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Hollande en terrain conquis en Algérie
Pour la presse algérienne, la visite du président français en Algérie confirme le besoin que les deux pays ont l'un de l'autre.
Seuls 26% des Français ont une bonne image de l’Algérie. Un pourcentage faible comparé aux 71% qui déclarent avoir une bonne image du voisin marocain. Ce n’est pas une surprise.
L’Algérie et la France sont liées par l’histoire depuis près de deux siècles. Une histoire où s’ est entremêlée amour et violence. Un passé tumultueux qui habite le présent et bien évidemment la visite officielle du président français, François Hollande, les 19 et 20 décembre.
Au delà de cet héritage historique parfois pesant, l'Algérie, contrairement au Maroc, n'est pas une destination de prédilection pour les touristes français. Les plages d'Essaouira les font plus rêver que celles de Ghazaouet (une commune de la wilaya de Tlemcen, dans le nord-ouest).
Selon un sondage de l’institut IFOP pour le site Atlantico, l’Algérie a une mauvaise image, y compris chez les socialistes. En cause, les failles de la gauche française pendant la guerre d'Algérie, la chute de la IVe République embourbée dans ce qu’on appelait à l’époque «les évènements d’Algérie».
Besoin de rien, envie de toi!
Les Français ne verraient pas l’Algérie d’un bon œil… Et pourtant «la France a besoin de l’Algérie», affirme Le Quotidien d'Oran.
Finie l’époque de la puissance coloniale et de l’exclusivité du marché algérien. Paris ne peut plus se passer d’Alger et, inversement, Alger ne peut plus se passer de Paris. Voilà qui est dit.
«La France officielle doit donc reconnaître qu'elle a besoin de l'Algérie. C'est d'autant plus nécessaire que quelque chose se passe entre les deux pays. Des hommes et des femmes vont et viennent. Ils ont les deux nationalités et construisent leurs vies à cheval entre les deux pays», souligne encore Le Quotidien d'Oran.
«La France a besoin de l'Algérie parce que près de 3 milliards d'euros prennent la direction de l'Hexagone chaque année.»
Les Algériens ont également besoin d’une bonne relation avec la France, son premier partenaire économique. Un autre sondage —plus optimiste— s’en fait l’écho:
«57% des Algériens souhaitent un relation exemplaire avec la France, l’ancienne puissance coloniale», selon un sondage réalisé par l’institut Okba pour le compte du quotidien Liberté.
Et la repentance, c'est pour maintenant?
Un souhait qui tranche avec les polémiques et les débats que suscite le voyage du président François Hollande à Alger. Sa visite sera-t-elle l’occasion d’un débat d’idées, d’une confrontation franche entre les partisans de la repentance et ses détracteurs?
Plusieurs personnalités du gouvernement algérien s’accordent, depuis quelques jours, pour dire haut et fort que ce n’est ni le lieu ni le moment.
«Nous espérons bâtir avec la France une relation résolument tournée vers l’avenir», a déclaré le Premier ministre algérien, Abdelmalek Sellal, à la télévision française.
«Bouteflika fait taire l’opposition anti-française et les partisans de la repentance», titre le site d’information Tout sur l’Algérie.
François Hollande est donc depuis ce 19 décembre à Alger en terrain conquis. Enfin presque.
«L’Organisation nationale des enfants de chouhada (martyr, Ndlr) (ONEC) réclame une reconnaissance officielle de la part de la France des crimes commis durant la colonisation», relaie le quotidien El Watan.
Une histoire à plusieurs voix
Si Alger veut apparaître comme un pays politiquement favorable à l'apaisement des relations franco-algériennes , il n’en demeure pas moins profondément meurtri.
Vives, les mémoires de la période coloniale soulèvent encore des interrogations et des revendications de chaque côté de la Méditerranée.
Souvent virulentes, parfois blessantes, les prises de positions de certaines personnalités françaises ont à plusieurs reprises froissé les Algériens. Le bras d’honneur du sénateur et ex-ministre de la Défense Gérard Longuet avait surpris, même si l’on connaît son passé tonitruant.
1962-2012: la «Nostalgérie» semble toujours renaître de ses cendres.
Sur ce sujet, l’éditorialiste du Quotidien d’Oran écrit ne pas comprendre ce déni des travers du colonialisme:
«Que répondre alors aux promoteurs de la loi négationniste du 23 février 2005, à tous ceux qui assènent, sans vergogne, que la colonisation a joué un «rôle positif» en apportant aux colonisés le progrès et les «bienfaits» de la civilisation?»
Il cite le cas de l’école qui illustre, à lui seul, le fossé entre l’entreprise de civilisation défendue par Jules Ferry en 1885 et le système colonial.
«Oui naturellement, on a construit des écoles (…) Mais il suffit de rappeler la proportion des enfants européens et celle des enfants indigènes qui fréquentaient ces écoles pour s'apercevoir que les portes de l'instruction républicaine, largement ouvertes aux premiers, étaient quasiment fermées aux seconds (à peine 10% d'enfants algériens scolarisés en 1954). Résultat de cette politique: le taux d'analphabétisme en Français est, au début des années 1950, estimé à 94% chez les hommes et 98% chez les femmes.»
50 ans après l’indépendance algérienne, François Hollande, décide de faire sa première halte maghrébine à Alger puis à Tlemcen, autrement appelée la «Perle du Maghreb». Un symbole fort.
«Tout le monde en parle», surrenchérit le site Dernières nouvelles d'Algérie qui consacre un direct à la visite du président français. Soleil radieux à Alger ce mercredi 19 décembre. Hollande serait-il choyé par les dieux, comme le laisse entendre un journaliste algérien sur Twitter?
Nadéra Bouazza
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