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Manoubia Bouazizi fait le geste de la victoire après avoir voté. Reuters/Jamal Saidi
Manoubia Bouazizi fait le geste de la victoire après avoir voté. Reuters/Jamal Saidi

Victoire des islamistes, sans regret!

En moins de deux jours, les médias occidentaux sont passés des youyous aux regrets. Pourtant, la victoire des islamistes d'Ennahda, c'est le jeu de la démocratie.

Mise à jour du 26 octobre, 10h30: Selon les résultats officiels partiels annoncés le 25 octobre par la commission électorale tunisienne Isie, Ennahda prend le dessus sur toutes les autres formations aux élections à l’Assemblée constituante qui comptera 217 membres. Le parti islamiste sort en tête dans 9 des 27 circonscriptions et remporte 28 des 55 sièges. Ennahda dispose déjà de 9 sièges obtenus à l’étranger.

***

Etrange son de cloche le 25 octobre au matin, certains en viendraient presque à regretter Ben Ali. Les Tunisiens ont voté ce dimanche pour des élections, où 117 partis étaient en lice. Mais la victoire du parti islamiste Ennahda glace les perceptions occidentales de la démocratie. D’autant plus que la victoire dépasse les frontières de la Tunisie, le parti Ennahda a raflé la majorité des sièges alloués aux Tunisiens de l’étranger.

Ennahda, le parti politico-religieux présidé par Rached Ghannouchi, serait vainqueur du vote des Tunisiens de l'étranger pour l'Assemblée constituante, en obtenant 9 sièges sur 18, lit-on sur le magazine Tunivisions.

Les islamistes se veulent rassurant

Ce matin, les membres du parti islamiste n’ont pas tardé à communiquer sur leur victoire tout en rassurant les partenaires économiques de la Tunisie. L’épouvantail Ennahda  veut se refaire une beauté pour jouer enfin dans la cour des grands après plusieurs décennies de silence.

«Nous voulons rassurer nos partenaires économiques et commerciaux, ainsi que tous les investisseurs: nous espérons très rapidement revenir à la stabilité et à des conditions favorables à l'investissement», a déclaré à la presse Abdelhamid Jlassi, directeur du bureau exécutif du parti islamiste.

Qu'en pense le voisin algérien?

«Fini donc le romantisme et ses barricades et aussi ses coups de gueule. Ceux qui ont affronté les dictatures et réussi à les chasser rêvaient de changement. Ils ont eu gain de cause, leur mérite est incontestable et leurs sacrifices énormes. Mais la politique, se rendent-ils compte, c’est bien autre chose», commente le quotidien algérien El watan.

Les avis sont partagés sur cette victoire. La victoire des islamistes à des élections libres, les Algériens l’ont connues. Le 26 décembre 1991, le FIS, le Front islamique du salut, arrivait en tête du premier tour des élections législatives en Algérie. Une décennie noire qui a marqué de nombreux Algériens. Ce qui explique peut-être le pragmatisme de l’éditorialiste Mohammed Larbi d’El Watan.

«Tout ça pour ça», se demandent ce matin de nombreux Tunisiens. Mais l’éditorialiste d’El Watan de rappeler l’un des fondements de la démocratie, l’existence d’un pouvoir et d’un contre pouvoir.

Qui dit pouvoir, dit contre pouvoir

Ce jeu démocratique, le parti progressiste espère bien y participer. Même si il a rapidement pris note de sa défaite, il entend bien jouer le rôle de contre pouvoir dans la Tunisie post Ben Ali. «Nous ne devons pas avoir peur de la démocratie tant que nous œuvrons tous pour l’intérêt suprême du pays et du peuple», a confié  Najib Chebbi, le président du parti démocratique progressiste. Comme dans toutes élections, se pose la question des alliances et le parti a déjà appelé à la formation de fronts démocratiques au sein de l’assemblée constituante.

L'opposition s'exerce également dans la rue. Les résultats étaient à peine annoncées que des Tunisiens mécontents des premières tendances, donnant le parti islamiste en tête, sont descendus dans la rue. «Des dizaines de manifestants ont commencé à se réunir devant le palais des congrès. Ils prétendent qu’il y a beaucoup de fraudes», raconte le site tunisien Tuniscope.

«Le mur du silence est tombé»

Autre ton sur le site tunisien Tekiano qui laisse la parole à ses internautes qui mêlent raillerie et cynisme avec brio.

«Je remarque que certains préfèrent les 99% de Ben Ali aux 31% pour Ennahdha»

Un autre de tweeter:

«Allo la France, don't panic avec la Tunisie, Ennahda ce n'est pas les amis libyens de Sarkozy, c'est juste la droite populaire tunisienne»

Le journaliste de conclure: 

«le mur du silence est tombé. Nos concitoyens, fiers d’avoir massivement accompli leur devoir électoral, ne s’en laisseront plus conter.»

La peur, le lit de l'islamisme?

Retour en Algérie, car c’est là que la confiance à l’égard des Tunisiens est la plus grande.  

«Sur Facebook, un ami a rapporté cette phrase d'une militante du Parti démocratique moderniste (PDM): «Ça ne fait que commencer. On va se battre». Il a ajouté en guise de commentaire: «En un mot, plus vous paniquez et plus ceux d'en face vont bomber le torse!», raconte l’éditorialiste du quotidien d’Oran.

Nadéra Bouazza

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Nadéra Bouazza

Nadéra Bouazza. Journaliste à Slate Afrique

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