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Les multiples vies d'Abubakar Shekau qui nargue le Nigeria
L'armée nigériane a une nouvelle fois annoncé avoir gravement blessé le chef du groupe terroriste Boko Haram.
L'armée nigériane a annoncé le 23 août qu'elle avait blessé le chef du groupe terroriste Boko Haram dans une opération. Abubakar Shekau, dont le leadership à la tête de Boko Haram a récemment été mis en cause, a été «gravement blessé» lors de ce raid mené vendredi sur la forêt de Sambisa, selon un communiqué du porte-parole de l'armée nigériane cité par l'AFP.
Nigeria: le chef de Boko Haram blessé dans un raid aérien, selon l'armée https://t.co/joMXPuyClB #AFP pic.twitter.com/B4KUnpsAPU
— AFP Afrique (@AFP_Afrique) August 23, 2016
Mais il ne faut pas forcément croire sur parole l'armée nigériane sur cette information. Depuis que les autorités du Nigeria luttent contre Boko Haram, Abubakar Shekau a déjà été annoncé mort à plusieurs reprises.
«Combien de fois un homme peut-il mourir? Au moins quatre, dans le cas d'Abubakar Shekau, le fuyant leader de Boko Haram. Les forces nigérianes avaient déjà célébré son décès en 2009, 2013 et 2014, ce qui lui a laissé à chaque fois l'occasion de ressurgir de manière surprenante dans le monde des vivants devant une caméra», analyse le magazine britannique The Economist.
Au mois d'août 2015, c'est le président du Tchad, Idriss Déby, qui avait annoncé un peu trop tôt la mort du djihadiste. Abubakar Shekau avait finalement une nouvelle fois fait son retour devant la caméra en déclarant:
«Qui sont les menteurs qui m'annoncent mort? Personne ne peut me tuer».
Attendre l'autopsie du corps
Ces annonces prématurées des décès de chefs d'organisations terroristes sont fréquentes. D'abord parce qu'il est très difficile de pouvoir vérifier sur le terrain si un leader a bien été touché ou non lors d'une opération, ou même s'il se trouvait bien sur un lieu visé.
Nous racontions sur Slate.fr, comme la mort du djihadiste Mokhtar Belmokhtar avait été annoncée de manière erronée à plusieurs reprises, notamment par les autorités libyennes ou tchadiennes.
«En 2013, c'est l'armée tchadienne qui avait crié victoire trop tôt en annonçant la mort prématurée de celui qui avait organisé l'attaque sanglante du complexe gazier algérien d'In Amenas, dans laquelle 37 otages avaient trouvé la mort. Dans un raid lancé contre une base islamiste, les soldats tchadiens, appuyés par l'armée française, avaient tué Abou Zeid, un autre leader d'Aqmi, mais le corps de Mokhtar Belmokhtar n'avait jamais été officiellement identifié».
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C'est la leçon qu'il faut retenir de telles annonces. Tant que le corps du terroriste n'a pas été formellement identifié, les risques d'erreur sont importants. C'est d'ailleurs la politique de l'armée américaine qui attend toujours l'autopsie du corps pour annoncer la mort d'un djihadiste de haute importance.
Un gros détail dont ne s'embarrasse pas l'état-major de l'armée nigériane qui agit d'abord sous la pression du résultat imposé par le président Muhammadu Buhari. Depuis son arrivée au pouvoir en mai 2015, le chef d'Etat a annoncé plusieurs fois que la défaite de Boko Haram ne serait qu'une question de mois. The Economist rappelle même que Buhari «a récemment donné trois mois à l'armée pour éliminer Boko Haram». Une victoire impossible à obtenir. Avec ou sans Abubakar Shekau.