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Boko Haram est en train de laisser tomber Daech pour al-Qaida
Le groupe terroriste nigérian est en perte de vitesse dans son fief.
En un an, le groupe terroriste Boko Haram a perdu beaucoup de terrain. Une coalition régionale menée par les armées nigériane, camerounaise et tchadienne a réduit à quelques poches les territoires contrôles par les combattants djihadistes dans le nord-est du Nigeria.
Un déclin qui coïncide, hasard ou pas, avec la date où Boko Haram a choisi de prêter allégeance à l'Etat islamique («Daech» en arabe). C'était en mars 2015. À cette période, l'alliance entre les deux groupes djihadistes inquiétait fortement les puissances occidentales, qui y voyait un moyen pour la secte nigériane de recruter de nouveaux soldats, d'acquérir des armes plus perfectionnées et d'apprendre des techniques de guérilla enseignées par Daech. Dans sa revue officielle, Dabiq, l'Etat islamique conseillait d'ailleurs aux volontaires d'aller grossir les rangs de Boko Haram.
Mais depuis tout a changé. «La faiblesse actuelle de Boko Haram peut en partie être attribuée à sa décision de se joindre à l'Etat islamique», explique le magazine Foreign Policy dans une longue analyse.
Une «marque» sur le déclin?
En effet, avant de s'allier avec l'Etat islamique, Boko Haram nouait des alliances avec des groupes terroristes locaux, dont al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), qui lui permettait par exemple de s'approvisionner en armes à travers des réseaux noués dans la zone désertique du Sahel, de la Mauritanie à la Somalie, analyse Foreign Policy. Mais en prêtant allégeance à Daech, Boko Haram s'est mis à dos Aqmi et les autres groupes locaux. Comme nous le racontions sur Slate.fr, c'est en sous-traitant ses attaques à des groupes armés locaux qu'Aqmi a fait son retour au premier plan sur le continent depuis le début de l'année 2015.
"Boko haram c'est 33.000 morts ces dernières années dont la moitié tués par l'armée nigériane " conf. #bokoharam Paris
— Coumba Kane (@coumba_kane) June 22, 2016
Pour Samuel Nguembock, chercheur à l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), les alliances nouées par Aqmi en Afrique sont des actes très rationnels.
«C'est une adaptation au rapport de force sur le terrain. L'accélération des attentats est une stratégie de survie. Daech a gagné beaucoup de terrain en peu de temps, et ça été l'inverse pour Aqmi. Face à cette réalité, le groupe a dû se réorganiser et nouer des alliances», expliquait à Slate.fr ce spécialiste du terrorisme au Sahel.
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Retour dans le giron
Surtout, Daech n'a pas apporté l'aide escomptée à Boko Haram. Comme le pointe Foreign Policy, le «califat» a depuis un an largement concentré ses efforts sur la Libye en Afrique, plutôt qu'au Nigeria. Aujourd'hui, Boko Haram pourrait donc bien revenir dans le giron d'al-Qaida, qui a tristement accru son pouvoir de nuisance en Afrique de l'Ouest depuis quelques mois, avec des attaques terroristes de grand ampleur menées à Ouagadougou, Bamako et Grand-Bassam.
«Si Boko Haram mettait soudainement fin à son alliance avec l'Etat islamique, cela enverrait un puissant message aux autres groupes affiliés à al-Qaida avec l'idée que l'Etat islamique est une marque sur le déclin», conclut Foreign Policy.