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L’haltérophile algérien Walid Bidani a terminé à la 8e et dernière place de la compétition de la catégorie des 105 kg / Grigory
L’haltérophile algérien Walid Bidani a terminé à la 8e et dernière place de la compétition de la catégorie des 105 kg / Grigory

JO- Pourquoi l'Algérie reste à la traîne

Alors que certains pays gardent la main mise les Jeux olympiques, d'autres, comme l'Algérie, sont à la traîne. Et s'il s'agissait d'une question de volonté politique?

La lecture du tableau des médailles final des Jeux olympiques est toujours riche d’enseignements.

C’est encore le cas pour celui des JO de Londres qui viennent de s’achever. Il y a, d’abord, la première place des Etats-Unis, qui, avec 104 médailles dont 46 en or (110 médailles dont 36 en or en 2008 à Pékin), reprennent le leadership du sport mondial face à leur rival chinois (87 médailles dont 38 en or contre 100 médailles dont 51 en or en 2008).

Moisson de médaille américaine

Ce n’est pas une surprise. En 2008, les Américains n’avaient guère apprécié d’avoir été dépassés par les Chinois. A l’époque, nombre de commentateurs y avaient vu un symbole d’ordre géopolitique. La Chine obtenant plus de médailles d’or que les Etats-Unis, n’était-ce pas là un signe parmi tant d’autres d’un rééquilibrage entre les deux puissances?

Il faudra donc chercher ailleurs les signes du déclin américain. Certes, les Etats-Unis ont été moins dominateurs qu’avant en athlétisme – on pense notamment aux épreuves de sprint, où la Jamaïque (12 médailles dont 4 en or contre 11 médailles dont 6 en or en 2008) et Usain Bolt ont été royaux.

Mais les Jamaïcains ont été présents dans toutes les grandes disciplines, notamment en natation et en basket-ball. On notera, au passage, la médaille d’or de leur équipe féminine de football. Cette victoire est loin d’être anecdotique car le «soccer» (dénomination du foot aux Etats-Unis) est l’un des sports les plus pratiqués par les jeunes américaines dans les écoles primaires et les lycées.

La Chine confirme ses aspirations olympiques

Cette dynamique, et les intérêts financiers qui commencent à s’agréger autour, va certainement contribuer à donner un surcroît d’audience mondiale à un football féminin de plus en plus spectaculaire (et souvent bien plus intéressant que son homologue masculin…)

De son côté, la Chine a confirmé que ses performances de 2008 n’étaient pas simplement dues au fait que ce pays était l’organisateur des JO.

Bien sûr, le bilan chinois des Jeux de Londres est moins impressionnant que celui de Pékin. Il n’empêche. La Chine occupe désormais le prestigieux rang de premier challenger des Etats-Unis, rôle hier dévolu à l’ex-URSS ou à feu la RDA.

En sport, comme ailleurs, le duel sino-américain ne fait que commencer. La Chine a pour elle la démographie, l’ambition débordante de la puissance émergente et des moyens financiers considérables.

Le sport n'est pas qu'une question de gros sous

Face à cela, les Etats-Unis ont encore des atouts et des arguments. Ils disposent d’un extraordinaire réseau d’infrastructures sportives ainsi que d’une qualité exceptionnelle en matière d’encadrement technique et humain des sportifs.

 Ce n’est pas un hasard si nombre d’athlètes européens et africains préfèrent désormais s’entraîner aux Etats-Unis: coachs, psychologues, préparateurs sportifs, diététiciens… Autant de domaines où l’Amérique a encore de l’avance sur ses poursuivants.

Le haut du classement montre aussi que quatre pays (Grande-Bretagne, Russie, Allemagne et France) se disputent le leadership européen. Les performances de la Grande-Bretagne (65 médailles dont 29 en or contre 47 médailles dont 19 en or à Pékin) s’expliquent bien sûr par le fait qu’il s’agissait de JO à domicile.

Mais ce n’est pas tout. Outre des budgets en hausse, grâce à l’arrivée de sponsors privés (notamment en cyclisme), ce pays est celui, où, avec les Etats-Unis, le sport a le plus droit de cité dans le système éducatif.

C’est le cas aussi de l’Allemagne (44 médailles dont 11 en or contre 41 médailles dont 16 en or en 2008), où la pratique du sport pour écoliers et lycéens est non seulement obligatoire mais encouragée en dehors des cursus scolaires.

Sans sport à l’école, il ne peut y avoir de grande nation sportive même si le cas français fait figure de contre-exemple étonnant.

Le sport français sauvé par les associations

Avec 34 médailles dont 11 en or (contre 41 médailles dont 7 en or à Pékin), on peut dire que la France a réalisé une grande performance pour un pays dont les installations sportives se dégradent d’année en année, où l’école n’accorde guère de considération à la pratique sportive (ne parlons même pas du sport universitaire qui est d’une totale indigence) et où la classe politique ne s’intéresse (ou ne fait mine de s’intéresser) qu’aux sports susceptibles de leur rapporter des voix (football, rugby et, parfois, hand-ball).

De fait, sans l’existence d’un réseau associatif important et dynamique, le sport français occuperait un rang bien moins important sur l’échiquier olympique.

Enfin, on relèvera que la Russie (82 médailles dont 24 en or contre 72 médailles dont 23 en or en 2008) continue à tenir son rang et que la dissolution de l’ex-URSS semble être définitivement digérée. Plus important encore, dans ce pays aussi, de l’argent commence à se déverser au profit de certaines disciplines.

On peut d’ores et déjà parier que, dans quelques années, la Russie fera partie du trio de pointe mondial avec les Etats-Unis et la Chine.

«Il est impossible d’ignorer ou de relativiser le gâchis»

On terminera ce bilan express en plongeant dans les profondeurs du classement où figurent 85 pays médaillés. L’Algérie (une médaille d’or contre une d’argent et une de bronze en 2008) termine à la 50ième place, derrière la Tunisie, premier pays arabe (45ième avec 3 médailles dont une d’or contre une seule médaille d’or à Pékin).

Ce n’est guère satisfaisant mais, hélas, cela n’a rien d’anormal.

Combien de stades l’Algérie a-t-elle bâti depuis trente ans? Combien de piscines? Combien de salles omnisports? Combien de vélodromes? Zéro ou presque… Et qui peut affirmer qu’il existe une politique des sports dans un pays qui, pourtant, disposera bientôt de 200 milliards de dollars de réserves de change?

Il fut un temps, dans les années 1970, où la réforme sportive et l’instauration du «sport de masse» préparait l’avènement de grandes équipes (de football comme de handball) et de grands athlètes (Morceli, Boulmerka). Bien sûr, la médaille d’or de Makhloufi au 1500 mètres a fait vibrer tout un peuple (passons un voile pudique sur le couac de son 800m…).

Mais, avec une telle jeunesse, un tel potentiel, notamment en athlétisme (fond et demi-fond), il est impossible d’ignorer ou de relativiser le gâchis. Finalement, en sport, comme ailleurs, l’Algérie est à un rang de gagne-petit qui ne lui fait guère honneur (et qui devrait obliger à mettre en sourdine les discours d’autoglorification…).

Akram Belkaïd (Le quotidien d'Oran)

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Akram Belkaïd

Akram Belkaïd, journaliste indépendant, travaille avec Le Quotidien d'Oran, Afrique Magazine, Géo et Le Monde Diplomatique. Prépare un ouvrage sur le pétrole de l'Alberta (Carnets Nord). Dernier livre paru, Etre arabe aujourd'hui (Ed Carnets Nord), 2011.

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