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Kleinfontein, le village des nostalgiques de l'apartheid
Cette communauté d'Afrikaners a vécu de loin, et dans l'indifférence, les hommages rendus à Nelson Mandela.
Le héros de la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud, Nelson Mandela, a été inhumé le 15 décembre, à Qunu, le village de son enfance, dans le sud du pays. Pendant une dizaine de jours, depuis son décès le 5 décembre, le monde entier a pu rendre un hommage appuyé au premier président noir de l’Afrique du Sud et la figure la plus marquante de la réconciliation entre les sud-Africains blancs et les sud-africains noirs.
Pourtant, selon le Times Live, il est un endroit au monde où les gens n’ont pas participé à ce concert d’hommages. Cet endroit se trouve en Afrique du Sud, à quelques encablures de Pretoria, la capitale. Il s’agit de Kleinfontein, une enclave où vivent près de mille personnes, toutes blanches et qui règnent sur une superficie de 713 hectares.
Afrikaner enclave silent on big day http://t.co/6a7hMEWK82 As world paid tribute to Mandela, life went on as normal in Kleinfontein
— Times LIVE (@TimesLIVE) 11 Décembre 2013
Dans un reportage consacré à ce ghetto blanc, au mois de juillet, France Info parlait déjà de la communauté afrikaner de Kleinfontein en ces termes:
«Kleinfontein est une enclave où tout le monde ne peut pas rentrer, où l'accès est ultra-sécurisé. Pour ces Afrikaners, leur Afrique du Sud est et doit rester blanche.»
Et le reportage de CNN, diffusé quelques semaines auparavant, dans le cadre de son programme Inside Africa, ne montrait pas autre chose. À Kleinfontein, les populations disent pouvoir préserver l’héritage culturel de la minorité afrikaner. Mais, en réalité, il faut comprendre qu’ils sont nostalgiques de l’apartheid et font tout pour préserver les vestiges de cette époque.
À l’entrée du village, peut-on voir dans le document de CNN, une statue d’Hendrick Verwoed, un ancien Premier ministre afrikaner, considéré comme l’architecte de l’apartheid. C’est tout dire.
John Sharp, anthropologue à l’université de Prétoria explique à La Presse que les blancs de Kleinfontein «font partie de cette catégorie de blancs sud-africains qui n’ont jamais accepté le concept de ”nouvelle” Afrique du Sud de l’après-apartheid».
Bien évidemment, les noirs d’Afrique du Sud vivent difficilement l’existence de ce hameau formé au début des années 90, à la veille des premières élections multiraciales dans le pays. Le Daily Maverick sud-africain estime tout simplement qu’il s’agit de «racistes», qui estiment toujours être différents et supérieurs à tous les autres. Malgré tout cela, à Kleinfontein, personne ne se dit raciste. Marisa Hasbrook, la porte-parole de la communauté explique religieusement au JDD que «Dieu [les] a placés sur cette terre. Il [leur] a donné la mission d’aider [leurs] semblables».
Kleinfontein est-il donc le dernier bastion de l’apartheid en Afrique du Sud? Ses habitants sont-ils tous racistes? L’anthopologue John Sharp, toujours dans La Presse estime qu’il ne faut pas tirer si vite sur cette communauté.
«N'allez pas croire qu'ils sont si différents du reste du monde. Pensez à l'Europe, qui resserre de plus en plus son immigration», estime le chercheur.
Pourtant, leur indifférence face à la disparition de Nelson Mandela a marqué les esprits. Ils ont écouté de loin, les hommages qui étaient rendus à celui dont le rêve a toujours été de faire de l’Afrique du Sud une nation véritablement arc-en-ciel.
Lu sur La Presse, Daily Maverick