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Des soldats maliens à Gao, 8 février 2013. © PASCAL GUYOT / AFP
Des soldats maliens à Gao, 8 février 2013. © PASCAL GUYOT / AFP

Ces mauvais esprits qui veulent saper le moral de l'armée malienne

L'armée malienne doit rester concentrée sur son principal objectif: retrouver l'intégrité territoriale du pays. Mais elle doit aussi être vigilante quant aux exactions dont certains l'accusent.

Depuis Clausewitz, le premier grand penseur de la guerre en Europe, nous savons que la guerre réelle ne se passe jamais comme la guerre modèle. Que la guerre, c’est ce qui dévie toujours, au cours des opérations, par rapport à ce qu’on avait projeté.

Cela ne se passe donc jamais comme on l’avait prévu et planifié d’avance. Sur ce point, le monde entier a tout à apprendre de la Chine ancienne avec ses «Arts de la guerre» (Sun Zi, Sun Bin).

S’agissant du Mali, soulignons-le fortement, ce pays mène une guerre juste, c’est-à-dire une guerre de légitime défense contre les envahisseurs djihadistes qui ont agressé et violé l’intégrité de l’Etat malien.

Et, il n'appartient surtout pas ici aux djihadistes de définir pour l’armée malienne, les normes et les règles de la guerre actuelle.

Mais il se trouve que, depuis quelques jours, de graves accusations sont portées contre l’armée malienne dans le déroulement de cette guerre.

Elle se voit accusée de procéder à des enlèvements et liquidations physiques arbitraires au sein des communautés touareg et arabe du Nord.

Bref, l’armée malienne, en libérant les grandes villes du Nord, se livrerait au pillage et commettrait des exactions dans des proportions gigantesques.

Rappelons qu’il ne s’agit pas de défendre une bonne cause pour avoir toujours le droit et le bien avec soi.

Ethique et responsabilité

Dans l’histoire des conflits et des guerres, les armées qui ont su préserver une certaine éthique en restant irréprochables dans la conduite des opérations, constituent des exceptions.

Il ne s’agit pas, comprenons-nous bien, d’innocenter, voire de blanchir totalement l’armée malienne face à d’aussi graves mises en cause.

Si les faits mentionnés s’avèrent réels, fondés, la hiérarchie militaire doit prendre toutes les mesures et dispositions appropriées qu’exige une telle situation, conformément au code d’honneur qui régit la conception et le fonctionnement opérationnel de l’armée malienne.

Combattre les djihadistes et restaurer l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Etat malien ne suffisent pas à justifier de telles exactions, surtout si elles s’avèrent réelles.

Mais, sans aller jusqu’à évoquer une conspiration informationnelle et médiatique montée de toutes pièces par certains milieux viscéralement anti-maliens, cette compassion soudaine pour les communautés touarègue et arabe nous paraît suspecte et inauthentique.

Ne cherche-t-on pas, avec de telles révélations spectaculaires, à culpabiliser, saper le moral de cette armée qui est sur le point d’atteindre tous ses buts de guerre?

D’ailleurs, en entendant certaines voix d’organismes dits de défense des droits de l’Homme, on se demande bien, si elles n’expriment pas, au fond, une solidarité indirecte avec les djihadistes.

Où étaient toutes ces bonnes âmes à la charité sélective quand les djihadistes flagellaient, coupaient les bras de pauvres innocents et violaient à grande échelle?

Honneur et fidélité

Ce n’est un secret pour personne, et tout le monde le sait au Mali, ces criminels moyenâgeux ont noué, durant de longues années, de vastes alliances matrimoniales au sein des communautés arabe et touareg du Nord-Mali.

Et qu’au sein de ces communautés, certains individus qui avaient misé sur la victoire des djihadistes, ont bel et bien collaboré à leur folie criminelle.

En France, à la libération, des problèmes similaires se sont posés à l’égard des enfants perdus de Pétain, qui avaient, eux aussi, misé sur la victoire de l’Allemagne nazie, contre la Résistance.

Certes, les organisations de la société civile sont bien dans leur rôle d’alerte des opinions publiques sur les violations des lois de la guerre.

Mais attention, dans le combat contre le djihadisme, un soldat, malheureusement, ne peut se comporter naïvement comme un militant d’une ONG de défense des droits de l’Homme.

Evidemment, l’armée malienne ne doit pas s’attaquer à des non combattants. Elle doit montrer sa bonne foi et sa bonne volonté, en faisant toute la lumière sur ces supposées exactions.

Ce n’est qu’ainsi qu’elle pourra se préserver d’un délitement moral et éthique. Demain, après la guerre, il ne faudrait pas que de telles accusations lui reviennent, violemment, à la figure.

L'armée malienne, en menant une guerre juste, doit également songer à la reconstruction politique, sociale, culturelle et morale du pays, une fois qu’il sera totalement libéré et libre.

Abdoulaye BARRO (Le Pays)

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