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Quand l'Egypte accuse le dessin animé Tom et Jerry de jouer un rôle dans les violences politiques
Les services de sécurité égyptiens brutalisent l'opposition, mais un simple dessin animé est trop violent pour eux.
Depuis l'arrivée du maréchal Al-Sissi au pouvoir en Egypte en 2013, le régime a durci progressivement sa répression – aujourd'hui féroce – contre les opposants politiques. On vous a déjà raconté sur Slate Afrique comment la surveillance des citoyens par la police secrète égyptienne s'apparentait dans une certaine mesure au livre «1984» de George Orwell, ou comment les autorités égyptiennes voulaient tenir pour responsables les parents de terroristes égyptiens.
Dans son dernier rapport sur la situation du pays, l'ONG Amnesty international dénonçait la répression du régime:
«La situation des droits humains s'est dégradée de manière continue et dramatique après la destitution du président Mohamed Morsi, en juillet 2013. Le gouvernement a imposé des restrictions sévères à la liberté d’expression, d’association et de réunion. Des milliers de personnes ont été arrêtées et placées en détention lors d'une vague de répression qui s'est abattue sur l'opposition; certaines ont été soumises à une disparition forcée».
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Mais dans leur justification de la menace sécuritaire qui plane sur le pays, les têtes pensantes du régime ont encore franchi une étape. Le pure-player égyptien Egyptian Streets rapporte mercredi 4 mai comment lors d'une conférence donnée à l'université du Caire, Salah Abdel Sadek, le chef des services de renseignement, a accusé le dessin animé Tom et Jerry de participer à la montée de l'extrémisme et de la violence dans le monde arabe.
Une censure fréquente
«Le dessin animé Tom et Jerry présente la violence de manière drôle et émet l'idée que, oui, je peux frapper quelqu'un... et je peux le faire sauter avec des explosifs. Ce discours devient naturel dans l'esprit du téléspectateur», a expliqué Abdel Sadeck, sans crainte du ridicule, avant d'ajouter quelques idées de même facture sur les jeux vidéo. «Cela est devenu très normal pour un jeune homme de passer de longues heures à jouer aux jeux vidéo, où il tue et fait couler le sang et est heureux de cela».
Egyptian Streets rappelle qu'en Egypte, la censure de films est ancrée dans le paysage, «principalement à cause des scènes sexuelles présentes dans de nombreux films». Par exemple, le film américain Le Loup de Wall Street a été réduit de 45 minutes dans les cinémas égyptiens: de nombreuses scènes portant sur le sexe et la drogue ont été coupées. Cependant, les autorités égyptiennes n'ont pour le moment pas annoncé que les aventures de Tom et Jerry feraient l'objet de censure. Ouf.