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Tamarrod , 30 juin 2013 : La marée humaine !

Par Ridha Ben Kacem

Tout au long de la journée d'hier, des sources d'information proches du pouvoir, n'ont cessé d'annoncer que la mobilisation de mouvement Tamarrod , n'a attiré que quelques centaines de milliers de personnes dans la rue, à travers toute l'Egypte, ce qui est bien sûr beaucoup, mais, pas assez. En effet, d'après le pouvoir islamiste en place, en Egypte, on a enregistré 200 000 manifestants, au Caire et 100 000, à Alexandrie. La logique derrière l'annonce de ces chiffres, est de dire, tant aux égyptiens, qu'aux chancelleries étrangères, occidentales, notamment, que le mouvement Tamarrod a culminé le vendredi 28 juin, avec plus d'un million de personnes, dans les rues du pays, et qu'il a vite décliné, au lieu d'aller crescendo, jusqu'au 30 juin. Cela signifierait bien sûr, deux choses : Primo, que le mouvement a failli, dans son challenge, de faire descendre des millions de personnes, dans la rue, alors même, qu'il a enregistré l'adhésion de 22 millions et 134.000 de personnes, à son projet de destituer le président Morsi, par un grand mouvement contestataire, de la rue. Deuxio, que le mouvement n'était qu'une bulle d'air, qui s'est vite dégonflée et qu'il n'y a pas lieu, par conséquent, de s'inquiéter, pour le pouvoir en place et pour la stabilité de l'Egypte. En d'autres termes, que la situation est sous contrôle.

J'avoue que j'étais plutôt, dubitatif, face à de tels chiffres, qui ne me paraissaient pas correspondre aux images TV et je désespérais d'avoir les bons chiffres de la mobilisation égyptienne, au cours de cette journée mémorable du 30 juin. Et puis, soudain, vers 23 h 24 minutes, heure tunisienne, une source militaire égyptienne autorisée, déclare, sous couvert de l'anonymat, que l'armée égyptienne, déployée à travers tout le pays et toutes les villes, estime à « plusieurs millions » le nombre de manifestants qui défilaient dimanche, à travers le pays, pour réclamer le départ du président islamiste Mohamed Morsi. La même source ajoute qu'il s'agit « de la plus grande manifestation, dans l'histoire de l'Egypte ». Mieux, la source indique également, que « le rassemblement d'islamistes favorables au président, dans un faubourg du Caire, à la grande place de Rabâa Adawyia, a réuni environ 25.000 personnes, dimanche 30 juin 2013 ». Voilà, tout est dit.

Retenez donc, que mouvement tamarrod a atteint son objectif, de faire descendre dans la rue, plusieurs millions de personnes, dimanche 30 juin, alors que le pouvoir en place et les frères musulmans, qui avaient appelé leur troupes, à se mobiliser, à leur tour, ont échoué lamentablement, à le faire. Ceci est indiscutable et les 500 000 contremanifestants revendiqués officiellement, par le pouvoir, n'ont jamais existé, que dans son imagination. Retenez aussi, que Morsi a été élu président, il y a tout juste un an, avec une majorité absolue et confortable de 51,73% des voix exprimées. Cela signifie qu'il a perdu toute crédibilité, auprès de ses propres électeurs, en seulement quelques mois. Ennahdha ferait bien de retenir les leçons nécessaires, de cette dure réalité de la débâcle des frères musulmans d'Egypte, que les événements nous ont apporté, en ce 30 juin 2013. Est-il nécessaire de rappeler qu'Ennahdha n'a bénéficié que d'une majorité toute relative, de 37,04% des voix, lors des élections de la constituante du 23 octobre 2011 et ce, grâce à la mise à la poubelle d'autant de voix que ce qu'elle elle-même obtenue. S'il y avait eu ce jour là, des élections présidentielles, où il n'y a de poubelle, pour les voix dispersées, le candidat d'Ennahdha n'aurait pas dépassé le tiers des voix des tunisiens et encore, et c'est très loin des résultats obtenus pas Morsi, faut-il le rappeler, encore une fois ? Non, Rached Ghannouchi n'est certainement pas, « la colonne vertébrale de la Tunisie »,comme il aime à le croire et à le répéter, partout, ni même son petit orteil du pied gauche, du reste, comme le prouvent tous les sondages d'opinons réalisés depuis plus d'une année. Les frères musulmans tunisiens d'Ennahdha, sont loin d'être aussi enracinés, dans la société tunisienne, que leurs homologues égyptiens et pourtant, ils le croient ou feignent de le croire.

Retenez aussi, que les égyptiens, tout en étant moins instruits, dans leur ensemble, que les tunisiens, sont également, beaucoup plus traditionnalistes, dans leur plus grande majorité. Malgré cela, Morsi a perdu toute crédibilité, à leurs yeux, au bout d'un an. Que Rached ghannouchi et compagnies, continent à croire, qu'ils sont encore, les plus nombreux, dans le pays cela me m'épate, car cela explique, en fin de compte, pourquoi ces décalés croient que leur gouvernement est le plus fort de l'histoire du pays. Histoire qu'ils ne connaissent pas, bien entendu. Maintenant, c'est au CPR, Ettakatol et accessoirement, Wafa de tirer les leçons de ce séisme politique égyptien, qui a secoué le monde entier, en ce 30 juin 2013. Aujourd'hui, premier jour du second semestre de cette année, nul doute qu'a Washington, Londres, Paris et Berlin l'on doive s'interroger sur le fait de savoir s'il faut continuer ou non, à soutenir ces mouvements rétrogrades, contre vents et marées, alors qu'ils ne sont plus enracinés dans leur propres pays, ou du moins, pas autant que le croyait l'Occident, il y a à peine deux ans. Avez-vous compris ce que je viens de vous expliquer, vous les rétrogrades, qui êtes aujourd'hui, aux postes de commande de ce pays ?

Je vais être encore plus clair. Les rats commencent à quitter le navire, en Egypte. En effet, hier 30 juin, quatre membres du Conseil Consultatif égyptien et leurs familles, appartenant à différents courants islamiques, affiliés aux frères musulmans, ont quitté l'Aéroport du Caire, à destination de Londres, là où vivait notre Cheikh du smog, avant la révolution du 14 janvier 2011. Il s'agit de Mohamed Ahmad Youssef Mohamed, du parti el-Hadara (la civilisation), Amr Farouk du parti el-Wassat, Tharwat Mohamed Anwar Nafee du parti du Front et Taher Abdel Mohsen Ahmad Soliman du parti de la Liberté et de la Justice. Oui, messieurs, les rats commencent à faire leurs bagages et à quitter précipitamment, l'Egypte où le temps est vraiment, à la tempête, la tempête qui les emportera, à jamais. Or, s'il y a quelque chose qui ne connait pas de frontière, c'est bien le vent, le vent qui vous emportera à votre tour, de ce pays, sans retour. J'espère que vous avez retenu vos places, sur les prochains vols, à destination de Londres et de son smog pourri.

Maintenant, si d'après ce que vous avez vu, ce samedi au Bardo, vous pensez que les tunisiens ne se mobiliseront jamais, contre vous, je vous rappelle que c'est ce que croyait aussi, ZABA, jusqu'au 17 décembre 2010, lui, qui avait les meilleurs services de renseignement d'Afrique et du mode arabe, n'a rien vu venir, car les tunisiens, ne programment pas, mais s'expriment librement et en masse, lorsqu'ils sentent que le moment est venu. Tous les indicateurs disent que « le moment est venu » et l'occasion pourrait bien être celle à laquelle, vous ne pensez pas, car qui aurait pu penser un jour, qu'un simple marchand ambulant de légumes, à Sidi Bouzid, en craquant une allumette, allait allumer la mèche d'une bombe mondiale, si puissante que l'on n'arrive pas à en mesurer jusqu'à maintenant, tout le potentiel sismique et énergétique, qui est en train de redessiner l'histoire et la géographie du monde, qui ne sera plus jamais, que celui que nous avons connu. Les millions d'égyptiens descendus dans la rue, le 30 juin 2013, ne sont, en fin de compte, que l'une des nombreuses conséquences, de cette fameuse allumette craquée, un certain 17 décembre 2010, à Sidi Bouzid. L'effet papillon a réellement, engendré la tempête, là-bas, en Egypte et le trône du pharaon, n'en finit pas, de trembler.

La tension en Égypte, n'a cessé de croître, toute la semaine dernière. Vladimir Belikov, analyste à l'Institut d'études orientales de Moscou, écrit : « Je ne crois pas à la possibilité d'une guerre civile, parce que l'armée joue le rôle de tampon, entre deux fractions en confrontation de la société égyptienne. Son commandement a déjà déclaré qu'il ne permettra pas que les événements dégénèrent en confrontations sérieuses ou effusion de sang. C'est l'armée qui doit se scinder à son tour pour qu'éclate la guerre civile, ce qui est hautement improbable ». Oui, l'armée égyptienne, tout comme son homologue tunisienne, est républicaine et ne peut être noyautée, malgré les tentatives répétées d'Ennahdha, depuis le milieu des années 1980. Récemment, Rached Ghannouchi, déclarait aux salafistes comploteurs, qui l'entouraient, qu'il ne d'espérait pas de rallier à sa cause, l'armée. En d'autres termes, de la noyauter. Je parie que Rached Ghannouchi ne connait pas le fonctionnement de l'armée de l'intérieur et c'est pour cela qu'il tire des plans sur la comète, avant de repartir, dans quelque temps, sur le chemin de l'exil volontaire et définitif, là-bas, dans le smog londonien.

Si l'on en est là, aujourd'hui, en Egypte, c'est que la société égyptienne, dans son ensemble, a rejeté ces tartuffes de la religion. On ne doit surtout pas croire que c'est une crise passagère, comme celle que nous avons connue, avec l'assassinat de Chokri Belaïd, et qui a vu la mobilisation de plus d'un million et demi de personnes, dans la rue. Si c'était une crise passagère, les tentatives de Morsi d'entamer le dialogue, avec les leaders de l'opposition, auraient été couronnées de succès. Or, elles se sont soldées par un échec lamentable, alors que dès le 26 juin, Morsi s'est dit prêt, à discuter d'un nouveau train de réformes et a même proposé de créer un comité interpartis politiques, chargé de la révision de la constitution. Mieux, il est allé jusqu'à reconnaitre « avoir commis des erreurs »,Ce qu'Ennahdha n'a jamais reconnu. Mais, vous savez ce que l'on dit, dans ce cas là ? Oui, « trop tard et trop peu »,alors même que Morsi offre aujourd'hui, plus que ce demandait l'opposition, jusqu'à fin mai 2013. Incroyable, non ? Encore une leçon à tirer, pour le plus grand gouvernement de l'histoire de Tunisie.

L'armée égyptienne a fait opposition à la tentative désespérée et ridicule, du pouvoir de maquiller la réalité en minorant le nombre des manifestants, du 30 juin. Les différentes sources parlent de 4 à 8 millions d'égyptiens, dans les rues des villes égyptiennes, ce qui est extraordinaire, lorsque l'on sait que ce n'est pas une journée chômée. Pourtant, elle a été choisie a dessein, justement, parce qu'elle est chômée, dans les pays qui comptent, car le spectacle s'adressait à tout le monde et c'était réussi. De la virtuosité et de la haute voltige, comme seuls les réalisateurs de Hollywood en sont capables, au cinéma. Rétrospectivement, on ne peut qu'admirer davantage, le mouvement Tamarrod, qui a pris des risques considérables, et a magistralement, réussi son challenge, en transformant l'essai de vendredi dernier. Bravo, messieurs, je vous salue bien bas. D'autant plus bas, que vous nous donnez une leçon magistrale, que nous ne sommes pas prêts d'oublier. On estime à plus de 200, le nombre de chaines de TV qui ont relayé en direct, partout, dans le monde, ce spectacle grandiose, ahurissant et inédit. Selon la chaîne de télévision Al-Mayadin, les militaires égyptiens ont donné au gouvernement et à l'opposition, une semaine, pour arriver au compromis. Si la situation continue à se dégrader, a déclaré le ministre de la défense Abdel Fattah as-Sisi, « l'armée prendra sous sa protection, l'Etat et le peuple égyptien ».L'Etat et le peuple, pas le pouvoir, vous comprenez ? Pas le pouvoir en place, et surtout pas MORSI !

Si j'ai un seul reproche à faire, au général Ammar, c'est d'avoir choisi le mauvais tempo, pour faire prévaloir ses droits à la retraite, au moment même, où le chef de l'armée égyptienne Abdel Fattah as-Sisi, annonce que « l'armée prendra sous sa protection l'Etat et le peuple égyptien ». L'armée tunisienne a aussi, son rôle à jouer, dans le processus postrévolutionnaire, encore en cours, en Tunisie et ce n'est vraiment pas le moment, de penser à la retraite, ni à aucun autre projet familial ou autre, car, dans la vie, il y des priorités, qui ne sont pas forcément, celles que l'on choisit à titre individuel, en faisant abstraction du destin. Rachid Ammar a avoué lui-même, qu'il était à l'origine du projet de Hamadi Jebali, de constituer un gouvernement de technocrates. L'initiative, certainement sincère et louable, a permis de calmer la colère populaire et de gagner suffisamment, de temps pour absorber la tension de la rue. Au vu de ce qui se passe aujourd'hui, en Egypte, je me prends à rêver d'un monde parallèle, où l'initiative de Rachid Ammar, n'aurait pas eu lieu et où la tension de la rue n'a pas été amortie. D'un monde où la mobilisation de la rue tunisienne, ce 8 février 2013, n'a pas faibli et a abouti au départ des tartuffes et des rétrogrades, du pouvoir, sous peine d'être châtié, par la vindicte populaire, qui ne pardonne rien. Bref je rêve d'une Tunisie, qui aurait pu précéder l'Egypte, et Tamarrod, sur le chemin de la rébellion populaire, si Hammadi Jebali n'avait pas fait sa proposition, qui lui a été soufflée, par le Général Ammar.

Mais l'on ne refait pas le monde en rêve, avec des « si ».On peut le refaire, par contre, par le retrait d'une démission, le temps de corriger le cours de l'histoire, qui n'avait pas pris la bonne direction, le 8 février 2013, à cause d'une certaine proposition. Mes respects, mon Général.

Par Ridha Ben Kacem le 1èr juillet 2013

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