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La famille Le Pen et ses amis africains
La famille Le Pen, qui règne de père en fille sur le Front national, a noué des liens étroits avec certains dictateurs africains depuis plusieurs décennies.
Mise à jour du 3 mai 2017: Nous republions cet article à l'occasion du débat télévisé du second tour de l'élection présidentielle française entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron.
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Que se sont dit Omar Bongo et Jean-Marie Le Pen, lorsqu’ils se sont rencontrés (comme le reconnaît Le Pen) pour ne pas se remettre de l’argent (contrairement à ce qu’affirme Robert Bourgi), quelques temps avant la campagne présidentielle française de 1988? Peut-être des histoires de progéniture. Peut-être le vieil “émir” du Gabon et l’ancien président du Front national ont-ils échangé, entre chefs charismatiques et entre anciens lieutenants, des conseils sur la meilleure manière de transmettre un héritage politique à ses rejetons.
Si le président d’honneur du Front national français n’a jamais témoigné d’une grande passion pour les territoires exotiques, il partage avec nombre de politiciens africains le goût du népotisme. Derrière une façade démocratique bien lustrée, sa fille Marine le Pen a su hériter de sa parcelle de pouvoir comme d’une entreprise familiale.
Pépé Le Pen pourrait se révéler aussi généreux que papa Le Pen
Comme Ali Bongo, mais aussi comme Faure Gnassingbé ou Joseph Kabila. Ailleurs en Afrique, Gamal Moubarak, Saif al-Islam Kadhafi ou Karim Wade en avaient rêvé.
Et “pépé” Le Pen pourrait se révéler aussi généreux que “papa” Le Pen. Après sa fille Marine, Jean-Marie, 88 ans, porte aux nues sa petite fille Marion Maréchal-Le Pen. La toute nouvelle élue députée de la troisième circonscription du Vaucluse sous l'étiquette du Front national est la fille de Samuel Maréchal et Yann Le Pen, la deuxième fille de Jean-Marie.
Petite-fille du premier président du FN, nièce de la deuxième présidente, ça valait le coup d'agrafer le nom de jeune fille de sa mère au patronyme de son père. «Qui est fou ?», disent les Ouest-africains…
Les storytellers du clan Le Pen aiment établir un parallèle entre Marion, plus jeune élue, à 26 ans, de toutes les législatures de la Ve République, et Jean-Marie, présenté comme le plus jeune député de la IIIe législature de la IVe République française, à l'âge de 27 ans, en 1956, dans la première circonscription de la Seine.
En réalité, un jeune communiste fut également élu cette année-là: André Chêne. Il était le cadet de Le Pen de quelques mois. Mais un communiste entendrait-il vraiment être “calculé” dans une famille d’extrême-droite?
Si la patronne du FN, tantie Marine, n’est pas victime, d’ici là, d’une crise de jalousie envers sa plus jeune, plus svelte et plus blonde nièce, il y aura donc trois générations de Le Pen installées durablement sur les rails du néo-poujadisme. Un véritable soap opera…
Solidarité de proximité oblige, la préférence nationale semble être soumise à la préférence familiale. “Les Pen” aiment la Famille. Les trois filles issues du premier mariage de pépé Jean-Marie -Marie-Caroline, Yann et Marine- lui ont donné neuf petits-enfants.
Un gendre peut bénéficier d’un portefeuille ministériel
Au grand dam du frontiste historique Bruno Gollnisch, le patriarche a obtenu la transmission démocratique de la présidence du Front national à sa fille, en 2011. Et comme en Afrique, la famille, on l’aime “élargie” chez les Le Pen.
Comme un beau-frère ou un gendre peuvent fréquemment bénéficier d’un portefeuille ministériel dans un régime africain, un membre greffé de la famille Le Pen peut espérer progresser avantageusement dans les arcannes du Front national.
Louis Aliot est-il le compagnon de Marine Le Pen parce que la présidente du FN est éblouie par son parcours dans le Languedoc-Roussillon? Ou est-il le vice-président du Front national chargé du projet parce qu’il est le compagnon de Marine Le Pen?
Le cœur a ses raisons que la stratégie n’ignore pas. Si les pièces du puzzle politique s’emboîtent bien, la famille par alliance, c’est toujours la famille. Même les filleuls…
Jean-Marie Le Pen est moult fois parrain. Comme le Don Vito Corleone des films de mafia, sans doute, mais aussi comme celui qui veille sur l’éducation religieuse d’un enfant: parrain du fils de son ancien numéro deux, Bruno Mégret, celui qui veillait sur le patrimoine idéologique avant la trahison et avant la maturité de Marine; parrain du peintre Alexandre Barbera-Ivanoff, qui réalisa un portrait flatteur de Le Pen en 2006; parrain, en 2008 , d'une des filles de l'humoriste Dieudonné M'bala M'bala, baptisée par un prêtre traditionaliste.
Ancien adversaire du Front national dans la ville de Dreux, puis phagocyté par la mouvance antisionite, Dieudonné indique, en parlant de son rapprochement avec le président d’honneur du FN qu’on «ne peut faire la paix qu’avec ses adversaires».
Cette énigmatique introduction de Dieudo’ dans la “famille” Le Pen offre à tonton Jean-Marie une caution humoristique incertaine, mais aussi une caution antiraciste, même cynique. L’humoriste sulfureux se déclara sensible à «la main tendue par Jean-Marie Le Pen aux Français d’origine (…) africaine».
Un peu de Gabon avec Omar, un peu de Cameroun avec Dieudonné: La boucle est bouclée.
Selon Jean-Marie, La famille Le Pen est de «bonne race»
Tonton Louis, tonton Bruno, tonton Dieudonné: cette famille de bric et de broc s’est penchée sur le berceau de Marion. Comme elle l’a toujours fait au bénéfice des membres… de sang.
Le 3 juin 2015, le patriarche Jean-Marie insistait d’ailleurs sur le fait que la famille Le Pen est de «bonne race». Le borgne breton n’est pas aveugle. Il sait surtout sentir l’odeur de l’argent. Un autre tonton, “tonton Hubert”, alimenta, lui, un patrimoine qui n’a rien d’idéologique ou d’humoristique.
Auteur d’articles dans diverses revues nationalistes et héritier d’une partie de la dynastie des ciments Lambert, Hubert Lambert meurt en 1976, à quarante-deux ans et sans enfant. Il lègue à Jean-Marie Le Pen une fortune estimée à 30 millions de francs français…
Jean-Marie, Marine et Marion ont usé avec talent de ce culte de la famille qu’on juge encore bien souvent intouchable en Afrique. Mais après tout, cela suffit-il à justifier un amalgame entre l’idéologie d’extrême-droite et les pratiques politiques africaines?
L’élue socialiste de Lille, Martine Aubry, n’a-t-elle pas construit sa carrière dans le sillage de son père Jacques Delors? Il est vrai, sans avoir l’outrance de brandir, elle, le patronyme paternel. Les jumeaux Jean-Louis Debré, président du Conseil constitutionnel français et Bernard Debré, député apparenté UMP d'Indre-et-Loire ne sont-ils pas les fils de Michel Debré, Premier ministre du général de Gaulle et rédacteur de cette Constitution de la Cinquième République que tant d’Etats africains copièrent?
Les deux dernières candidatures du parti socialiste français à la présidence n’ont-elles pas été un chassé-croisé d’ex-concubins? George W. Bush aurait-il été président si George H. Bush ne l’avait pas été? Bon sang saurait-il mentir?…
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