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Pourquoi le ministre Arnaud Montebourg inquiète les Marocains

Arnaud Montebourg souhaiterait voir revenir en France les centres d'appels des opérateurs télécoms, largement délocalisés à l'étranger et notamment au Maroc où cette activité est en pleine expansion.

Selon le quotidien Les Echos, le ministre français du Redressement productif entend ainsi «parer aux risques de destruction d'emplois que pourrait subir la filière».

«L'idée n'est pas complètement neuve: en 2004, Jean-Louis Borloo, puis, en 2010, Laurent Wauquiez ont tenté d'inciter les opérateurs à relocaliser l'emploi en France. Sans succès. L'économie des pays concernés, Maroc et Tunisie en tête, dépend largement de ce secteur. Les affaiblir est politiquement difficile», ajoute Les Echos.

Sous Sarkozy, l'intervention des autorités marocaines avait dissuadé la France de s’engager sur cette voie. En sera-t-il de même avec les socialistes aujourd’hui? Pas si sûr, France Telecom a déjà répondu favorablement à l’appel du ministre, il est vrai sous certaines conditions.

Selon Bercy, le nombre d’emplois délocalisés a été multiplié par 6 entre 2004 et 2009, passant de 10.000 à 60.000.

Le prix d'une heure en centre d'appel implanté en France, facturé donc aux opérateurs, est de l'ordre de 30 euros, avec une tendance à la baisse vers 25 euros. Au Maroc, ce tarif est d'environ 15 euros et au Sénégal, il peut descendre à seulement 10 euros, selon un expert cité par L’Usine Nouvelle.

«Toutefois, il est inconcevable de conclure hâtivement que les délocalisations détruisent l’emploi dans l’Hexagone» pense pour sa part Hicham El Moussaoui analyste sur UnMondeLibre.org.

Il en veut pour preuve que le secteur de la relation clients continue de créer de l’emploi en France.

«En 2009, et malgré la crise, la filière a créé plus de 10.000 emplois en France contre seulement 5.000 emplois au Maroc, soit deux fois plus. Aussi, la majorité des centres d'appels se trouvent encore en France: 80% du chiffre d'affaires de ces sociétés a été réalisé sur le territoire en 2008, contre 20% pour les centres "offshores", selon le SP2C (Syndicat des professionnels de centres de contacts» explique-t-il.

L’enjeu serait donc plutôt politique, la gauche ayant à maintes reprises avancé que la «désindustrialisation de la France» était principalement due à l’implantation de nouvelles usines françaises dans les pays du Sud aux dépends des centres de production existants sur le territoire national, comme ce fut le cas pour Renault à Tanger.

Alors que le royaume tente à tout prix de s’assurer la bienveillance du nouveau pouvoir en France sur de nombreux dossiers, la volonté affichée par Arnaud Montebourg sur celui des délocalisations est perçue comme une menace sérieuse. Pour Rabat, le chantre de la «démondialisation» a toujours eu un tropisme pour l'Algérie, un pays avec qui il a des attaches généalogiques et qui ne craint pas les velléités protectionnistes de la France.

Lu sur Les Echos

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