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Tunisie - Des extrémistes saccagent un cinéma

A Tunis, des fanatiques religieux ont envahi dimanche 26 juin 2011, en pleine après-midi, la salle de cinéma Afric’Art, située à deux pas de l’avenue Bourguiba, rapporte Tunisie Focus. Pour la première fois depuis la révolution de janvier, la culture est directement visée par la censure religieuse.

D’après Tunisie Focus, le ciné-club, qui avait pour objectifs d'apprendre aux jeunes à «regarder» un film, à développer l’esprit et le vocabulaire critiques et à nourrir les cinéphilies, a vu une vingtaine d’individus, pour la plupart barbus ou masqués par des cagoules, élever des drapeaux et des banderoles portant des inscriptions religieuses et scander des slogans du type:

«Le peuple est musulman et ne se résignera jamais», «le peuple demande l’incrimination de l’athéisme», tout en qualifiant l’un des films présentés d’«œuvre de mécréant», selon l'agence Tunis Afrique Presse.  

Selon Tunisie Focus, ces individus auraient pénétré de force dans la salle de cinéma, «saccagé le matériel», «défoncé les portes», «menacé les organisateurs» et «terrorisé les participants à la rencontre culturelle: "Touche pas à nos créateurs"». La violence a atteint son paroxysme lorsqu’un groupe s’est introduit dans la salle de projection en proférant des menaces de mort au public qui envisageait de visionner les films.

Les forces de police, étonnament lentes compte tenu de la proximité de la salle avec le ministère de l’Intérieur, ont fini par interpeller, usant de gaz lacrymogène, 11 agresseurs sur la vingtaine présente et sécurisé dans la soirée les alentours du cinéma.

Reste à déterminer l’appartenance idéologique et politique des vandales, dont l'organisation éloigne d'ores et déjà l'éventualité d’un acte indépendant. 

La salle en question, réputée pour ne pas entretenir de provocation mais pour revendiquer un refus de la censure et de toute forme de pression, était sur le point, dans le cadre d’un événement programmé par le collectif Lam Echaml en collaboration avec l’Institut arabe des droits de l’homme, de projeter deux films: Ni Allah, ni maître de Nadia El Fani et En attendant Abou Zayd de Mohammed Ali Attassi.

Même si les premiers reflexes ont été d’attribuer ces actes de violences aux partis politiques islamistes, le site Kapitalis a interrogé Zied Daoulatli, membre du bureau exécutif du parti Ennahdha, qui dément toute implication:

«Nous condamnons fermement cette violence et nous allons publier un communiqué en ce sens», a-t-il déclaré.

Daoulatli a en outre mis en garde sur les récidives potentielles dans les prochains mois de ce type d’action emmenées par des extrémistes religieux:

«Nous avons des informations selon lesquelles des groupes d’extrémistes, dont beaucoup portent la barbe, préparent des actions comme celle d’aujourd’hui pendant l’été et durant ramadan», a indiqué ce membre d'Ennahdha.

Lu sur Tunisie Focus, Kapitalis, Tunis Agence Afrique Presse