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L'avenir envolé de la jeunesse zimbabwéenne
Bien formés, les jeunes Zimbabwéens peinent pourtant à trouver du travail. Témoignages.
Robert Mugabe prêche dans le désert. Face à une jeunesse qui a le départ pour seule oasis, ses appels au patriotisme tiennent du mirage. Cela fait maintenant 33 ans que le père de l’indépendance est au pouvoir et l’avenir du Zimbabwe ne cesse de s’échapper comme le sable dans la main. A chaque embellie, succède des mesures dramatiques qui replongent le pays dans le marasme. Dernière lubie en date: la mise au ban des commerçants étrangers dans le cadre de la politique d’indigénisation, qui n'est pas sans rappeler la dramatique expulsion des Indiens de l’Ouganda par Idi Amin Dada en 1972.
«L’indigénisation, pourquoi pas, mais ça ne peut marcher que s’il y a de l'argent se désole Danai Rsomo, une étudiante de l’école d’ingénieurs de l'université Hartfield à Harare, dans un entretien à The Zimbabwean. Pour que je puisse monter ma propre entreprise, il me faut beaucoup de capital et une expérience que je n’ai pas. La situation est déplorable au Zimbabwe et je suis déterminée à partir pour mettre en pratique l’expertise que j’ai acquise ici. J’espère pouvoir revenir et monter mon business dans une dizaine d’années.»
Si l’économie a retrouvé un certain dynamisme depuis le crise économique de 2008, les opportunités pour les jeunes sont toujours rares. Les exportations, dopées par le secteur minier ne fournissent pas d’emplois à une main-d’œuvre pourtant qualifiée. Le secteur éducatif performant du Zimbabwe —classé à la trentième place mondiale par l’index de compétitivité du World Economic Forum—, ne permet pas aux nouveaux diplômés de trouver du travail légalement: seuls 22% des travailleurs âgés de 16 à 18 ans ont un emploi déclaré alors que 3,7 millions de zimbabwéens vivotent dans le secteur informel.
«Mes parents ont investi dans mon éducation, et ce serait en faire mauvais usage que de traîner dans la rue comme le font la majorité des diplômés. Je suis en train d’envoyer ma candidature un peu partout, à Dubai, en Australie en Afrique du Sud et en Namibie où les perspectives d’emploi sont meilleures» raconte Said Darell Manyonwa, qui a étudié l’économie à l’Université de Highfield d’Harare.
Pays en crise
Le retour à la croissance demeure erratique. Les récentes évolutions du PIB, qui est passé de 10,6% en 2011 à 4,4% en 2012, mettent en évidence la dépendance de l'économie au cours des matières premières, et la vétusté des infrastructures. Une vulnérabilité accrue par la faiblesse de la protection de la propriété intellectuelle, la difficulté de l'accès au crédit et l'incertitude qui pèse sur le climat d’investissement. Pour soutenir le développement du pays, Robert Mugabe a choisi de contourner les embargos des occidentaux en lançant une «politique de l’Est» afin de privilégier les échanges avec l’Asie. Un prisme qui ne séduit pas tout le monde.
«J’ai peur que le gouvernement reste sur ses positions hostiles à l’égard de pays occidentaux car nous avons besoin d’investisseurs pour booster les performances économiques de notre pays et créer de l’emploi», pense Desire Moyo, directeur de Victory Siyanqoba Trust, un organisme qui promeut les talents artistiques des jeunes. «La politique de l’Est n’est pas possible car l’Est regarde vers l’Ouest croit savoir la jeune Fotunate Taruva. Nous avons besoin de tout le monde et nous ne devrions pas dresser des barrières économiques qui entravent le développement. […] Notre futur est volé car nous n’avons pas l’opportunité de travailler et de gagner de l’argent comme les vieilles générations.»
Lu sur The Zimbawbean