
Journaliste et écrivain algérien, chroniqueur du quotidien El Watan. Il a publié de nombreux ouvrages, notamment Nationale 1.
Rue Didouche, principale avenue du centre-ville d'Alger. Au milieu des cafés et restaurants chics, des bars, des magasins de sous-vêtements féminins et d'enseignes internationales comme Adidas, Zara, Mango ou Jenifer, une boutique a trouvé sa place: Islamic Wear Fashion. L'enseigne est en anglais, signe d'une démarcation totale avec la langue française, jugée complètement out en terme de branchitude.
L'islam? Combien de divisions? aurait demandé Staline, le plus radical de la branche laïque mondiale. Un milliard et demi au dernier recensement, sans y ajouter les récentes conversions ou y soustraire les derniers morts de l'actualité religieuse. Et en France? 4 millions selon les estimations sérieuses, 8 millions selon l'extrême droite. Soit de 8 à 11% de la population, cet écart donnant d'emblée l'orientation du problème.
Il aura fallu plus d'un mois après la chute de Moubarak. Mardi 15 mars 2011, les autorités égyptiennes ont annoncé la dissolution de la Sécurité d'Etat, suivant l'exigence tunisienne. Ce n'est pourtant pas réellement un nouveau geste d'ouverture ou de réforme.
Il y a deux armées libyennes. La première est l'armée classique, équipée de chars de la Seconde Guerre mondiale et de vieilles armes, avec des soldats formés rapidement, un entraînement en accéléré pendant 45 jours.
6.000 ou 10.000 morts selon les sources, le bilan n'est pas non plus très bon pour les vivants. 200.000 personnes ont déjà quitté la Libye et l'Organisation internationale pour les migrations en prévoit 400.000 pour les jours à venir, selon une prospective qui inclut 600.000 Libyens en besoin futur d'assistance humanitaire.Le scénario libyen, écrit un peu trop vite, n'a plus rien à voir avec celui de ses voisins immédiats, l'Egypte et la Tunisie, là où tout a commencé.
Alger. En ce printemps précoce, les premiers bourgeons apparaissent sur les branches des arbres et les températures se sont considérablement radoucies. Rue Didouche Mourad, en plein centre, un scooter passe, avec un jeune couple dessus sans casque et cheveux au vent. Habituellement, les forces de l'ordre —dont 10.000 policiers sont déployés dans la capitale— sont suspicieux et souvent hostile envers cette jeunesse considérée comme oisive et hédoniste. Là, rien; le scooter passe et le couple se permet même de narguer les deux policiers en faction en leur lançant une phrase.
Auguste geste et concession offerte par le président Abdelaziz Bouteflika —qualifié de roi par ses opposants: la levée de l'état d'urgence 19 ans après son instauration. Et après? Dans l'expectative, les Algériens se placent sur la mince frontière entre la protestation permanente et la révolte généralisée.Au Maroc, où il n'y a pas de lois d'exception, le royaume se pose dans le même schéma; on proteste, on manifeste, mais on reste relativement calme.
A l'occasion de la diffusion ce soir à 20h40 sur ARTE du documentaire Berlin1885 : la ruée sur l'Afrique, Slate Afrique s'associe à la chaîne franco-allemande et publie un dossier sur les frontières héritées de la conférence de Berlin. Trois écrivains et journalistes du continent analysent leur impact sur la vie des Africains.***
C'est sous la pluie, phénomène assez rare en Libye, pays plutôt aride, que Kadhafi, le «Guide de la Révolution», est apparu à la télévision d'Etat.Armé de son seul parapluie, il est passé brièvement pour démentir l'information faisant état de sa fuite vers le Vénézuela, rapportée par la chaîne saoudienne Al Arabiya et William Hague, ministre britannique des Affaires étrangères.
Tout comme l'opinion arabe, les autocrates arabes se suivent mais ne se ressemblent pas. Il y a ceux qui ont tenté —dans la violence— de négocier jusqu'au bout, comme Ben Ali et Moubarak, et ceux qui ne négocient pas mais gardent leur arme dans la ceinture, comme Bouteflika.Mais il existe un troisième profil de serial dictator, celui qui ne négocie rien et tire dans la foule, à vue, tel Kadhafi, qui vient de passer en quelques jours du statut de clown international à celui de boucher national.
(Mise à jour : Comme promis le 3 février dernier par le président Abdelaziz Bouteflika, le décret levant l'état d'urgence en Algérie a été publié au Journal officiel le 24 février 2010). ***
La Libye n'est pas épargnée par le vent de contestation arabe. Mouammar Kadhafi, 68 ans, fêtera cette année ses 42 ans de pouvoir, au moment où des groupes d'opposition —essentiellement actifs sur Internet— annoncent une manifestation hostile au régime pour le 17 février. Le «Guide» libyen, connu pour ses positions déroutantes, aurait déjà annoncé qu'il était prêt à y participer.
Habituellement très discret, Mourad Medelci, le ministre des Affaires étrangères algérien, est sorti de son bureau pour tenter de réagir à la pression internationale accrue depuis le rassemblement de l'opposition du 12 février. Un mouvement qui a été réprimé par la police.
Si partout dans le monde, l'écart entre les chiffres des manifestants et de la police est toujours important, l'Algérie, habituée à jouer les équilibristes, a fait le grand écart. 250 manifestants selon le ministère de l'Intérieur, 3.000 selon les organisateurs. Tout le décalage entre le régime et l'opposition tient dans ses chiffres.
C'est vendredi, jour de repos hebdomadaire en Algérie. Les stations d'essence sont prises d'assaut et tout le monde fait le plein de provisions en prévision de la bataille d'Alger du 12, le lendemain.A 17 heures, la nouvelle tombe, Moubarak, après une résistance acharnée pour rester digne, démissionne de guerre lasse.
Sous ses allures indolentes de ville méditerranéenne qui vaque à ses occupations, Alger, sous haute sécurité, bouillonne. Plus d'une centaine d'anciens militaires se sont rassemblés il y a quelques jours devant le ministère de la Défense nationale pour exiger une revalorisation de leurs traitements.
En Egypte, pays qui a depuis longtemps perdu le leadership révolutionnaire, tous les autocrates du monde arabe sont réunis: il s'agit de contrer la contagion tunisienne.
Touchant une vingtaine de villes et toutes les régions Nord, des émeutes ont éclaté simultanément dans la majorité de l'Algérie. Selon le journal arabophone El Khabar, un jeune homme de 18 ans serait mort, tué par balle lors d'un affrontement avec la police à Ain Lahdjel dans la région de M'sila.