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A gauche, Abou Zeid. Image extraite d'une vidéo diffusée en 2010, après l'enlèvement de Français à Arlit. © AFP
A gauche, Abou Zeid. Image extraite d'une vidéo diffusée en 2010, après l'enlèvement de Français à Arlit. © AFP

La mort d'Abou Zeid n'affaiblit pas la menace terroriste

Aqmi a confirmé ce dimanche 16 juin la mort de l'un de ses chefs Abou Zeid.

L'émir algérien Abdel Hamid Abou Zeid, l'un des principaux chefs de fil d'Aqmi (al-Qaida au Maghreb islamique), a été tué lors des opérations menées par les armées françaises et tchadienne dans le massif montagneux de Tigharghar, au nord du Mali. Sa mort a été confirmée par Aqmi dans les colonnes du site mauritanien ANI. En février dernier, lors de la première annonce de sa mort par la France, Slate Afrique souhaitait revenir sur les rares informations qui circulent sur ce chef historique d'al-Qaida au Maghreb islamique. 

1 - L'homme fort d’Aqmi

Abdel Hamid Abou Zeid, de son vrai nom Mohamed Ghdiri, est un Algérien d'une quarantaine d'années. Né en 1965 dans la région de Debdab, dans la province algérienne d'Illizi, proche de la frontière libyenne, Abou Zeïd commande l'une des principales katibas d'al-Qaida au Maghreb islamique.

Sa katiba, comme celle de son concurrent direct dans la région, Mokhtar BelMokhtar, fait partie des katibas historiques d'Aqmi. Ensuite viennent les émirats régionaux et parmi eux, les katibas —milices— du Sahel: Mauritanie, Mali, Niger.

«Si la mort d'Abou Zeid est confirmée, Aqmi perdrait sa tête pensante et l'un de ses élements les plus déterminés», analyse l’anthropologue André Bourgeot, directeur de recherche émérite au CNRS, spécialiste de l’espace saharo-sahélien.

2 - Son passé algérien 

Avant de devenir un chef d'Aqmi, Abou Zeid avait combattu dans les rangs du Groupe islamique armé (GIA) puis du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) durant la guerre civile algérienne dans les années 1990.

Abou Zeid, comme de nombreux cadres d'al-Qaida au Maghreb islamique est l'archétype de l'islamiste algérien converti à l'islamisme djihadiste au lendemain de la décennie noire. Selon André Bourgeot, Abou Zeid demeurait toutefois un «marginal» au sein de la branche maghreb d'al-Qaida.

3 - Un ancien contrebandier

Abou Zeid est connu pour avoir été un grand contrebandier dans la région du Sahel. Un trafiquant d'armes, de drogues et d'hommes.

Depuis 2003 et le premier enlèvement d'occidentaux dans le Sahel, Abou Zeid est soupçonné de vivre du «business» des enlèvements dans le Sahel.

En 2012, le journaliste Serge Daniel confiait à SlateAfrique que les rançons pouvaient atteindre 100 millions d'euros.  

«Abou Zeid est rapidement devenu le maître d'oeuvre des prises d'otages et des enlèvements d'occidendaux dans la bande sahélienne. Lui et sa katiba détenaient des sommes importantes. Ce qui est une force supplémentaire pour s'imposer comme leader d'AQMI», précise André Bourgeot.

4 - Des méthodes brutales

On le dit «cynique», «froid», «brutal», «déterminé», «sanguinaire», Abou Zeid fait partie des têtes recherchées par les services de renseignements américains, français et algériens depuis plusieurs années.

En 2006, un mandat de recherche d'Interpol avait été émis contre lui. On le soupçonne d'être responsable de la mort de l'otage britannique Edwin Dyer en juin 2009. C’est dans sa katiba que l’otage Michel Germaneau, l’humanitaire français, aurait également été tué en 2010. En janvier 2012, la justice algérienne l'a condamné à la prison à perpétuité par contumace.

5 - L'autre Ben Laden?

La mort d'Abou Zeid n'était pas encore confirmée que certains la comparait déjà à la capture d'Oussama Ben Laden le 2 mai 2011.

Une comparaison «osée», selon André Bourgeot.  

«Abou Zeid était certes une personne influente au sein d'Aqmi, mais ces derniers mois, son concurrent Mokhtar Belmokhtar avait gagné des points».

Mokhtar Belmokhtar, surnommé Malboro à cause de son rôle dans le narcotrafic dans la région, aurait piloté la prise d'otages du site gazier de Tenguentourine, en Algérie. Commanditaire de l'attaque, ce chef de la brigade djihadiste «les Signataires par le sang» basé à Gao au Mali, était ressorti renforcé de l'attaque terroriste. 

La mort de l'émir Abou Zeid pourrait-elle affaiblir la branche magreb d'Al-Qaida? Pas forcément. La mort d'Oussama Ben Laden a-t-elle affaibli la menace terroriste dans le monde?

Pour André Bourgeot, la mort d'Abou Zeid va surtout confirmer l'essaimage de la nébuleuse djihadiste en Afrique.

Nadéra Bouazza

 

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Nadéra Bouazza

Nadéra Bouazza. Journaliste à Slate Afrique

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