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N'enterrez pas Sarkozy trop vite (Màj)
Le principal enseignement des primaires du Parti Socialiste Français: rien n'est perdu pour Sarkozy.
Mise à jour du 22 octobre 2011: Le candidat du Parti socialiste à l'élection présidentielle de 2012 en France a été investi ce samedi à Paris. François Hollande est arrivé vainqueur, le 16 octobre, de la primaire citoyenne organisée par son parti et les Radicaux de gauche.
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François Hollande a remporté la primaire socialiste: comme disent les arabes: «mektoub» (C’était écrit)! Arnaud Montebourg a pris du galon et s’est imposé, lui, comme une figure désormais incontournable de la gauche: comme dit un proverbe camerounais, particulièrement apprécié d’Alain Juppé: «Peu importe la hauteur à laquelle on tombe, l’important est celle à laquelle on rebondit» (cela dit, nous aimerions bien voir à quoi ressemble un macchabée qui rebondirait)!
En Afrique, Arnaud Montebourg serait en terrain conquis. Il fait partie de la famille élargie, on le «maîtrise» et on l’aime. Même s’il ne s’est pas encore acquitté de sa dette. L’escroquerie à la dot est un délit sérieux! Depuis qu’il partage la vie de l’une des nôtres, une descendante d’esclaves, la très talentueuse Audrey Pulvar, qui, sur les plateaux de télévision, sait leur tenir la dragée haute aux Français de France, depuis il n’a pas daigné se manifester.
Une chance que la dot, ça n’est pas seulement avant le «mariage», l’obligation de prise en charge de la belle-famille demeure tant que dure l’union. D’ici à ce qu’il devienne le tout premier président de la sixième République française, les Africains ne doivent donc pas désespérer de le voir rentrer dans le droit chemin, en les rétablissant dans leurs droits. Qui paie sa dot s’enrichit, dixit la sagesse populaire.
«Nono la bourde», c’est l’ancien porte-parole de Ségolène Royal lors de la présidentielle de 2007, c’est encore ce «jeune lion» (la périphrase métaphorique est de lui) qui avait scandalisé les «éléphants» roses et s’était mis à dos toute la gauche, pour avoir offensé François Hollande qu’il avait présenté, dans une boutade qui était tombée à plat, comme «le seul défaut» de la candidate du parti socialiste du scrutin d’alors.
Les temps ont bien changés! Il y a Hollande, qui est devenu la principale qualité de la gauche, et Arnaud lui-même qui, à défaut d’être le premier qu’il voulait être, a pu devenir un joker, le principal atout, dans l’entre-deux tours, du premier, dans cette primaire où Ségolène royal s’est lamentablement effondrée: mektoub! C’est en rampant que le député et président du conseil général de Saône-et-Loire avançait. Meilleur espoir de la gauche, meilleur second rôle, meilleure révélation de la primaire, on ne l’avait pas vu venir du tout.
Quand les François votent pour Hollande
Martine Aubry, qui a, dans un premier temps, essayé de faire passer son principal challenger pour un inexpérimenté auquel ferait défaut la pratique de la gestion des affaires publiques, a finalement réalisé que les qualités attachées à ce défaut pouvaient être très appréciées et, avec l’énergie du désespoir, en a parlé comme d’un homme «du système[…]». Il y a si longtemps que la gauche n’a pas gouverné qu’il sera de plus en plus difficile de trouver des candidats expérimentés, dans l’acception « aubrienne » du terme, c’est-à-dire nantis d’une expérience ministérielle.
La vérité, selon nous, est que Hollande n’a pas de stature européenne ni internationale. Il n’a jamais été ministre et, de toutes les qualités qui, il n’y a guère de temps, faisaient de Strauss-Kahn le favori de la course à la présidentielle, aucune ne lui est unanimement reconnue. C’est par rapport à Sarkozy qu’il a gagné une crédibilité; son principal mérite étant d’être le contraire de ce dernier, du moins l’idée que la majorité de ses supporters se font d’un président moins «strass et paillettes».
En perdant des kilos, il avait gagné plusieurs points dans les sondages, le lien de causalité n’est certes pas évident: il reste que l’image de Français «normal», si elle peut séduire ceux qui voteront pour sanctionner, ne sera pas suffisante pour rallier à sa vision ceux qui votent parce qu’ils ont adhéré à un programme.
Par-delà l’arithmétique des sondages, par rapport à la teigneuse Martine Aubry (ceci n’a rien de sexiste), François Hollande est le candidat le plus «mou» (cela n’a rien de sexuel) dont eût pu rêver l’actuel hôte de l’Elysée (ce qui n’a rien de fantasmatique).
La primaire, qualifiée par Mélenchon de « PMU politique », peut produire des résultats en trompe-l’œil. Elle désigne le candidat d’un parti, quand la présidentielle est la consécration d’un homme parfois quasi-transcendant, presque au-dessus de son propre parti. Ce mécanisme interne de démocratie partisane, relativement nouveau dans le contexte français, n’ira pas sans coup de théâtre, et peut donc distraire au candidat choisi de nombreux électeurs qui eussent préféré Montebourg ou Aubry, dont les profils respectifs, à tous points de vue, sont énormément divergents.
Cette hypothèse n’est évidemment pas étayée par la primaire socialiste où l’on a relevé un engouement accru au second tour, dans les urnes et dans les scores d’audience… Mais c’est dans le cadre plus large d’une présidentielle qu’elle pourrait porter à conséquence. En 2007 déjà les sondages avaient été assez tôt en faveur de Royal.
Le profil est-il un critère qui joue uniquement à temps partiel, au point que, après le 06 mai 2012, seule importera la couleur politique du candidat? Rien n’est moins sûr. D’ailleurs, si c’est le cas, Sarkozy, plus que jamais, conserve ses chances. Le sénat a viré à gauche? Mektoub! Cela aurait bien fini par arriver quand même… Malheur, croit-on, à celui par qui cela est arrivé.
Mais au fait, le mécontentement des Français, s’il est légitime, s’adressera-t-il au seul président de la République? Soit! Est-ce encore Nicolas Sarkozy qui dirige l’Australie, le Japon, l’Italie, les Etats-Unis d’Amérique, où ont proliféré des millions d’«indignés » qui reprochent à leurs gouvernements respectifs tout ce que la France reproche à son président actuel?
La France a toujours eu depuis De Gaulle des hommes d’exception à sa tête. Il est peu probable que du jour au lendemain, sans avoir observé une tendance lourde sur le long terme, les Français aspirent soudainement à un citoyen-président plutôt qu’à un président-roi. Le slogan de Hollande, passé au crible de la campagne présidentielle, pourrait fort bien se retourner contre lui.
Car pour être «normal», il n’en est pas moins riche et n’est pas représentatif de «la France qui se lève tôt». Cette France qui n’est pas, comme lui, imposée à l’ISF, et ne cumule pas, comme lui, les mandats électifs et des indemnités tous azimuts. Aux yeux des classes populaires, la richesse qu’on cache vaut-elle mieux que celle qu’on expose?
Nul ne saurait dire si une campagne électorale bien faite sera suffisante pour inverser la tendance «chutière» de cette droite qui est plutôt mal partie. La confrontation elle-même sera à l’avantage de Sarkozy (Mektoub!), qui est un bien meilleur tribun, sait être combatif, et a un bilan hautement défendable, eu égard au contexte international dont la France ne pourra l’abstraire au moment de l’appréciation de ce quinquennat.
Avec le recul et la décantation que permet une campagne présidentielle, Sarkozy, alors jeune papa sage comme une image, sera secondé par une armée de fidèles que soudera entre eux le sentiment de leur fragilité.
Si Nicolas Sarkozy n’a pas le profil du Français normal, il a davantage que Hollande le profil d’un président normal. S’il ne pourra pas éviter la sanction d’une grande partie de son électorat, qui se traduira sans doute par une abstention, il est probable que la droite, dans l’entre-deux tours, s’extrême-droitisera commodatis causa (par commodité), comme on l’a vu par le passé, avec les petits arrangements entre Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen.
François Bayrou pourrait bien être contraint de se rallier au second tour à Sarkozy, on le voit mal se ranger derrière Hollande, qui devra accentuer son ancrage à gauche, face à une Eva Joly en forme, un Mélenchon en relatif état de grâce, et ce bon bougre de Montebourg, qui monte, monte, monte, et voudra bien peser dans la balance socialiste des idées, pour la promotion de sa démondialisation, ce « juste échange » accentué et audacieux.
Bayrou donc, mais déjà Villepin qui est non partant, Borloo qui s’est désisté, forcément en faveur de Sarkozy… En somme, l’issue pourrait bien dépendre des candidats qui viendront en troisième, voire en quatrième position au premier tour: rien n’est couru d’avance.
N’en déplaise à Calixthe Beyala
Calixthe Beyala est cette écrivaine, amoureuse de peinture romantique, au point d’avoir fait sienne la réflexion d’Eugène Delacroix, quand il énonce que les peintres les plus originaux ont été les plus appliqués à imiter. Elle s’est donc abondamment servie dans la prose d’autres écrivains, souvent moins doués, mais elle l’a fait avec talent, elle l’a fait parce qu’elle avait du talent.
Ce n’était pas une démarcation sauvage, du reste toute écriture n’est-elle pas réécriture ainsi que le postulait Barthes? Son erreur, récemment, a notamment été de croire qu’elle pouvait être pour Michel Drucker autre chose qu’une brillante écrivaine, une femme plantureuse.
Le journaliste Pierre Assouline et le chroniqueur Eric Naulleau (le premier l'a accusé de plagiat, le second a «massacré» l'un de ses livres sur une émission de télévision) n’enlèveront jamais rien à son mérite qui est assez grand, mais cette fixette de la Francophonie, cet antisarkozysme primaire, ces lubies d’écrivaine déclinante, sont autant d’occasions supplémentaires d’être ridiculisée. Les choses sont plus compliquées qu’il y paraît. Les mots suffisent à faire un bel écrivain, pour être Secrétaire général de la Francophonie, pour peser sur l’échiquier politique français, cela lui fait une belle jambe.
Il faut piquer pour la réveiller cette belle «Afrofrançaise» (kécécèkeça Afrofrançaise? Sans doute une habitante de la Françafrique!), qui a créé le MAF (Mouvement des Africains-Français), lobby d’immigrés «efficace et pas cher» qui apporte son soutien à François Hollande. Lequel a affirmé lui-même avoir reçu un mandat «d’une partie» des votants. Lapsus?
La belle Calixthe Beyala est contre l’ingérence française dans les dictatures africaines. Pourquoi donc en veut-elle à Sarkozy qui a laissé une souveraine paix à Paul Biya, président de son pays d’origine, et lui aurait même délégué un barbouze français, pour l’aider à se maintenir manu militari, au cas où ne suffirait pas la vox populi traduite dans les urnes, et contestée par les empêcheurs de tourner en rond ? Aime-t-elle la Côte d’Ivoire et la Libye davantage que son Cameroun natal?
N’en déplaise à Calixthe Beyala, les intérêts catégoriels de la communauté africaine de France ne seront pas décisifs, le sens du vote ne dépendra pas de la désaffection vis-à-vis de Sarkozy de nos «frères» africains qui se considèrent comme des Français «plus républicains» (sic) que les autres.
Le vote résultera, comme dans toute démocratie, de ce que la majorité (50% + 1 voix) aura décidé au soir du second tour de la présidentielle de 2012: mektoub! D’ici à 2012, tant de choses peuvent encore se passer, on n’en est pas à un scandale ou une surprise près, rien n’est exclu, sauf de vendre la peau de Sarkozy avant de l’avoir « TUER ».
Eric Essono Tsimi
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