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L'Afrique attend Obama au tournant
Barack Obama rempile pour quatre ans. En Afrique, la liesse est de rigueur même si l'Obamania s'est estompée depuis 2008. Tour d'horizon de la presse africaine sur la réélection d'Obama.
Four more years! Barack Obama a été réélu pour les quatre prochaines années. Les Etats-Unis ont tranché et ont renouvelé un second mandat au président sortant, dans ce pays où il est rare de voir un président ne pas être réélu pour un second mandat.
«Four more years ! Four more years !» (Quatre ans de plus!) se sont époumonés à l’unisson les supporters d'Obama toute la nuit, ayant une victoire plus nette que prévue.
Si aux Etats-Unis on scande le slogan et fête dignement la victoire d’Obama, en Afrique la presse n’est pas en reste.
Le Kenya exulte
Et où l’enivrement se fait le plus sentir, c’est au Kenya, dans le village de Kogelo où l’une de ses grands-mères habite.
«La télévision a été branchée sur la chaîne américaine CNN toute la nuit qui a annoncé que Barack Obama était en tête. A ce moment-là, les gens ont hurlé de joie. Autour de l’écran télé, un groupe de musiciens, qui avait tenu des heures hier la foule pour danser et chanter, a recommencé à jouer malgré les coupures d’électricité assez répétées. Coupures qui n’ont pas entamé l’enthousiasme général », rapporte une envoyée spéciale de RFI.
Et pour cause :
«Il y a eu tellement de changement ici. Vous pouvez voir les routes en train d’être bitumées, on apprécie cela. Beaucoup de choses, comme par exemple, ce bâtiment avant n’existait pas. Et tout cela arrive à cause d’Obama, enfin à cause du nom Obama », explique l’un des villageois de Kogelo.
L’ivresse de cette nuit électorale a aussi été contagieuse en Afrique du Sud. Winnie Madikizela-Mandela, ex-femme de Nelson Mandela et figure de proue de l’ANC (African National Congress), n’a pas caché son soulagement à l’annonce des résultats, rapporte le site sud-africain City Press. Elle a célébré la victoire à l’ambassade américaine de Pretoria où le vin et le café ont coulé à flots, jusqu'au petit matin.
«L’Afrique du Sud a beaucoup à apprendre de Barack Obama», a confié Winnie Madikizela à City Press. «Et surtout comment les Américains font vivre la démocratie», a-t-elle ajouté.
La Twitosphère s'emballe
Le grand gagnant de cette élection, mis à part Barack Obama, est le réseau social Twitter. 31 millions de tweets ont été échangés pendant cette soirée électorale, selon le décompte de blog.twitter.com.
Le message de victoire de Barack Obama a été partagé près de 490.000 fois. Un record dans l'histoire de Twittosphère.
Le Premier ministre ougandais a aussitôt répondu au tweet du président réélu:
«@ Barack Obama Félicitations de la part de l’Ouganda. Une victoire tellement méritée!», rapporte le site ougandais New Vision.
Sam Kutesa, le ministre des Affaires étrangères ougandaises est optimiste et espère que les relations americano-ougandaises vont continuer à se renforcer, a-t-il indiqué à New Vision tôt dans la matinée du 7 novembre.
Au Sénégal, la ferveur a également gagné la capitale où les Dakarois se sont prêtés au jeu d’une élection américaine fictive où le candidat démocrate a été largement réélu avec un score digne d'un dictateur africain: 94% des suffrages.
«Obama est dans le cœur des Sénégalais», a déclaré Lewis Lukens, ambassadeur des Etats-Unis à Dakar, à l’Agence de presse sénégalaise.
Obama n'est «pas un frère africain»
Pour l’Observateur burkinabé, l’euphorie de la victoire du candidat démocrate n’a jamais gagné le coeur des Burkinabè. Ils avaient compris très tôt que Barack Obama était le président des Etats-Unis, et non «frère noir» comme voulaient le croire beaucoup d’Africains. Pour l’éditorialiste Ousseyni Ilboudo, l’attitude de Barack Obama vis-à-vis du continent africain n’a rien d’étonnant. Et la raison est toute simple.
«Notre orgueil nègre ne fut pas flatté- on le serait à moins - mais penser que, le symbole mis à part, tous les problèmes du continent seraient résolus parce qu’un lointain cousin allait s’installer à la Maison-Blanche avait quelque chose de puéril, car il avait été élu par ses compatriotes pour régler leurs problèmes d’abord. De ce point de vue, on n’aura pas été déçu, puisqu’on n’en attendait rien», signe-t-il.
Barack Obama ne suscite plus le même engouement en Afrique. «Dès sa première élection en 2008 comme premier afro-américain à la tête des Etats-Unis, l’Afrique attendait voir le président Barack Obama se pencher utilement sur son sort. Quatre ans après, elle n’a été servie que par de belles paroles», écrit le Potentiel, plus influent titre congolais.
Pour son nouveau mandat, le continent africain attend plus d’engagement du président américain en faveur du continent.
«Cette Afrique des hommes forts et non des institutions fortes que le président Obama a dénoncée dans son discours d’Accra est toujours là, très active, semant la désolation dans un continent pourtant voué à un avenir prospère. Réélu pour quatre nouvelles années à la tête de la première puissance économique et militaire mondiale, l’Afrique attend du président américain plus d’actions que de paroles stériles», note le journal congolais.
Même si l’actuel locataire de la Maison Blanche a déçu une partie des Africains, l’Afrique ne voulait pas qu’il parte. Et ils ont tous salués sa réélection.
Car Barack Obama a du pain sur la planche. Et la gueule de bois est inévitable. L'hebdomadaire sud-africain le Mail&Guardian balaye d’un revers de main l’ambiance enivrante en s’interrogant sur l’évolution ou non de la politique que Barack Obama enclenchera pour ses quatre prochaines années:
«Obama est confronté à une grande crise économique et financière», rappelle le journal. «Il devra négocier âprement avec les législateurs de Washington avant le 31 décembre pour éviter une probable récession au premier trimestre de 2013.»
Maïmouna Barry et Lala Ndiaye
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