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Maroc - La liberté sexuelle, un combat contre les conservateurs de tout poil
L’association marocaine des droits humains (AMDH) a appelé les autorités à abroger la loi du code pénal qui interdit les relations sexuelles avant le mariage sous peine d’emprisonnement. L’AMDH dénonce «l’hypocrisie» du système juridique en vigueur dans le royaume.
«L’ONG a adressé un appel à l’abolition de l’article 490 du code pénal marocain, incriminant toute relation sexuelle entre homme et femme adultes non liés par le lien du mariage» rapporte E-Marrakech.
«L'article 490 du code pénal marocain prévoit une peine d'un mois à un an de prison pour toute relation sexuelle en dehors du mariage entre deux personnes adultes» précise Jeune Afrique.
«Cet article traduit l'hypocrisie de notre système juridique vis-à-vis de la liberté sexuelle, qui est l'une des libertés individuelles que nous défendons», a déclaré à l'AFP Khadija Ryadi, la présidente de l'AMDH.
Elle a plaidé lors d’une table ronde organisée à Rabat pour une mobilisation des «forces démocratiques pour une lutte continue jusqu’à la sécularisation de l’Etat et l’instauration d’un élargissement des libertés individuelles au Maroc».
Elle a souligné que «les libertés sexuelles, de croyance, de l’avortement, de manger en public les jours du Ramadan ou du droit de disposer librement de son corps forment le gros des revendications de la jeunesse révolutionnaire marocaine».
Lui emboitant le pas, le sociologue marocain Abdessamad Dialmy présent à la rencontre a dénoncé le double langage de l'Etat qui selon lui énonce des principes de droit qu'il viole lui même puisque tirant sa légitimité de la religion.
D’autres intervenants ont indiqué que «l'Etat pratique une schizophrénie qui est inadmissible aujourd'hui».
Les islamistes n’ont pas tardé à réagir accusant les défenseurs de la dépénalisation de la liberté sexuelle de «laïcs singeant l’Occident dans ses pratiques les plus dégradantes».
«La liberté sexuelle favorisera le phénomène des enfants nés hors mariage et cela a des conséquences graves pour la société», a dit pour sa part Abdelwahab Rafiki, l'un des célèbres prédicateur salafiste marocain.
Membre influent du Parti de la justice et du développement, la formation politique islamiste qui dirige le gouvernement, Abouzaid El Mokrie El Idrissi a déclaré que «l’Occident souffrant de la décadence de ses valeurs morales et familiales ne peut en aucun cas servir de modèle pour notre société». Il appelle «au retour aux valeurs islamiques telles que adoptées par les Marocains des siècles durant».
Un micro-trottoir réalisé par le journal Au Fait à Casablanca voudrait démontrer que le débat est loin d’être tranché au sein de la société marocaine.
Dans son éditorial, Al Massae, le quotidien arabophone le plus lu au Maroc, connu par ailleurs pour son conservatisme, a défendu l’idée que «la liberté sexuelle est un danger pour le Maroc».
«De pareilles revendications, qui sont le fait d’une minorité qui pense s’être "libérée" de la culture de la société au sein de laquelle elle vit, revient en quelque sorte à jouer avec le feu dans une société musulmane qui rejette ces déviations prévalant entre ses membres» a fustigé le quotidien.
Et d'accuser «une poignée de laïcs de mettre le feu aux poudres» dans le but de se «confronter au gouvernement islamiste afin d’éviter de s’opposer au roi qui tient sa légitimité de l’islam».
Lu sur Al Massae, E-Marrakech, Jeune Afrique, Au Fait
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