yamoussoukro»: que deviendront les grands projets pour la ville qui est tout à la fois la capitale politique, le pivot géographique entre le nord et le sud, la zone de naissance de Ouattara (né à Dimbokro) et le village du cultissime Félix Houphouët-Boigny?

Z comme «zèle»: il y a des amis qui encombrent plus que certains ennemis. Comment Alassane Ouattara traitera-t-il des soutiens peu fréquentables comme les membres du commando invisible?

Damien Glez