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Egypte: En 2014, on entendra encore parler des Frères musulmans.
L'organisation, désormais qualifiée de «terroriste» par le pouvoir intérimaire égyptien, refuse de capituler.
L’Egypte est fortement divisée, et sous tension, en cette fin d’année 2013. La récente décision du pouvoir intérimaire égyptien de classer l’organisation des Frères musulmans comme «organisation terroriste» a provoqué une série d’attaques à travers le pays, notamment au Caire, la capitale. Dimanche, un attentat a frappé un bâtiment du renseignement militaire dans la province de Charqyia, dans le delta du Nil, et blessé quatre militaires chargés de la protection du site. L’armée a aussitôt dénoncé «la poursuite des lâches actes terroristes».
Les responsables des services de sécurité ont également fait savoir qu’une bombe avait été désamorcée aux abords de l’université de Damiette, sur la côte méditerranéenne.
Dimanche toujours, de nouveaux heurts opposaient police et étudiants pro-Morsi dans la prestigieuse université islamique d'Al-Azhar. Des responsables de la sécurité ont rapporté qu'une salle d'examen avait été incendiée, accusant les étudiants membres des Frères musulmans, et ajouté que 27 «émeutiers» avaient été arrêtés.
Plus tôt dans la semaine, mardi, un attentat suicide à la voiture piégée contre la police avait fait 15 morts à Mansoura également dans le delta du Nil, et jeudi, une bombe a blessé cinq personnes dans un bus au Caire.
L’Egypte fait face à une vague de violence depuis la destitution de Mohammed Morsi, premier président élu du pays, le 3 juillet 2013, et son arrestation par l’armée.
D'une part, l'implacable campagne des autorités dirigées de facto par les militaires contre les islamistes pro-Morsi a fait plus d'un millier de morts et des milliers d'arrestations.
D'autre part, des djihadistes, qui n'ont pas de lien connu avec les Frères musulmans et critiquent même ouvertement leur entrée dans le jeu démocratique, mènent des attaques qui ont tué plus d'une centaine de policiers et de soldats. D'abord cantonnées à la péninsule désertique du Sinaï, ces violences ont débordé aux villes proches, jusqu'à gagner Le Caire.
L'attentat contre un QG de la police à Mansoura —condamné par les Frères musulmans et revendiqué par un groupe djihadiste disant s'inspirer d'Al-Qaïda— a toutefois marqué un palier dans les violences.
L'attaque a choqué en Egypte par l'ampleur des dégâts qu'elle a provoqués: des rues entières ravagées et des immeubles totalement soufflés par l'explosion.
Mais cet attentat a également constitué un tournant dans le pays: les autorités, qui accusent régulièrement les Frères musulmans d'aider et de financer les attentats contre les forces de l'ordre sans toutefois en apporter la preuve, ont incriminé la confrérie et l'ont déclarée dans la foulée «organisation terroriste».
Les centaines de milliers de Frères musulmans risquent jusqu'à cinq années de prison s'ils manifestent ou sont découverts en possession d'écrits ou d'enregistrements de la confrérie.
Durant les jours précédents, et en particulier vendredi, jour traditionnel de mobilisation, de nombreuses manifestations à travers le pays ont bravé la campagne des autorités intérimaires contre la confrérie vieille de 85 ans et déjà passée par la clandestinité.
Les dirigeants de la confrérie risquent désormais la peine capitale, et le journal du mouvement, Liberté et Justice, a été définitivement interdit, de même que le parti du même nom, pourtant vainqueur de toutes les élections organisées depuis la révolte ayant chassé le président Hosni Moubarak en 2011.
En destituant Mohammed Morsi, les militaires ont promis une «transition démocratique», dont la première étape est un référendum constitutionnel les 14 et 15 janvier avant des élections législatives et présidentielle mi-2014.
Slate Afrique avec AFP