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Les autorités égyptiennes font la chasse à Pokémon Go
Pikachu n'est pas le bienvenu au pays des pharaons.
Comme ailleurs sur la planète, l'application Pokémon Go rencontre un succès fou en Egypte. Le jeu vidéo développé par Nintendo qui vous envoie dans la rue capturer des petits monstres virtuels, n'est pourtant pas encore officiellement disponible au pays des pharaons, mais de nombreux utilisateurs ont modifié les paramètres de géolocalisation de leur smartphone pour télécharger le jeu, comme le rapporte le site Egyptian Streets.
«#PokemonGo vole l'esprit des gens», écrit même le média Daily News Egypt, qui a publié un dessin humoristique sur le sujet.
Daily News Egypt's daily #cartoon: #PokemonGo is stealing people's minds. pic.twitter.com/Wn6i7Gu1E1
— Daily News Egypt (@DailyNewsEgypt) July 18, 2016
«Un outil d'espionnage»
Le gouvernement égyptien traite le sujet de manière moins légère – bel euphémisme que de dire ça. Selon le site d'information Al-Arabiya, le porte-parole de la présidence égyptienne, Jossam al-Qawish, a affirmé que l'application Pokémon Go serait analysée pour savoir si elle représente une menace pour la sécurité nationale.
Encore plus fort, Hani al-Nazer, l'ancien président du Centre de recherche nationale, a confié à Al-Arabiya que Pokemon Go, «pourrait être un outil d'espionnage et de collecte d'informations». Avant d'ajouter: «Quand le jeu est activé et utilise Google Maps, chaque pas de l'internaute est enregistré, ce qui peut potentiellement fournir des informations qui pourraient être utilisées pour cartographier la vie des joueurs à l'échelle nationale».
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La plus haute autorité sunnite d'Egypte, la mosquée Al-Azhar, dont les propos ont été relayés par le site Gulf News, a également accusé l'application d'éloigner les joueurs de la religion et du droit chemin.
«Allons-nous trouver des fous marcher dans les mosquées, églises, prisons ou bases militaires à la recherche de Pokémons? Les gens vont-ils négliger leur travail et leur vie de dévotion pour, à la place, chasser des Pokémons?», s'est interrogé Abbas Shuman, le numéro 2 d'Al-Azhar. Rien que ça.
Careful everyone. #pokemon go has been declared un-islamic by cleric in #Egypt. Reason: #addictive like alcohol which is forbidden in #islam
— Naukhaiz Saleem (@naukhaizs) July 19, 2016
«Attention tout le monde. Pokémon Go a été déclaré comme contraire aux principes de l'islam par le clergé en Egypte. La raison: c'est addictif comme l'alcool, ce qui est interdit par l'islam», écrit cet utilisateur de Twitter.
Concurrence à la religion
De nombreux joueurs continuent cependant à lancer des pokéballs virtuelles dans les rues du Caire à la recherche de Pokémons rares. Une page Facebook spécifiquement dédiée au jeu en Egypte a par exemple été créée. Les joueurs y échangent conseils et astuces, notamment pour télécharger l'application.
Les fans sont également nombreux à moquer la rigidité des autorités égyptiennes, politiques et religieuses.
Now that Pokemon Go is the fastest growing religion, Islam feels threatened. https://t.co/yDTKRoZQFh
— Chuck Ketchum (@chuckturnsup) July 19, 2016
«Maintenant que Pokémon Go croît plus vite que la religion, l'islam se sent menacé».
"Egypt declairs pokemon go un-islamic"
— Borf Dingo (@DingoPerson) July 18, 2016
1 year later: "Egypt declares world un-islamic. Builds giant walls on borders"
«L'Egypte déclare Pokémon Go non-islamique. Un an plus tard: "l'Egypte déclare le monde non-islamique et construit un mur géant à ses frontières.»
Forget #ISIS in Sinai, #PokemonGO is a MAJOR threat to #Egypt national security, parliament to discuss game banhttps://t.co/nfGc65dGJD
— SaadAbedine (@SaadAbedine) July 18, 2016
«Oubliez l'Etat islamique dans le Sinaï. Pokemon Go est une menace MAJEURE pour la sécurité nationale en Egypte, le parlement discute d'une interdiction du jeu.»
Un précédent Tom et Jerry
Depuis l'arrivée du maréchal Al-Sissi au pouvoir en Egypte en 2013, le régime a durci progressivement sa répression – aujourd'hui féroce – contre les opposants politiques. On vous a déjà raconté sur Slate Afrique comment la surveillance des citoyens par la police secrète égyptienne s'apparentait dans une certaine mesure au livre «1984» de George Orwell, ou comment les autorités égyptiennes voulaient tenir pour responsables les parents de terroristes égyptiens.
Mais la palme revient sans doute au chef des services de renseignements égyptiens qui avait accusé le dessin animé Tom et Jerry de participer à la montée de l'extrémisme et de la violence dans le monde arabe. CQFD.