mis à jour le

Alain Moloto : ma part de vérité sur sa mort

Après les honneurs dignes d'un prince que les chrétiens du monde entier lui ont offerts, faut-il encore revenir sur les conditions réelles ou supposées de la mort d'Alain Moloto ? Quid de la belle unanimité qui l'a accompagné dans sa dernière demeure ? De son vivant, il tenait à me rapporter régulièrement comment la mort était à ses trousses et voulait que je puisse le savoir et en tenir l'opinion informée. Du premier empoisonnement dont il dit avoir été victime en Belgique de la part d'un pasteur en passant par son lit d'hôpital en Afrique du Sud jusqu'à un ultime entretien par téléphone après son retour au pays, Alain Moloto voulait que je sache et que je fasse savoir de quoi et pourquoi il pourrait payer de sa vie : « son combat pour les intérêts de la République et pour ceux du Royaume de Dieu. ».

Alors qu'il était sur son lit de malade en Afrique du Sud, il m'envoya son dernier livre par le producteur Antoine Katoto de Kin Express Productions avec ce message poignant qu'il m'adressa sous forme de dédicace (Voir le texte scanné ci-dessus) : « Cher Michel, ce document est le sens d'un engagement aussi bien pour les intérêts de la République que pour les intérêts du Royaume de Dieu. C'est ce qui explique tout le combat que j'endure en esprit et dans la chair. Prends en connaissance et échangeons à ce sujet. Ton Frère qui t'aime. Alain Moloto. Johannesburg 04/05/2013 ». Lors d'une conversation téléphonique que nous avions eue par la suite, Alain Moloto a déclaré qu'il était victime d'un nouvel empoisonnement de la part de personnes et de groupes dont il m'avait confié l'hostilité et les « plans diaboliques » qu'ils échafaudaient contre lui.

La mort à ses trousses

Un journaliste ne peut se substituer au procureur mais doit jouer son rôle de l'historien du présent en éclairant les tenants des faits à défaut de les établir d'une manière incontestable. C'est en 2009 qu'Alain Moloto, comme il l'avait déjà confié à d'autres médias et attesté dans sa chanson Naza na Yesu, avait affirmé, dans Afriqu'Échos Magazine avoir été empoisonné par un pasteur : « Je confirme cette tentative d'homicide et aussi que cela est venu de ceux qui professent matin et soir le Christ. Cet épisode est aujourd'hui un témoignage de la puissance de Dieu pour lequel je n'entends pas tirer une glorification personnelle ».

Quelques mois plus tard, le vendredi 27 novembre 2009, nous avons passé ensemble, avec Antoine Katoto, une soirée à Savigny-Le-Temple jusqu'à 4 heures du matin. Quand ils reprirent la route pour Bruxelles, ils furent victimes d'un grave accident que me décrivit avec émotion Antoine Katoto : « Nous avons été victimes d'un grave accident à 6 heures du matin. Notre voiture a fait quatre tonneaux avant de glisser sur une dizaine de mètres et de s'arrêter sur la bande d'urgence. Nous sommes indemnes, pas la moindre blessure et pourtant la voiture est méconnaissable. Nous roulions sur la bande de gauche et il pleuvait. Soudain, un vent très fort a soufflé de droite à gauche, la voiture s'est légèrement déportée et la roue gauche avant a percuté le terre-plein entraînant la série de tonneaux. Un quart d'heure avant l'accident, Alain avait détaché sa ceinture de sécurité qui le gênait. Mais par deux fois, une voix lui a demandé de remettre sa ceinture de sécurité. Bien lui avait pris de s'exécuter ».

Sept mois plus tard, soit le 8 juin 2010, Alain Moloto m'envoya, de Kinshasa, un sms pour me dire qu'il venait à nouveau d'échapper à la mort : « Salut Michel. Les musiciens de Gael ont fait un grave accident sur la route de Matadi. Ils revenaient d'une prestation d'une église de place. Le bus qui les transportait a fait trois tonneaux. Rien de grave car la main de Dieu nous a secourus une nouvelle fois. Le seigneur m'a divinement averti de ne pas me rendre car c'était programmé pour moi et j'avais alors décidé de ne pas faire le voyage ».

« Eden », l'action de trop ?

Rarement, un artiste et homme de Dieu n'a autant fait corps avec son pays. Alain Moloto avait l'amour de la RDC chevillé à sa foi. De nombreux passages de ses chansons évoquent son appel pour un futur règne de Dieu en RDC qui deviendra alors « ce pays où coulent le lait et le miel ». Et pour cela, quelques mois avant les élections de 2011, le leader du groupe Gael lança un mot d'ordre aux Congolais : « Ensemble, délivrons la nation ». Dans la ligne de mire de ses prêches : la classe politique « corrompue et vouée à l'occultisme » qu'il invite à se repentir. Dès les premières campagnes, un ami m'alerta sur les risques que courait Alain Moloto : « Lors d'une campagne à Gombe, il avait dû sortir par une issue derrière la salle pour échapper à deux personnes supposées être des agents des services de sécurité qui seraient venues pour attenter à son intégrité physique ». C'est en pleine campagne de l'élection présidentielle que, selon les témoignages d'Alain et de divers documents, les menaces se seraient faites plus précises. Inquiet pour sa sécurité, il me demanda de prendre l'opinion à témoin en me faisant parvenir, lors d'un rapide déplacement en Belgique, divers éléments qui montraient que ses interventions n'étaient pas du goût du pouvoir.

Joseph Kabila serait-il ainsi l'assassin d'Alain Moloto ?

Alain Moloto me paraissait très préoccupé pour sa sécurité, inquiet face aux « menaces venant de toutes parts » et n'éprouvait aucune gêne pour m'avouer son inquiétude. L'ami, le pote, le frère avait décidé d'en parler, de me prier d'en parler et plus encore s'il succombait à ses attaques. Dans nos divers échanges, Alain se disait être « la cible d'hommes politiques corrompus, des adeptes de l'occultisme et du satanisme qui cherchaient à l'éliminer ». Je n'adhérais pas à la totalité de son « Plan de Dieu pour le Congo », je lui disais d'ailleurs que certaines de ses idées me paraissaient irréelles, mais ses craintes m'avaient paru fondées et avaient été corroborées par plusieurs personnes crédibles qui n'avaient aucun lien avec l'illustre disparu. Cependant, lors de nos divers échanges, autant il n'avait aucun doute sur l'hostilité et sur un projet de son élimination physique de la part de certains rouages du pouvoir, autant Alain Moloto ne m'avait jamais confié que Joseph Kabila en était, selon lui, l'instigateur. Il l'aurait peut-être confié à d'autres personnes, ce que je n'exclus pas, mais ce n'est pas un soupçon dont il m'avait parlé.

Connaîtra-t-on jamais la vérité, toute la vérité, sur la mort d'Alain Moloto ? Lui-même connaissait-il seulement toute la vérité ? Connaissait-il son ou ses assassins ? Au regard des honneurs qui lui ont été rendus, ces questions ne sont-elles pas vaines ? Sa mort n'a-t-elle pas permis que gloire soit rendue à Dieu comme on ne l'avait jamais fait dans ce pays ? Ne serait-ce pas à ça que, finalement, il avait consacré toute sa vie chrétienne ? Athoms et Nadège semblent répondent à cette question dans leur chanson Mpo na bolamu : « Makambo yango epesi biso kolela, kasi Nzambe sala oyo elingi yo » (Nous sommes en pleurs, mais Seigneur que Ta volonté soit faite).|Botowamungu Kalome (AEM)

JPEG - 130.5 ko
Chaleureuses retrouvailles à Savigny-Le-Temple|Photo :© AEM

JPEG - 89.3 ko
Évocation de vieux souvenirs cocasses|Photo :© AEM

JPEG - 112.8 ko
Avec Fifi Botowamungu et la chanteuse Philie Nyemba|Photo :© AEM


AFRIQUECHOS.CH

Ses derniers articles: Angola : le général Bento Kangamba accusé de trafic sexuel au Brésil  Congo : 27ème édition de la journée nationale de l'arbre  Sondage : des cinq pays africains qualifiés au Mondial 2014, qui peut créer la surprise ? 

vérité

AFP

Lutte contre les jihadistes au Sahel: l'heure de vérité pour la force militaire régionale

Lutte contre les jihadistes au Sahel: l'heure de vérité pour la force militaire régionale

AFP

Le Burundi étend jusqu'

Le Burundi étend jusqu'

AFP

Mali: l'opposition dénonce des résultats qui "ne reflètent pas la vérité des urnes"

Mali: l'opposition dénonce des résultats qui "ne reflètent pas la vérité des urnes"

mort

AFP

Calme

Calme

AFP

Des milliers de fans réunis

Des milliers de fans réunis

AFP

Togo: silence pesant trois mois après la mort suspecte d'un officier supérieur

Togo: silence pesant trois mois après la mort suspecte d'un officier supérieur