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L'Afrique prend goût à l'héroïne

L'héroïne fait son lit sur le continent africain. Selon le rapport de l'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS), la contrebande mais aussi la consommation d'héroïne se développent sur le continent.

Lorsqu'elle a fait son apparition au début des années 80, les «passeurs nigérians, devenus depuis des acteurs qui comptent dans le trafic international de stupéfiants, allaient chercher de l’héroïne en Asie du Sud, principalement au Pakistan, pour l’acheminer via l’Afrique, vers l’Europe et les Etats-Unis», écrit sur son blog Christophe Champin.

L’Afrique est aujourd’hui une terre de transit privilégiée pour le trafic d’héroïne et de cocaïne, «principalement en raison des bonnes liaisons aériennes de ses pays». Selon les estimations de l’UNODC (Bureau des Nations unies contre la drogue et le crime), environ 35 tonnes d’héroïne passent chaque année par le continent africain.

Un transit qui emprunte un trajet précis:

«Depuis le Kenya, l’héroïne est transportée dans les îles de l'océan Indien: Comores, Madagascar, l’île Maurice et les Seychelles. L’Afrique du Sud est utilisée comme pays de transit pour les envois d’héroïne destinés aux marchés illicites d’Afrique australe et d’Europe», décrit le rapport.

L'Afrique de l'Ouest joue effectivement dans la cour des grands: les groupes de trafiquants y «jouent un rôle clef dans le trafic d'héroïne au niveau mondial». En 2009 et 2010, plusieurs saisies importantes («plus de 5kg chacune») ont ainsi impliqué la Côte d'Ivoire, le Ghana et le Nigeria.

Pourtant, les gouvernements cherchent par tous les moyens d'endiguer ce trafic. Secoué par des révélations publiées par WikiLeaks incriminant certains de ses officiels, «le Ghana a profondément restructuré son service national de détection et de répression des infractions liées à la drogue», informe l'OIC. La coopération avec le Nigeria a également été accrue.

Pour contourner des législations de plus en plus strictes, les trafiquants ne manquent pas d'imagination. Selon le Bangkok Post, les gangs originaires d'Afrique pousseraient leurs membres à épouser des femmes pour dissimuler ensuite à leur insu de la drogue dans leurs bagages.

Cette technique a déjà été utilisée dans des pays du sud-est asiatique comme la Malaisie, le Laos et le Cambodge. En février 2011, trois Thaïlandaises ayant récemment épousé des Africains ont été arrêtées à l'aéroport de Bangkok en possession de cocaïne, d'héroïne et de méthamphétamine.

Nouveauté révélée par le rapport, l'implantation de pratiques consommatrices. Selon l'OICS «il y a environ 1,2 million d'héroïnomanes en Afrique». Maurice comptabilise le plus grand nombre de consommateurs d'opiacés (substances dérivées de l'opium, dont l'héroïne fait partie). Au niveau régional, c'est l’Afrique de l’Est qui arrive en tête, devant l’Afrique du Nord, l’Afrique australe, puis l’Afrique centrale et de l’Ouest.

L’usage de drogues injectables, une réalité dans 27 pays du continent dont 17 pays d’Afrique de l’Ouest, est nié par les hommes politiques du continent. C'est pourtant une affaire de santé publique, notamment dans sa corrélation avec l'épidémie de sida qui ravage toujours le continent noir.

Lu sur RFI