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Hamid fall, fiscaliste «il faut faire de la fiscalité à visage humain»

A 46 ans, l'ancien conseiller du Président de la République, Abdoulaye Wade, Inspecteur principal des Impôts et Docteur en Droit dispose d'une expérience de 24 ans dans l'administration fiscale. Dans cet entretien, il revient sur le contentieux qui a opposé dernièrement les patrons de presse à l'Etat du Sénégal.

Comment marche la fiscalité pour chaque groupe de la population active ?

La fiscalité marche comme dans tous les pays du monde. Il faut le revenu, la dépense et le capital. L'Etat doit taxer ces 3 niveaux. Partout dans le monde, on peut parler de la fiscalité comme une question de ponction publique. L'Etat doit récupérer le revenu imposable entre les mains du contribuable.

On sait que la fiscalité diffère d'un groupe de population à un autre. Par exemple, la fiscalité d'un ménage diffère de celle d'un groupe de presse. Comment cela se passe ?

Suivant la nature de l'activité, la fiscalité s'adapte. La presse n'a pas de problème. Nous, nous avons une disposition de communication institutionnelle. Pour toute activité génératrice de revenus, l'impôt est obligatoire. Il n'y a pas de différenciation technique par rapport à la presse. Mais si la presse doit de l'argent, elle doit payer.

Comment fonctionne la fiscalité pour les entreprises de presse. Peut-on connaître le barème, les conditions et critères ?

La fiscalité a un gros avantage, c'est qu'il n'y a pas de taxe sur la valeur ajoutée pour ce qui concerne la presse. C'est ce qu'on appelle la position éducationnelle qui est exonérée de Tva. Cela signifie qu'il n'y a pas de taxe sur la valeur ajoutée alors que la Tva qui est à 18% aujourd'hui est l'impôt le plus élevé du monde de la base taxable. Dans la zone Uemoa (Union économique et monétaire ouest-africaine), c'est partout pareil. Nous n'avons pas de problème avec la presse. La presse est une entreprise qui génère des revenus taxables à la fin de l'année. C'est l'impôt sur les sociétés. Il faut le payer. On était à 25% et aujourd'hui, on est à 30%. Quand on retient l'impôt à la source pour chaque employé, il faut que l'employeur le déclare au fisc. Et si l'employeur ne le déclare pas, le fisc tombe sur lui. Par contre, il ne faut pas que les pouvoirs publics instrumentalisent la fiscalité à des fins politiques. Cela signifierait que nous, on travaille pour ne rien faire. Ils ne faut pas que les pouvoirs publics utilisent la fiscalité pour des règlements de compte. Il faut travailler dans un système où la traçabilité est possible. Qu'importe le statut social, il faut payer. Il faut déclarer les impôts et les employés. Il faut des contrats de travail. Là, je parle de la fiscalité au droit du travail. La Direction générale des impôts a mué. Elle a changé de personnalité. Nous, nous avons besoin de contribuables qui viennent vers nous plutôt que d'avoir le contraire. Aujourd'hui, il faut faire de la fiscalité à visage humain. Il arrive que des gens n'aient pas de quoi payer l'impôt. Aujourd'hui, il faut investir dans la solidarité. Mais, solidarité ne signifie pas ne pas payer, il faut payer sinon, il y a des employés qui ne percevront plus leur salaire.

Y-a-t-il un barème pour les entreprises de presse ?

Il y en a. Mais, je ne l'ai pas en tête.

Combien font entrer annuellement les groupes de presse en termes de redevance ?

Les entreprises de presse font entrer des milliards, mais je n'ai pas le chiffre exact. Le budget de l'Etat fait actuellement 2 000 milliards et 80% de ce budget vient des impôts, le reste va à la Douane. Aujourd'hui, avec ce qu'on appelle la transition fiscale, les impôts récupèrent l'essentiel de l'économie publique. Et cela, il faut que les gens puissent le savoir. Maintenant, il y a une disposition dans le Code général des impôts qui dit que nul n'a le droit d'annuler un impôt. Avec la législature d'Abdoulaye Wade, il a été question d'effacer l'ardoise fiscale de la presse. Mais aujourd'hui, je dirais qu'il avait tort de faire cela. Tout le monde doit payer l'impôt.

A ce propos, Sidy Lamine Niasse dit qu'il détient une lettre signée par l'ancien chef de l'Etat, Me Abdoulaye Wade et que dans cette correspondance, il était question qu'il soit exempté d'impôts. Est-ce qu'un chef d'Etat peut exonérer une entreprise de presse du paiement de ses impôts ?

Cette lettre se limitait à un délai, mais passé ce délai, Sidy Lamine devait recommencer à payer l'impôt comme toutes les autres entreprises de presse. Cette lettre n'est plus valable. Elle compatit juste pour une durée donnée et bien précise.

Pourquoi les entreprises de presse rechignent-elles à s'acquitter de leur dû au fisc ?

Il y a ce qu'on appelle aujourd'hui la théorie de la fraude fiscale. Il y a beaucoup de fraude fiscale au Sénégal et parmi les entreprises inscrites au Conseil national du patronat (Cnp), il y en a beaucoup qui ne font que frauder. L'Etat doit taxer les plus riches et le Président Macky Sall doit prendre ses responsabilités. Aujourd'hui, les plus riches paient moins que les moins nantis. Cela n'est pas bien. On appelle cela l'équité horizontale et verticale.

Avec les entreprises de presse, quel est exactement le n½ud du problème ?

Il n'y a pas de problème. On veut taxer l'impôt par nature. Il faut absolument qu'il y ait l'équité horizontale, que tout le monde paie au même niveau.

Quand une entreprise de presse reconnaît son incapacité à payer son ardoise fiscale, quelle est la solution pour l'obliger à payer sans pour autant l'étouffer ?

Le moratoire. Il faut écrire une lettre documentée au bureau du chef de recouvrement qui verra avec vous comment payer votre impôt suivant des délais que vous aurez définis ensemble, au préalable. Cette méthode existe et personne ne peut vous la refuser.

Pourquoi la fiscalité est-elle si nébuleuse au Sénégal, surtout pour les entreprises de presse ?

Dans tous les pays du monde, la fiscalité est nébuleuse. La fiscalité est un métier très nébuleux et elle l'est parce qu'il s'agit de l'argent public. Souvent aussi, les gens ne veulent pas s'acquitter de leurs impôts. Personne n'aime la fiscalité parce que les gens n'aiment pas sortir l'argent. La fraude fiscale doit être éliminée de ce pays.

Que répondez-vous aux patrons de presse qui réclament une fiscalité plus appropriée ?

Dans la dernière réforme fiscale du Sénégal, il y a eu beaucoup d'avancée. Je suis prêt à ouvrir une concertation avec les patrons de presse afin de trouver la meilleure formule qui soit pour le paiement des impôts. Il faut que les patrons de presse cotisent pour ne pas être humiliés.

Est-ce que les Sénégalais paient la redevance audiovisuelle ?

La redevance audiovisuelle a été créée il y a quelques années. C'est très compliqué, mais elle est payée. Tous les ménages la paient.

Combien doivent-elles payer et en fonction de quel médium?

Tous les ménages paient chaque année un tarif forfaitaire, par foyer et en fonction de la connexion à l'audimat.

L'Observateur

Rewmi

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