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Le printemps arabe, c'est pas bon pour le foot
De l'Egypte à la Tunisie en passant par la Libye, un vent de révolte a soufflé sur l'Afrique du Nord, chassant les dictateurs et mettant la région sens dessus dessous. Et le football dans tout ça?
En Afrique du Nord, le football a la gueule de bois. Les effets de la révolution se font encore sentir, notamment en Egypte et en Tunisie: Hosni Moubarak et Zine Ben Ali sont partis mais le ballon ne tourne plus rond.
L'Egypte et la Tunisie en crise
L'exemple le plus flagrant vient d'Egypte. En effet du côté du Caire, on a fait une croix sur la Coupe d'Afrique des nations 2012 (CAN) depuis bien longtemps. Triple champions d'Afrique en titre, les Pharaons n'ont pas plus survécu à la révolution, débutée en janvier, qu'aux mauvais résultats. Bilan, la sélection nationale n'a pas fini les éliminatoires de la Coupe d'Afrique et ce sont même les moins de 23 ans qui ont pris la relève pour les deux derniers matches pour des résultats mi-figue, mi-raisin : une victoire contre le Niger (3-0) a à peine permis de faire oublier la défaite en Sierra-Leone (2-1).
Mais c'est le championnat local qui reste le plus touché: mis entre parenthèse fin janvier, la Premier League égyptienne devait reprendre en avril. Mais les troubles qui ont heurté la rencontre entre le Zamalek et le Club Africain, en seizièmes de finale de la Ligue des Champions, ont jeté un voile sur la possible tenue d'un tel événement. Et le championnat s'est terminé, tant bien que mal, à huis clos alors que les matchs amicaux de l'équipe nationale, contre les Etats-Unis (en février) et le Brésil (en septembre), ont été purement et simplement annulés.
Même son de cloche en Tunisie. Seul point positif dans le marasme qui suit cet après-Révolution de Jasmin, les Aigles de Carthage se sont qualifiés in extremis pour la CAN 2012. Ils peuvent remercier le Tchad, auteur d'un but à la dernière minute de la dernière journée qui élimine le Malawi (2-2).
Mais tout ne prête pas à sourire à Tunis où le football tarde à retrouver sa place. Depuis le soulèvement populaire de la révolution de Jasmin, le retour de la Ligue 1 portait un fort symbole. Mais le championnat a été reporté, entre janvier et avril, et s'est finalement lui aussi terminé à huis clos.
La Libye retrouve le niveau international
Si l'Espérance de Tunis, sacrée pour le vingt-quatrième fois de l'histoire, brille en Ligue des Champions, les autres clubs sont à la peine. Même les grosses formations ont du mal à survivre. Les finances sont exsangues et les budgets demeurent modestes, de 500.000 € à 5 M€. Même l’Étoile du Sahel (ESS), huit fois championne de Tunisie et deuxième au terme de la saison 2010-2011, n'est pas à la fête, comme le soulignait Hamed Kammoun, le président de l'ESS, pour expliquer la réduction de 50% du prix des abonnements l'année dernière:
«Il nous manque 1 M€, sur un budget de 4,5 M€, pour finir la saison. Notre financement vient principalement des municipalités, des paris sportifs, de la télévision. Or nous n’avons plus de maire, l’argent des paris n’arrive pas et la télévision nationale ne peut plus payer... La Belgique vit bien sans gouvernement depuis dix mois, pas nous. Cela dit, si le championnat ne redémarre pas vite, j’ai peur que la saison se termine là.»
Le football a depuis repris ses droits malgré les problèmes de la Fédération et l'annulation de la Coupe de la Ligue. Même le championnat a été touché puisqu'il n'y a pas eu de relégation au terme de la saison alors que certains joueurs, notamment ceux du Stade Tunisien et du Club Africain, ont fait grève.
Mais c'est bel et bien au sein de la FTF (Fédération tunisienne de football) que se trouve toute la solution. Et tous les maux. Depuis plusieurs semaines, l'instance dirigeante du football tunisien se déchire. Au point que la FIFA a dû taper du poing sur la table afin d'éviter une ingérence gouvernementale et mettre un terme aux querelles d'égos et à l'instabilité récurrente qui mine la reconstruction du football tunisien.
En Libye, la sélection a su profiter d'un «effet Révolution» pour se qualifier pour la CAN 2012. Un sacré exploit pour les Verts, absents de la compétition depuis 2006, qui n’ont pas joué tous leurs matches «à domicile» et ont du composer une équipe avec des joueurs éparpillés à travers le monde.
«Nous dédions notre qualification à tous les Libyens, à notre révolution!»
C'est par ces mots que le gardien vétéran de la Libye, Samir Aboud, 39 ans, a salué le ticket arraché par son équipe pour la Coupe d'Afrique des nations, organisée au Gabon et en Guinée équatoriale (21 janvier-12 février).
Nicholas Mc Anally
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