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Des coureurs de l'équipe africaine MTN, avec le coureur érythréen Natnael Berhane à gauche en tête. REUTERS/Enrique Calvo
Des coureurs de l'équipe africaine MTN, avec le coureur érythréen Natnael Berhane à gauche en tête. REUTERS/Enrique Calvo

Les secrets de la réussite des coureurs érythréens qui débarquent sur le Tour de France

Le cyclisme s’impose comme le sport roi en Erythrée. Bien loin devant le football. Un héritage de l'Italie, l’ex-puissance coloniale.

Deux coureurs érythréens seront au départ du Tour de France 2015, samedi 4 juillet à Utrecht au Pays-Bas. Une première pour ce petit pays de la Corne de l'Afrique, comme le souligne L'Equipe, mais aussi pour tout un continent. Daniel Teklehaimanot, meilleur grimpeur du dernier Dauphiné, et Merhawi Kudus, plus jeune coureur du peloton à 21 ans, vont être les premiers coureurs noirs africains à participer à l'épreuve. Tous deux sont membres de l'équipe sud-africaine MTN-Qhubeka, comme leur compatriote Natnael Berhane qui lui n'a pas été sélectionné pour le Tour de France. 

Une belle histoire pour le peuple érythréen, qui vit sous une terrible dictature complètement coupé du monde dont la jeunesse s'enfuit vers l'Europe dans des conditions tragiques

Un pays fou de cyclisme

Dans ce pays bordé par la mer Rouge, le cyclisme fait figure de sport roi. Loin devant le football. Un héritage laissé par l'Italie, l'ex-puissance coloniale (1885-1941). Le Tour d'Erythrée, premier événement sportif du pays, est un véritable élan de liesse populaire, où la foule hystérique encourage dans une folle passion «ses» coureurs.

Des dizaines de courses de villages sont ainsi organisées chaque semaine. «Il y a un cyclisme de base très développé. Les coureurs érythréens ont une excellente formation. C'est un héritage légué par les Italiens», confie Michel Thèze, fin connaisseur du cyclisme local et entraîneur au Centre mondiale du cyclisme qui forme les meilleurs athlètes des pays émergents dont la plupart des Erythréens passés professionnels. 

Daniel Teklehaimanot, 25 ans, leader du peloton érythréen est fêté comme une rock-star à chacun de ses retours au pays. Après sa victoire sur le Tour du Rwanda en 2011, un accueil incroyable lui avait été réservé à Asmara, la capitale, avec un défilé en limousine devant des milliers de personnes dans les rues, puis un dîner avec le président de la République Issayas Afewerki sous les ors de l'Asmara Palace Hotel. C'est lui qui grâce à ses succès aux championnats d'Afrique avait offert à l'équipe nationale une première participation aux Jeux olympiques, à Londres en 2012. 

  

Une nation de grimpeurs

L’émergence des coureurs érythréens, qui doit beaucoup au Centre mondial du cyclisme créé en 2003 par la Fédération internationale, est linéaire. L’Erythrée a remporté quatre des cinq derniers titres individuels aux championnats d’Afrique, dans l'épreuve de la course en ligne comme du contre-la-montre. Le pays est invaincu depuis 2010 dans le chrono par équipes et Daniel Teklehaimanot et Natnael Berhane, un autre grand talent, avaient déjà participé au Tour d’Espagne, une épreuve majeur du calendrier mondial. 

L'un des secret des coureurs érythréens est sans aucun doute leur terrain d'entraînement. Les hauts plateaux du Nord de l'Érythrée, dont l'altitude varie de 1.800m à 3.000m, sont un théâtre parfait pour travailler son coup de pédale en vue des épreuves de montagne. Daniel Teklehaimanot a affiché un vrai savoir-faire dans ce domaine, il y a quinze jours, lors de la course par-étapes du Dauphiné en décrochant le maillot à pois de meilleur grimpeur. Ce maillot distinctif était le premier décroché par un coureur noir africain sur une épreuve World Tour - le circuit mondial -, comme l'a rappelé un site de cyclisme sud-africain sur Twitter. 

«Leur niveau d'oxygène dans le sang est régulièrement surveillé et ils tiennent la comparaison avec les athlètes européens hautement entraînés», explique lui Radek Valenta, un coach australien qui a entraîné l'équipe nationale d'Erythrée pendant trois mois, en 2009. Selon Michel Thèze, Daniel Teklehaimanot a le potentiel pour devenir «un excellent grimpeur et un coureur de contre-la-montre, performant dans les course à étape avec un très bon niveau de récupération».

Pour franchir une nouvelle étape et rejoindre le gratin du cyclisme mondial, l'Erythrée doit maintenant développer ses infrastructures d'entraînement. Un pari délicat dans un pays classé 153e en termes de revenu par habitant, selon les chiffres du FMI. En 2011, le président Issayas Afewerki avait offert une prime de 100.000 nakfas (environ 5.200 euros) pour les coureurs ayant contribué au succès de Daniel Teklehaimanot sur le Tour du Rwanda.

Camille Belsoeur

Camille Belsoeur

Journaliste à Slate Afrique. 

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