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Côte d'Ivoire: une défaite pas si surprenante
La chute de la Côte d'Ivoire a étonné beaucoup de monde. L'émergence de la Zambie n'est pourtant pas le fait du hasard.
La nuit a été courte à Abidjan et tout est bien triste ce lundi, 13 février. La fête engagée dès les premières heures de la journée de dimanche s’est brutalement arrêtée. Seul le football peut expliquer pourquoi la victoire attendue des Éléphants a pu leur échapper.
Des Ivoiriens ultra-favoris
Meilleure défense: aucun but encaissé durant tout le tournoi. Une attaque prolixe : 9 buts marqués en cinq rencontres. Plus que tous les autres favoris de cette CAN 2012, les Éléphants avaient amplement mérité leur réputation. Et le trophée semblait languir de s’offrir à eux sur un plateau d’or. Cruelle désillusion dimanche soir devant la Zambie qu’on n’attendait pas à ce niveau de la compétition. Les Chipolopolos auront déjoué tous les pronostics. Personne ne les avait vus venir et ils ont confondu les analystes les plus avertis.
Leur victoire met en lumière une fois encore cette glorieuse incertitude qui fait le charme parfois cruel du ballon rond. Qui eût cru cette bande de garçons sans pedigree capables de déboulonner l’un après l’autre les redoutables adversaires qui se sont dressés sur leur chemin ? Qui les eût crus, parvenus en finale, capables de terrasser l’ogre ivoirien incarné par Didier Drogba, Kolo Touré, Gervinho et autres, des joueurs à l’audience planétaire ? Glorieuse incertitude du football, quand tu nous tiens…
Se contenter de cette considération irrationnelle serait toutefois réducteur pour cette équipe de Zambie que tout le monde s’est, en vérité, refusé de voir venir. Sa victoire, en fait, est le fruit de la méthode, de la constance. Le microcosme du football africain est ainsi fait que chaque fois qu'on l’évoque, des pays sont évoqués spontanément comme les Grandes nations de foot du continent.
Ainsi, en l’absence de noms déjà codés comme le Cameroun, l’Égypte et le Nigeria, la Côte d’Ivoire, le Ghana et à un degré moindre le Sénégal ont été élevés mécaniquement au rang de futurs époux de dame coupe sans qu’on ait auparavant procédé à une évaluation objective de leurs capacités à séduire cette dame capricieuse qui exige souvent plus que de la notoriété à ses soupirants.
La Zambie, un groupe homogène et cohérent
L’une de ses exigences, c’est la constance dans l’approche. Nos mémoires sélectives ont vite fait d’oublier que cette équipe des Chipolopolos n’a pas été constituée de toutes pièces.
En 2009, à Abidjan, elle avait fait bonne impression lors de la première édition du Championnat d’Afrique des nations (Chan), avec le même entraîneur, Hervé Renard. Même si elle est constituée de joueurs locaux (évoluant sur le continent), nul n’a, semble-t-il, remarqué que les Chipolopolos forment un groupe homogène et cohérent, régulièrement huilé dans un même moule: le TP Mazembé en République Démocratique Congo voisine, où neuf d’entre eux évoluent.
Peu de formations sur le continent ont la chance d’avoir un groupe aussi régulièrement éprouvé ensemble et dans lequel se développe ainsi une âme. Hormis l’Égypte et peut-être la Tunisie, les équipes nationales africaines sont presque des constellations de vedettes qui se retrouvent le temps d’une compétition.Forcément, il y a des automatismes qu’on ne peut développer et un état d’esprit qui n’a pas la force de celui des groupes forts.
Le préjugé favorable dont il a toujours jouit aidant, on a volontairement oublié que le Ghana dont on a fait un grandissime favori de la compétition, présente une équipe très jeune, montée de toutes pièces en 2010 après la défaillance de ses stars. Tout le monde s’est ainsi acheté une cécité sur les tares défensives et même offensives de cette formation qui a certes du talent, mais manque de métier.
Le métier, le grandissime favori, la Côte d’Ivoire, l’avait. Il lui a certainement manqué ce petit quelque chose qui, en football, fait parfois la différence: la réussite. Les Chipolopolos en ont eu certainement, mais ils avaient aussi un autre atout: la stabilité de leur encadrement.
À la tête de la troupe depuis 2008, l’entraîneur Hervé Renard a su façonner ses garçons et fait corps avec eux. Observateur et futé, il a réussi une bataille technico-tactique qui a contraint nos pachydermes aux prolongations et à l’impensable et aléatoire épreuve des tirs au but. Un sacré renard!
Elvis Kodjo (Fraternité Matin)
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