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Abdelaziz Bouteflika lors d'une cérémonie militaire, Cherchell, juin 20012 / REUTERS
Abdelaziz Bouteflika lors d'une cérémonie militaire, Cherchell, juin 20012 / REUTERS

Algérie: Bouteflika, l'otage d'une oligarchie militaire accrochée à ses privilèges

Et le risque, c'est qu'il finisse comme naguère finit Habib Bourguiba.

A un mois de la présidentielle en Algérie, le landerneau politique est en pleine ébullition. C’est une véritable veillée d’armes au sein des états-majors des partis engagés dans la course pour la conquête de la magistrature suprême. Déjà, l’heure est aux grandes manœuvres et ce, avant même l’ouverture officielle de la campagne prévue pour le 23 mars. Au total, six candidats sont dans les starting-blocks dont le président sortant, Abdelaziz Bouteflika, candidat à un quatrième mandat.

Main de fer

L’homme qui avait disparu des écrans depuis son retour de Paris où il était hospitalisé des suites d’un accident vasculaire cérébral (AVC), n’a publiquement réapparu que le 4 mars dernier où on le voyait, le visage émacié et fatigué, les mains tremblotantes, en train de remettre sa candidature au président du Conseil constitutionnel. Et depuis, l’homme n’a plus fait de déclaration publique, laissant la tâche à ses hommes liges qui serinent à qui veut les entendre que Boutef, bien plus que tout autre Algérien, est apte à diriger le pays.

En fait, on ne le sait que trop bien, le président Bouteflika est malade et sénile au point que l’on se demande, par moments, si l’homme jouit encore de toutes ses facultés. Car même jeune, on ne se remet pas aussi facilement d’un AVC, n’en parlons pas d’un presque octogénaire comme Bouteflika qui, depuis plus de quinze ans, dirige son pays d’une main de fer. La preuve est que Boutef n’a jusque-là pris part à aucun des meetings organisés par son parti dans la perspective de la présidentielle du 17 avril prochain. C’est un comité composé de neuf lieutenants qui battront campagne à la place de Boutef, celui-là même que l’on dit capable de présider aux destinées du peuple algérien.

Un scénario qui n’est pas sans rappeler le cas de la Tunisie où, bien que souffrant, le président Habib Bourguiba, avec la bénédiction de l’armée, a été élu président avant d’être déposé quelques jours après son élection. Sans doute Bouteflika risque-t-il de finir comme Bourguiba. Et ceci pouvant expliquer cela, on comprend pourquoi l’homme a décidé d’envoyer à la retraite un certain nombre d’officiers supérieurs qui pourraient constituer une menace pour son régime. Est-ce là une solution?

Huis clos

Evidemment non, puisque l’histoire nous enseigne que la plupart des coups d’Etat perpétrés sur le continent africain l’ont été, dans leur grande majorité, par des officiers subalternes. Donc, comme le dit la maxime, casser le thermomètre ne fait pas baisser la fièvre. La solution pour Bouteflika est de quitter le pouvoir pendant qu’il est temps, s’il ne veut pas, demain, sortir par la fenêtre, lui qui, quoi que l’on dise, a contribué à hisser l’Algérie au rang d’une puissance économique et militaire dans la sous-région. C’est dire que cette candidature est de trop; elle est, pour ainsi dire, un anachronisme du siècle. Car, comment une personne qui ne peut pas se tenir debout, comment une personne dont la lucidité même est mise en doute, comment une personne, pour tout dire, qui parle à peine, peut-elle prétendre aux hautes fonctions d’un Etat, comme si l’Algérie était en manque de compétences? C’est tout simplement inconcevable. Mais à l’analyse, on se rend bien à l’évidence que le président Boutef lui-même n’est que l’otage d’une oligarchie politico-militaire qui, pour rien au monde, ne veut perdre les privilèges dont elle jouit depuis une quinzaine d’années. C’eût été dans un autre pays d’Afrique noire, la France se serait invitée au débat, en s’efforçant de siffler la fin de la recréation. Mais qui connaît l’historique des relations entre Alger et Paris, sait que la France porte des gants quand il s’agit de parler de l’Algérie. Dès lors, on comprend pourquoi, visiblement résigné, le peuple algérien vit à huis clos son drame.

Boundi Ouoba

Cet article a d’abord été publié dans LePays.bf

Boundi Ouoba

Journaliste burkinabé.

Ses derniers articles: Joseph Kony, un type insaisissable  Otage des militaires  Boni Yayi, capitaine d'un bateau à la dérive 

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