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Somalie - Les pilleurs de l'aide alimentaire

D’importants stocks de nourriture estampillés ONU et USAID (l’agence d’aide humanitaire du gouvernement américain) envoyés par les gouvernements japonais et koweïtien et destinés aux millions de Somaliens souffrant de la famine seraient, selon le Guardian, détournés pour être vendus sur les marchés de Mogadiscio, la capitale, et dans de nombreux magasins.

Seraient concernés, entre autres, biscuits, grains, du Plumpy’nut (un traitement d'urgence contre la malnutrition) et même des dattes, affirme l’agence américaine Associated Press (AP).

Au total, les preuves apportées par l'agence suggèrent que près de 1% de l’aide alimentaire mondiale serait détournée de son objectif initial pour être revendue en toute illégalité. Le Programme alimentaire mondial (PAM) reconnaît qu’il a, grâce à son propre système de surveillance, constaté des détournements.

Néanmoins, son porte-parole Greg Barrow estime «invraisemblable» l’échelle du vol évoqué par AP. Selon lui, une telle opération supposerait une «logistique comparable à celle que nous [le PAM] avons à Mogadiscio».

Le chaos qui règne en Somalie depuis vingt ans a conduit les organisations internationales à limiter l’envoi de personnel sur place et à s’appuyer sur un réseau d’agences d’aide locales. Mais l’AP a révélé que le PAM employait un entrepreneur, Abdulqadir Mohamed Nur, accusé dans un rapport de l’ONU d’avoir dérobé d’importantes quantités d’aides alimentaire en 2010. Greg Barrow a réfuté ces accusations.

Cependant, «le vol de l'aide alimentaire est un problème ancien et profondément enraciné», a observé Mark Bowden, le chef des opérations humanitaires des Nations unies en Somalie.

«C’est le prix à payer quand on fait des affaires en Somalie», a estimé un responsable humanitaire qui n’a pas été autorisé par son organisation à s'exprimer publiquement.

Déjà, lors de la dernière famine en Somalie, «les seigneurs de la guerre et leurs milices» rackettaient les cargaisons d’aide internationale, affirme The New York Times. A tel point que les humanitaires ont pour habitude de baptiser ces vols de «distribution traditionnelle».

Le PAM a diligenté une enquête sur les détournements constatés. De plus, l’organisation onusienne exige désormais des entreprises de livraison qu’elles lui remboursent le prix de la nourriture non livrée.

La Somalie est depuis vingt ans le théâtre d’une guerre civile féroce, et le gouvernement fédéral de transition ne contrôle encore que partiellement la capitale Mogadiscio.

Au début du mois d'août, une fusillade a éclaté dans un camp de déplacés au sud de la capitale, entre l'escorte d'un camion d'aide alimentaire et des individus armés venus le piller, faisant au moins quatre morts parmi les réfugiés.

Lu sur le Guardian, The New York Times