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La place Tahrir, ingrédient secret d’une bonne révolution?

La place Tahrir du Caire (Egypte) serait parfaite pour les révolutions —et pas seulement parce qu'en arabe, tahrir signifie libération. C’est du moins la thèse développée par Nezar Al-Sayyad, professeur d’architecture, d’urbanisme, d’histoire urbaine et président du Centre pour le Moyen-Orient à l’université de Berkeley (Californie).

Ce natif du Caire est l'auteur d'un ouvrage intitulé Cairo: Histories of a City (Le Caire: histoires d'une ville), édité par l’université d’Harvard.  

Au cours d’une interview livrée à dwell, magazine américain d'architecture et de design, il revient sur l’histoire de la place et de ses «spécificités» urbaines et architecturales.

D’abord, inqdique-t-il, «les 23 rues de la place qui vont dans toutes les directions» ont contribué au succès des manifestations, car l’absence «d’un grand boulevard pouvant être bloqué par les forces de police» a facilité l’éparpillement de la foule.

De même pour le centre-ville, qui n’est pas très grand et «dont une rue conduit de part et d’autre de la place Tahrir».

La configuration des lieux ne date pas d’hier; elle est intacte depuis 140 ans, depuis le règne de «l’impitoyable Ismail». Le professeur explique qu’après un séjour à Paris, le dirigeant « a vu les changements intervenus sous Napoléon III avec Haussmann, et a voulu refaire Le Caire à l’image de Paris».

Néanmoins, la place Tahrir n’en pas vraiment une place au sens strict du terme:

«Tout un côté n’est pas droit puisqu’il bordé par le Nil. Et la place n’est pas entourée de toutes parts par les immeubles, mais juste d’un côté». D’après lui, c’est surtout «un espace mal défini constitué de 5 ou 6 espaces adjacents, mais en réalité personne n’y prend garde.» 

Le professeur explique également qu’il existe d’autres places baptisées Tahrir à travers le monde. Par exemple à Tripoli, la capitale libyenne, à Damas, capitale de la Syrie, et à Sanaa, capitale du Yémen.

Les manifestations actuelles à Sanaa se font sur le modèle égyptien, sur leur place Tahrir. Pour tirer les bonnes leçons des évènements en Egypte et contenir les manifestations, «le régime yéménite envoie ses partisans sur la place, non pour chasser directement les manifestants mais pour s’installer, planter des tentes, et ainsi les inciter à aller ailleurs», conclut Nezar Al-Sayyad.

Reste à voir si le résultat des manifestations égyptiennes de la place Tahrir, comme son nom, s’exportera.

Lu sur io9, dwell