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Ce génocide que l'Allemagne refuse toujours de reconnaître en Namibie
On oublie souvent que l'Allemagne est une ancienne puissance coloniale, d'une part parce qu'elle n'a commencé à occuper des territoires situés hors du continent européen qu'après son unification en 1871, soit plus de trois siècles après la France et l'Angleterre, d'autre part parce son empire colonial, concentré sur le continent africain, était bien moins vaste que ceux de ses rivaux.
La colonisation allemande a été particulièrement sanglante en Namibie, occupée entre 1884 et 1915, où une révolte des peuples héréros et namas a été matée entre 1904 et 1907 par l'armée allemande, faisant plus de 100.000 victimes chez les deux ethnies. Dépêché sur place, le général allemand Lothar von Trotha avait édicté dans son «ordre d’anéantissement» que «chaque Héréro se trouvant sur le sol allemand sera fusillé».
Trente ans avant l'avènement du nazisme, plusieurs milliers d'Héréros et Namas furent envoyés dans des camps de concentration où leur geôliers les laissaient mourir de faim, de soif et de maladie. Les crânes des victimes étaient ensuite envoyés en Allemagne, où ils servaient d'objets d'études «scientifiques» aux tenants des théories racistes. Depuis 2011, le gouvernement allemand a remis plusieurs dizaines de ces ossements à la Namibie.
Mais 100 ans après avoir perdu sa colonie, conquise durant la Première Guerre mondiale par les troupes de l'Union sud-africaine, l'Allemagne n'a officiellement toujours pas reconnu l'existence de ce génocide, comme le dénonce le quotidien allemand Die Tageszeitung. À cette occasion, une délégation namibienne composée de représentants des peuples héréros et namas s'est rendue cette semaine à Berlin pour demander des excuses officielles, mais n'a pas obtenu d'entrevue avec le président Joachim Gauck ni avec aucun représentant du gouvernement allemand:
«Officiellement, le gouvernement fédéral souligne que son interlocuteur est le gouvernement namibien. Officieusement, on doute de la représentativité de la délégation qui s'est rendue en Allemagne. Il y aurait trop de représentants rivaux du peuple héréro, explique un diplomate haut placé.»