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Une ONG accuse une société suisse d'avoir affiné de l'or pillé par des rebelles en RDC
En Suisse, une entreprise risque des poursuites pour avoir affiné de l’or pillé au Congo par des groupes rebelles. Le site rue 89 publie en exclusivité le rapport de l'ONG.
L’entreprise suisse Argor-Heraeus, l’un des premiers affineurs de métaux précieux au monde, savait-elle que l'or affinée dans ses usines avait été pillée par des groupes rebelles en RDC? Selon l’ONG Track impunity always (Trial), cela ne fait aucun doute: «elle a déposé une dénonciation pénale contre l’entreprise suisse pour "blanchiment aggravé de matières pillées"», rapporte le site Rue 89 qui publie en exclusivité le rapport à charge de l'ONG.
De son côté, l'entreprise suisse Argor a déclaré ignorer la situation en République démocratique du Congo avant le mois de mai 2005, et nie entretenir des relations avec des sociétés en Ouganda et au Congo.
D'après l'ONG, l'or issu de pillages entre juillet 2004 et mai 2005 représente qu'une infime partie du chiffre d'affaire de l'affineur, estimée à 27 millions de francs suisses en 2006. Mais pour les avocats de Trial, il s'agit de taper fort pour le symbole:
«Il n’est pas possible pour des entreprises de blanchir des matières premières pillées ou, comme dans d’autres cas, de se rendre complices de crimes de guerre. Elles seront surveillées et dénoncées», explique l’avocat de Trial, Bénédict De Moerloose.
Comme le souligne Rue 89, ce n'est pas la première fois qu'Argor est mis en cause dans le blanchiment d'or pillé: «En 2005 et 2006, alors qu’ils enquêtaient sur la violation de l’embargo sur les armes visant la RDC, un groupe d’experts de l’ONU avait déjà établi la responsabilité d’Argor et d’autres entreprises (britannique et ougandaise) dans le pillage et le trafic d’or.»
Un pays comme la République démocratique du Congo, riche en matières premières, et en proie à des vagues de violences chroniques, est propice à ce genre de trafic. Chaque groupe tente de mettre la main sur les mines d'or.
Dans son rapport, l'ONG Trial dévoile le cheminement de l'or, depuis la RDC jusqu'aux pays chargés de l'affinage:
«L’or extrait illégalement transite la plupart du temps par les pays limitrophes. Selon plusieurs sources, ces “pays pillards” maintiendraient délibérément l’instabilité dans les régions aurifères congolaises afin de profiter de l’exploitation illégale. Des quantités importantes d’or traversent ainsi toujours la frontière, vers l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi, avant d’être affinées dans des pays tiers. »
Lu sur Rue 89