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Egypte - Un nouveau martyr du pouvoir militaire

La torture a fait une nouvelle victime en Egypte. Dans la nuit du 27 octobre, un jeune Egyptien de 24 ans est décédé à l’hôpital de Qasr el Eini au Caire. Essam Ali Atta Ali a succombé à ses blessures après avoir subi une baisse importante de la pression artérielle et une insuffisance cardiaque. Dans les geôles militaires, ce jeune homme aurait été torturé à mort, rapporte le quotidien égyptien Al Ahram Online.

Essam Ali Atta Ali écopait d’une peine de deux ans d'emprisonnement dans le service de sécurité maximale de la prison de Tora. Le 25 janvier dernier, il avait été jugé par un tribunal militaire qui l'accusait d'avoir occupé illégalement un appartement.

Retour en prison. Selon son voisin de cellule, les agents ont voulu punir Essam Ali Atta Ali, après avoir trouvé une carte SIM sur lui. Les gardiens lui auraient introduit des tuyaux dans la bouche et l’anus, provoquant une grave hémorragie.

Le frère du malheureux détenu, qui s’est rendu à l’hôpital, a déclaré aux médias qu'il présentait des signes de blessures graves. La mère d’Ali s’exprima également devant les médias pour leur rappeler que son fils est une victime de la brutalité policière et qu’elle ne trouvera pas le repos jusqu’à ce que ses bourreaux soient traduits en justice.

Ali avait quitté la prison pour rejoindre l’hôpital lorsque son état était devenu critique, rapporte un agent de la prison. Jeudi 27 octobre en fin de journée, Aida Seif El Dawla du centre El Nadeem pour la réhabilitation des victimes de tortures, apprend la nouvelle de sa mort sur Twitter et Facebook. Dès jeudi soir, une page Facebook (en arabe) a été créée en hommage à cette énième victime de la justice militaire et de la brutalité policière. Cette page «Nous sommes tous Essam Ali Atta Ali, martyr de la torture carcérale»  ressemble à celle créé en hommage à un autre jeune Egyptien, Khaled Said, âgé de 28 ans et victime de la brutalité policière à Alexandrie.

A 28 ans, Khaled Saïd avait diffusé sur Internet une vidéo montrant deux policiers se partageant de la drogue après un coup de filet. Arrêté dans un cybercafé de son quartier d'Alexandrie, il avait été mis à mort, en pleine rue, sous le regard de tous. La page Facebook «Nous sommes tous Khaled Saïd» avait été l’emblème de la lutte contre le régime policier.

Mais plus de huit mois après le départ d’Hosni Moubarak, la brutalité policière et la justice militaire demeurent toujours actives, au grand dam des activistes Egyptiens qui réclament depuis des mois la fin des tribunaux militaires et l’avènement d’une société civile.

D’une part, la répression, qu’elle soit de masse comme dans la nuit du 9 octobre contre les manifestants coptes au Caire, ou individuelle contre des Egyptiens critiques à l’égard du pouvoir militaire, demeure une pratique courante. Le sort tragique d'Essam Ali Atta Ali rappelle que la révolution égyptienne reste à faire.

Pour certains, le pouvoir exécutif, représenté par le Conseil suprême des forces armées (CSFA) n’est qu’un autre visage du régime passé. Les victimes de cette justice arbitraire et militaire se comptent par milliers. Le dernier en date, Alaa Abd El Fattah, un activiste égyptien en détention depuis le 30 octobre. Il est accusé d’avoir incité à la violence lors de la manifestation copte du 9 octobre dernier, devant Maspero, le bâtiment de la télévision publique. Or, de nombreux extraits télévisés montrent que la télévision d’Etat a joué un rôle de propagande. Une marche est organisée ce lundi 31 octobre à 19 heures au Caire pour demander la libération d'Alaa Abd El Fattah, qui est condamné à quinze jours de détention. A quelques semaines des élections législatives, se pose la question de la transition politique. Mohammed Hussein Tantawi, le chef du Conseil suprême des forces armées, ne semble pas prêts à lâcher le pouvoir, au regard des affiches à son effigie qui ornent les murs du Caire.

Lu sur Ahram Online

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