mis à jour le

Le beau geste de Soumaïla Cissé
Avant même la proclamation des résultats, Soumaïla Cissé a admis sa défaite et félicité son rival.Une surprise pour beaucoup de Maliens.
Admettre sa défaite, saluer le vainqueur, et cela avant même la proclamation des résultats officiels, est une pratique déjà vue en Afrique. Pourtant, le geste du candidat malheureux à l’élection présidentielle malienne, Soumaïla Cissé, a grandement surpris.
A peine 48 heures après la tenue du second tour de l’élection présidentielle, celui-ci s’est rendu en famille féliciter son rival Ibrahim Boubacar Keita crédité de 39,7% des voix au premier tour du scrutin. «Je suis allé le voir pour le féliciter et lui souhaiter bonne chance pour le Mali», a déclaré l'ancien ministre des finances. […] Il a beaucoup apprécié mon geste et il me l’a dit. Il m’a remercié. […] Il a insisté sur la nécessité de faire gagner le Mali, ce que je partage avec lui comme objectif.»
Pour André Bourgeot, anthropologue au CNRS et spécialiste de la bande sahélo-saharienne, le geste de Soumaïla Cissé est novateur. Au-delà de la courtoisie républicaine saluée par la classe politique malienne, la démarche de Soumaïla Cissé porte une dimension symbolique et politique très forte.
«Soumaïla Cissé se rend au domicile de son adversaire en famille. Une famille rencontre une autre famille : c’est une pratique ancrée dans le quotidien des Maliens qui, cette fois, donne une dimension politico-humaine à l’évènement.»
Mon jeune frère Soumaïla Cissé vient de quitter mon domicile. Il est venu avec sa famille me féliciter pour la présidentielle
— Ibrahim B. Keita (@IBK_2013) August 12, 2013
Sur les réseaux sociaux, les Maliens ont applaudi le dénouement heureux des premières élections maliennes organisées depuis le renversement du président Amadou Toumani Touré par une junte militaire en mars 2012. Dans un pays encore marqué par la guerre qui s’est jouée au nord du pays entre les armées maliennes et françaises et des groupes islamistes, on craignait un scrutin trop précoce, trop désorganisée, même trop néfaste pour l’unité du pays.
Or la manière dont le candidat Cissé a réagi augure du contraire. «Est-ce que cette démarche annonce la mise en place d’un gouvernement d’union nationale?» Ce n’est pas impossible, juge André Bourgeot. Un processus de réconciliation pourrait se mettre en marche entre ces deux camps de la scène politique malienne.
Slate Afrique