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Combien de temps pourront tenir les résistants du Nord-Mali
Les populations désarmées du nord ne sont pas prêtes à tout accepter de la part des islamistes. Mais elles ont besoin d'un relais.
Mise à jour du 8 août 2012: Les islamistes qui contrôlent le nord du Mali, ont amputé mercredi la main d'un voleur dans la localité d'Ansongo, au sud de Gao, la première amputation jamais commise depuis quatre mois qu'ils occupent la région, a appris le 8 août l'AFP auprès d'un témoin et d'un responsable islamiste.
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Les islamistes qui occupent le nord du Mali se moquent éperdument des cris d’orfraie poussés pour les dissuader d’appliquer la charia.
D’ailleurs, on a l‘impression que plus il y a de protestations, plus cela les incite à pousser le bouchon trop loin.
Les islamistes ne peuvent plus tout se permettre
En effet, les âmes sensibles ne se sont pas encore remises de la lapidation à mort, la semaine dernière à Aguelhok, d’un couple accusé d’avoir eu des enfants hors mariage.
Personne ne s'est remis de ce que les fous de Dieu du Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) ont voulu, le 5 août, à Gao, couper publiquement la main d’une personne accusée de vol.
Si à Aguelhok, la population a assisté passive à la lapidation mortelle, ce ne fut pas le cas à Gao.
La jeunesse de la ville s’est opposée à l’application de la charia; ce qui a momentanément sauvé le condamné. Les illuminés ont reculé sans pour autant renoncer à leur loi obscurantiste.
Tout de même, ils doivent se le tenir pour dit: ils ne peuvent pas tout se permettre à Gao. Ils doivent tenir compte de la jeunesse de la ville, qui s’est aussi mobilisée contre l’enlèvement —suivi du passage à tabac— d’un animateur d’une radio locale.
Bien qu’elle n’ait pas d’armes, la jeunesse de Gao n’hésite pas à défier les occupants.
S’il faut louer le courage de cette jeunesse qui ose s’attaquer à des gens armés, il faut cependant avoir peur pour elle.
Au regard du rapport de forces, on assiste à un combat de David contre Goliath, où la brute épaisse s’abstient pour le moment d’utiliser toute sa force pour écraser le plus faible.
La répression est à craindre
Mais jusqu’à quand les islamistes se retiendront-ils? Pour avoir défié avec un succès relatif les fous d’Allah du Mujao, les jeunes ne voudront plus leur laisser quartier libre. Une fois agacés ou acculés, on ne sait pas quelle pourrait être leur réaction.
Une sagesse bien africaine conseille de ne pas pourchasser pendant longtemps un peureux qui devient subitement fort, lorsqu’il décide de rester pour livrer un combat pour la survie.
Vu sous cet angle, les occupants de Gao pourraient bien utiliser leurs armes contre les adversaires de la charia et, plus simplement, les opposants de leur présence à Gao.
Il faudra sérieusement craindre que les barbus enturbannés ne se contentent plus de tirer en l’air pour disperser les manifestants comme ils le font actuellement.
Il est à redouter donc qu’ils tirent dans le tas. Et on ne pourra rien pour les en dissuader si ce ne sont que des condamnations qui auront l’effet de l’eau sur les plumes d’un canard.
La résistance de la jeunesse de Gao est un acte de désespoir de la part de personnes abandonnées à leur triste sort par la classe politique de Bamako, plus préoccupée par des querelles de chiffonniers, de positionnement et de leadership.
Sans un relais, cette lutte héroïque est malheureusement sans lendemain. Elle risque d’être réprimée dans le sang par ces nouveaux maîtres sans foi ni loi du Nord-Mali.
Séni
Dabo (Le Pays)
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