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L'Israélien, l'Arabe, l'islamiste:les trois meurtriers du Palestinien
La Palestine vaut autant que le Tibet.
Que doit faire un islamiste au pouvoir face à la «cause palestinienne»? Réponse difficile: autrefois, quand l'islamiste était dans l'opposition, la Palestine était une guerre sainte facile, mais aujourd'hui l'islamiste est aux commandes: la Palestine est surtout un problème impossible.
Comment faire pour à la fois aider les «frères» de Gaza, ne pas se renier et se déjuger selon les préceptes de sa foi, mais garder intactes ses relations internationales, ne pas dilapider la fréquentabilité déjà mise à mal par les salafistes et obtenir des aides de cet Occident que la propagande religieuse présente comme le grand diable, le croisé, l'ennemi?
Gaza: un test pour les nouveaux pouvoirs islamistes
Comment à la fois être religieux et pragmatique?
Comment libérer la Palestine si soi-même on n'est pas libre dans son pays, assiégé, inexpérimenté et sans visibilité?
Prompts, les gouvernements de Tunisie et d'Egypte ont fait le geste d'envoyer
leurs ministres à Gaza. Un bon point de marketing mais
cela ne va stopper la guerre. Juste confirmer que la misère des Palestiniens va
encore servir pour des légitimations externes.
On sait tous de quoi souffre le Palestinien: d'être trop arabisé et trop islamisé. D'une tragique cause de décolonisation et de colonisation, on a tenté d'en faire une cause «panarabe» et une cause de messianisme islamique.
Cela convient à la droite israélienne et ses ultra religieux: les
extrémistes aiment les extrémistes et une Palestine religieuse ou «raciste»
épouse mieux les causes extrêmes en Israël.
Le drame palestinien rejoindra les préoccupations de l'humanité le jour où il
se débarrassera des «Arabes» et des islamistes. Le mort palestinien sera un
homme tué lorsqu'il ne sera plus un barbu mort ou un Arabe bombardé.
L'arabité et la religion exilent le Palestinien dans les marges des préoccupations internationales, le vident, le déshumanisent et en font un cas local.
La Palestine vaut autant que le Tibet
La prise en charge islamiste par les gouvernements de Tunis ou du Caire est peut-être l'expression d'une «fraternité» idéologique et une position meilleure que le mur de la honte du régime de Moubarak contre les Ghazaouis, mais cela ne servira pas l'avenir.
Cet avenir déjà piégé justement. Cela servira toute juste
l'image des gouvernements islamistes qui s'acquittent de l'inconfort de leur
position par des jets de poignées de sable.
Question vieille d'un siècle ou de mille ans: que faire pour la Palestine
justement? Ce que l'on doit aussi faire pour le Tibet colonisé: dire à
l'humanité que c'est la cause de tous et pas celle des «Arabes» et des
religieux.
La Palestine vaut autant que le Tibet ou les autres terres et âmes
volées.
C'est une première victoire difficile que de prouver que le mort palestinien
est un être humain, pas un clip télévisé, ni un «Arabe», ni un islamiste. Une histoire de peuple, pas de croyances.
L'enjeu d'une liberté pas d'une croisade. Il faut donc libérer la Palestine: des Israéliens qui veulent la voler mais aussi des «Arabes» et des islamistes qui veulent la vendre et l'acheter et lui monter sur le dos et prendre la parole à sa place.
Kamel Daoud (Quotidien d'Oran)
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