mis à jour le
Le lac Tchad va bientôt disparaître
Autrefois l'un des plus grands au monde, le lac Tchad est aujourd'hui victime du réchauffement climatique. En 1963, il s’étendait sur 25.000 km² partagés entre le Tchad, le Niger, le Nigeria et le Cameroun. Ces quatre pays sont toujours baignés par les eaux du lac, mais ce dernier ne mesure plus que 2.500 km². Soit une perte d’au moins 90% de sa superficie en une cinquantaine d’années. Les changements climatiques sont la principale cause d’un tel assèchement.
Le site Afrik.com reprend certains bilans scientifiques qui estiment que «les vingt prochaines années pourraient sonner le glas de celle qui était autrefois surnommée "la mer intérieure de l'Afrique"». Une hypothèse des plus alarmantes, surtout que 20 millions de personnes dépendent au quotidien de l’eau du lac, et 300.000 y vivent des ressources halieutiques.
Mais quand Alladji Bacar Sem, un pêcheur tchadien, montre le contenu de la marmite de riz qu'il fait mijoter à Franck Salin, l'envoyé spécial d'Afrik.com, celui-ci s'étonne:
«A l’intérieur du récipient, pas de carpe, de capitaine, ni même de tilapia. Pas un seul poisson. Il est plus rentable d’abandonner ses maigres prises aux acheteurs potentiels.»
Les riverains du lac, particulièrement au Tchad, sont les premiers à subir les conséquences de son assèchement, notamment la malnutrition.
«Mes deux enfants les plus jeunes sont morts. Il n’y a pas de nourriture», livre Fatime à l’hebdomadaire sud-africain Mail & Guardian. «Le lac s’est asséché et les arbres sont morts. Nos chameaux ne produisent plus de lait car ils n’ont plus d’herbe à manger. Nous voyons des carcasses d’animaux morts partout.»
Pour Roger Sodjinou, responsable de la nutrition au Tchad pour l’Unicef (principale organisation internationale d’aide à l’enfance), «il y a un problème grave et souterrain. Nos derniers chiffres montrent que 225.000 enfants meurent chaque année de malnutrition dans la ceinture africaine du Sahel». Et 4,3 millions d’enfants souffriraient de malnutrition chronique.
Reportage avec un pêcheur du lac Tchad (26 janvier 2011)
Face au manque de ressources, beaucoup préfèrent partir. A l'exemple d'Owye, le père de Fatime, exilé en Libye après la mort de son dernier chameau. Il fait partie de ceux qu'on appelle les «réfugiés climatiques», et ils sont de plus en plus nombreux à fuir un environnement devenu hostile.
Un rapport publié par la Banque asiatique du développement offre une vision de la migration climatique sous un angle bien différent: d’après le blog Eco(lo), ces déplacements de masse «peuvent aussi découler d’une stratégie rationnelle d’adaptation et s’avérer profitables aux populations concernées».
Alors que le nombre de réfugiés climatiques se situerait entre 200 millions et 1 milliard d’ici 2050, François Germene, chercheur à l’Institut du développement durable et des relations internationales, insiste sur la «nécessité de mettre en place des politiques migratoires appropriées […] pour éviter que les gens ne partent au dernier moment […] Bien gérées, les migrations climatiques peuvent être bénéfiques pour tout le monde, les régions d’origine comme les pays d’accueil et les migrants eux-mêmes».
Témoignage sur le problème des paysans devenus réfugiés climatiques en Afrique (14 novembre 2010)
Lu sur Afrik.com, Mail & Guardian, Unicef.org, LeMonde.fr