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Tempête de sable à Ingal, Nord du Niger. REUTERS/Luc Gnago
Tempête de sable à Ingal, Nord du Niger. REUTERS/Luc Gnago

Niger: gare à la malédiction de l’or noir!

Le Niger vient de commencer sa production pétrolière. Est-ce vraiment une chance pour ce pays qui est l'un des plus pauvres du continent?

Le Niger vient de commencer la production du pétrole sur son territoire avec le concours d’une société chinoise. C’est une bien heureuse nouvelle pour ce pays classé parmi les plus pauvres au monde et qui traîne comme un boulet sa sécheresse et ses famines à répétition. C’est connu: le pétrole est depuis des lustres, une denrée prisée. Beaucoup de pays qui en exportent, possèdent une énorme richesse. On en veut pour preuve les pays du Golfe dont on ne finit pas d’entendre parler des pétrodollars. Vive donc l’or noir! Avec cette production et l’exportation qui s’ensuivra, le pays va engranger des devises pour mieux réaliser des investissements.

Se doter d'un système efficace de contrôle de cette production

Les conditions de vie des populations devraient, par voie de conséquence, connaître une amélioration. En tout état de cause, la famine dont le spectre hante chaque année les esprits dans ce pays désertique, ne devrait être bientôt qu’un lointain souvenir. C’est donc un euphémisme de dire que cette production de pétrole est une bénédiction pour le Niger. Seulement, l’espoir que suscite la mise en route de cette exploitation ne doit pas cacher les risques potentiels qu’elle comporte. Les leaders nigériens doivent travailler à ce que cette manne soit vraiment profitable à tout le pays et aux populations dans leur vie quotidienne. En cela, il faut saluer la vision des autorités du pays, qui ont intégré le volet raffinage dans le processus d’exploitation de ce pétrole.

Ce n’est pas tous les jours qu’en Afrique, on se préoccupe d’ajouter de la valeur aux produits avant leur exportation. Comme on le voit si bien dans beaucoup d’Etats africains, hélas, les ressources naturelles sont très souvent à l’origine de conflits sanglants, en raison de leur mauvaise gestion par les tenants du pouvoir. Le pétrole n’échappe pas à la règle. La violence dans le Delta du Niger, révélatrice des difficultés, du désordre entourant la gestion de l’or noir au Nigeria, est très illustrative en la matière. Gare donc à la « malédiction de l’or noir »!

L'opposition doit ouvrir l'oeil et le bon

La seule potion qui vaille la peine est la bonne gouvernance. Il faut une bonne redistribution des revenus issus de l’exploitation de ce pétrole en faveur des populations. Pour cela, il importe de commencer par bien négocier les contrats avec le concessionnaire chinois. Le Niger devra éviter à tout prix ces contrats léonins qu’on rencontre ça et là en Afrique, et qui ont pour conséquence la dilapidation des ressources des pays au profit de puissances extérieures, moyennant quelques pots-de-vin et dessous de table au profit des dirigeants qui se vautrent dans le luxe pendant que les populations manquent du minimum vital.

Les concessionnaires, dans ce genre de situations, ont certes le droit de réaliser des bénéfices, mais cela ne devrait pas être au détriment du pays et de ses populations. Il est également impératif que les Nigériens se dotent d’un système efficace de contrôle de cette exploitation, pour suivre le processus de bout en bout de sorte que chaque goutte de pétrole soit comptabilisée comme il se doit. On peut espérer que le Niger disposera de la compétence et de l’expertise au sommet pour défendre efficacement ses intérêts à ce niveau. Le chef de l’Etat lui-même étant un diplômé des mines. Il est de notoriété publique que le pétrole suscite bien des convoitises et aiguise des appétits insoupçonnés.

Le gouvernement nigérien ne doit laisser aucune chance aux rumeurs et suspicions. En plus de la nécessité de conclure des contrats équitables avec ses partenaires et de suivre de près le respect des clauses, il faut qu’il fasse de la transparence dans la gestion de la chose publique, notamment des industries extractives, son cheval de bataille. Pour ce faire, il serait bien inspiré de mettre en place une stratégie d’information et de communication autour des données de cette exploitation pétrolière.

En d’autres termes, il doit s’employer à rendre l’information non seulement disponible, mais aussi vérifiable par des sources indépendantes. Cela aura l’avantage certain de dissiper d’éventuels malentendus et pourra contribuer à éviter des agitations contreproductives dans le pays, autour de ce pétrole.

L’opposition politique et la société civile nigériennes se doivent également d’ouvrir l’œil et le bon. Elles doivent jouer à fond leur partition par une critique constructive. Et comme on le sait si bien, la vue de l’or, fût-il noir, peut « faire tourner la tête » aux dirigeants. C’est pourquoi les autres acteurs de la société nigérienne doivent veiller à les recadrer si besoin est, avec objectivité, mais avec force conviction. La société civile qui est déjà montée au créneau pour exiger la renégociation du contrat avec la société chinoise dans le sens de garantir les intérêts du Niger, est dans son bon droit, et prouve, si besoin en était encore, qu’elle est vigilante et engagée comme elle l’a déjà démontré face aux velléités de règne sans fin de Mamadou Tandja. En somme, il faut que tous les Nigériens, le pouvoir exécutif en tête, œuvrent à asseoir un consensus national autour de la gestion de ce pétrole afin qu’il soit plus profitable aux populations que l’uranium, hélas, ne l’aura été jusque-là.

Le Pays

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